Entretien avec Didier Lamouche, Président Directeur Général de Bull

Boursier.com : Le chiffre d’affaires du quatrième trimestre s’affiche toujours en repli, y a-t-il du mieux malgré tout ?

D.L. : Le chiffre d’affaires annuel est quasiment stable, en légère décroissance de 0,9% à taux de changes constants. Il faut surtout le comparer au marché où les entreprises positionnées sur le Hardware informatique font plutôt dans les -15% à -5% pour les entreprises dans les Services… C’est donc une année où notre modèle économique a très bien résisté malgré la crise et comme nous l’avions prévu.

Boursier.com : La satisfaction reste un EBIT supérieur à vos prévisions…

D.L. : Nous avons dépassé nos engagements pris vis-à-vis des marchés de plus de 10% puisque nous affichons 28 ME de résultat opérationnel, avec une génération de Trésorerie opérationnelle de plus de 10 ME sur l’année. Dans le contexte actuel, il s’agit de résultats tout à fait honorables.

Boursier.com : Quels sont les objectifs que vous pouvez désormais fixer pour 2010 ?

D.L. : Notre division ‘Extreme Computing’ devrait croître de manière très forte. Nous visons 15% de parts de marché en Europe et nous nous attendons à un retour de la croissance au deuxième semestre 2010. Nous visons de 35 à 40 ME d’EBIT pour 2010, incluant l’impact d’Amesys.

Boursier.com : Donc le premier semestre devrait rester difficile pour Bull. Comment cela se traduira t-il dans vos comptes sur la période ?

D.L. : Le marché est toujours difficile et nous restons très prudents pour la première partie de l’année. Nous allons cependant améliorer fortement notre rentabilité sur l’année, notamment grâce à la société que nous avons acquise en fin d’année dernière, Amesys. Nous prenons trois initiatives fortes pour notre développement en 2010 : continuer à améliorer notre effort de ‘R&D’, recruter 600 personnes dont 250 en France et, enfin, intégrer au mieux Amesys pour proposer à nos clients des solutions de traitement du signal et de l’information comme, par exemple, la vidéo surveillance automatique ou le pilotage GPS intelligent…

Boursier.com : Quel est votre sentiment sur cette reprise que vous attendez au deuxième semestre ? Sera-t-elle franche à votre avis ?

D.L. : Nous attendons davantage de nos offres Bull que du marché ! Nous avons travaillé depuis plusieurs années pour proposer à nos clients des offres innovantes, notamment en ‘Extreme Computing’, mais aussi en Infogérance de systèmes Informatiques et on voit que le marché adopte très bien nos offres, malgré les difficultés économiques… Donc c’est vraiment un effort spécifique à Bull qui nous rend optimiste pour la deuxième moitié de l’année.

Boursier.com : Avec le recul, comment analysez-vous cet exercice 2009 difficile ?

D.L. : Nous avons pris une nouvelle dimension en 2009 et sommes devenus, en cinq ans, un acteur majeur de l’économie numérique européenne. Quel est le meilleur super calculateur au monde ? La réponse est française et c’est un Bull ! Et c’était plutôt inattendu il y a encore quelques années !… Nos systèmes sont maintenant utilisés par de grands groupes pétroliers, comme Petrobras à qui nous allons livrer le plus grand super calculateur d’Amérique latine. Mais on peut aussi retrouver nos innovations auprès du grand public : dans le film d’animation « Planète 51 » actuellement sur les écrans, les images ont été optimisées grâce à des super calculateurs Bull…

Boursier.com : Pouvez-vous nous commenter l’activité de Bull sur le 1er semestre ?

D.L. : Le groupe a entrepris depuis quelques années une profonde transformation de son business model et de ses activités. Ce travail de transformation et l’effort d’innovation renforcent clairement la position du Groupe, qui affiche une performance solide au premier semestre. Nous réalisons désormais près de la moitié de notre chiffre d’affaires dans les services et nous maintenons, malgré la crise, une croissance entre 4% et 5% des commandes et du chiffre d’affaires pour les offres coeurs du Groupe au premier semestre.

Boursier.com : Comment peut-on expliquer cette croissance ?

D.L. : Bull bénéficie à plein de la solidité de son positionnement sur le secteur public ainsi que sa moindre exposition aux secteurs très touchés tels l’industrie ou les services financiers. Dans les pays émergents, nous avons lancé des offres spécifiques pour des clients étatiques comme la refonte des programmes de taxe et douane. L’activité hardware et systèmes bénéficie de notre nouvelle offre de simulation numérique, Bullx, dont le succès démontre la pertinence de nos choix. Cette offre, quasi inexistante il y a cinq années, est devenue ce semestre la première offre produits du Groupe. Aujourd’hui, nous avons l’ambition d’intégrer le top 3 du marché de l’Extreme Computing.

Boursier.com : Sur l’Extreme Computing et sur les solutions de stockages, l’objectif visé était de 100 ME de CA pour chacune des activités … êtes vous en ligne avec ces objectifs ?

D.L. : A l’heure actuelle, nous sommes très proches de ces objectifs, fixés voici quelques années et ce malgré la crise.

Boursier.com : Comment se présente l’ensemble de l’année ?

D.L. : Nous nous étions engagés à réaliser plus de 20 ME de rentabilité opérationnelle sur l’ensemble de l’exercice 2009, nous relevons cette prévision à 25 ME. Bull a clos un 1er semestre tout à fait satisfaisant et nous espérons maintenir cette avance sur la 2eme partie de l’année. Aussi, nous avons confiance dans notre business model, qui démontre notre capacité de résistance face à la crise.

Boursier.com : Concernant la partie services, où en est le passage de la convention collective de la métallurgie à celle du Syntec ?

D.L. : Dans notre activité de services, le temps de travail était inférieur à celui observé dans la concurrence, constituant un handicap majeur. La semaine d’écart par rapport à la concurrence est due à la convention collective en application et aussi à de anciens accords concernant les RTT passés à la fin des années 90. La réduction des jours de ponts constitue une première étape importante. Nous devons désormais, avec les partenaires sociaux, poursuivre les discussions engagées, afin de réduire très rapidement le reste du handicap. Ce temps de travail étant un réservoir de productivité significatif.

Boursier.com : A moyen terme, quel niveau de marge opérationnelle visez-vous ?

D.L. : Nous avons observé que plus de 30% du chiffre d’affaires provenait d’offres qui n’existaient pas trois ans auparavant. D’ici trois à quatre années, au regard de l’attraction suscitée par nos nouvelles offres, il nous semble donc envisageable de parvenir à des niveaux de rentabilité opérationnelle proches de ceux habituellement constatés sur ces marchés.

Boursier.com : Quel est l’impact de la pandémie sur l’activité du groupe ?

D.L. : Toute la profession est assez inquiète à ce sujet et nous prévoyons un risque économique assez fort. Une pandémie pourrait avoir un impact important notamment sur la mobilité des collaborateurs. Notre offre ‘Globull’, lancée l’année dernière, est parfaitement adaptée pour le travail à domicile puisque l’environnement de travail du salarié est stocké dans un PC de poche portable et cela de façon sécurisée.

Boursier.com : Les ventes de « Globull » sont-elles en ligne avec vos attentes ?

D.L. : Les ventes du produit sont totalement en ligne avec nos attentes, avec une percée très importante dans le secteur public l’an dernier. Nous avons enregistré au 2nd trimestre, une augmentation assez significative de nos ventes. Le risque causé par la pandémie pourra être aussi un catalyseur de ventes pour le 3eme et 4eme trimestre.

Boursier.com : On a beaucoup parlé d’un mariage de Bull avec une autre société … ou que Bull pourrait en racheter une autre … Où est en Bull sur ces réflexions d’opérations de fusions-acquisitions ?

D.L : Pour accélérer la transformation du groupe, un changement de périmètre était envisageable. Nous avons eu des discussions avec certains acteurs mais qui n’ont pas été concrétisées par la suite. La situation de marché, n’est pas vraiment propice à des rapprochements. Aujourd’hui Bull se concentre sur la transformation de son business et sur le lancement de nouvelles offres. Le reste suivra …

Boursier.com : Qu’entendez-vous par le reste … ? Bull qui rachèterait une entité ou bien le contraire ?

D.L. : Tout est possible … Mais un chef d’entreprise et son entreprise doivent se concentrer sur ses clients, sur son business model. Le reste viendra par la suite…

Merci beaucoup.