Le Financial Stability Board (FSB) alerte : la régulation crypto reste fragmentée et incomplète. Un avertissement qui tombe alors que le marché a grossi et que les usages se mondialisent. Tentons de répondre à la question suivante : faut-il craindre un risque systémique mal couvert ?
Ce que dit vraiment le FSB
Le FSB publie donc un examen thématique de la mise en œuvre de son cadre de 2023. Il constate des lacunes et des incohérences persistantes, surtout sur les arrangements de stablecoins. L’appel lancé est limpide : il faut accélérer et harmoniser.
Selon le FSB, si des progrès sont visibles, l’alignement reste incomplet et l’activité offshore a toujours la possibilité de contaminer les systèmes domestiques. Autrement dit, le marché est globalisé, mais les règles demeurent locales. Un terrain qui est donc propice à l’arbitrage.
Par ailleurs, l’IOSCO a publié un examen complémentaire. Ensemble, les deux instances couvrent ainsi plus de 40 juridictions, ce qui renforce la portée de ce diagnostic. La coordination transfrontalière devient par conséquent prioritaire.
Stablecoins : le talon d’Achille
Le FSB vise particulièrement les stablecoins, qui restent le pilier des flux crypto. En effet, il constate que peu de cadres complets sont opérationnels tandis que l’encours continue d’enfler. Il met aussi en avant le risque de “run” et de contagion aux marchés monétaires.
Côté données de marché, la matérialité macro croît, et vite. En effet, le classement des stablecoins par capitalisation montre une base au-delà des 300 Md$ ces jours-ci, selon des agrégateurs de référence.
Uneven implementation of the FSB Global Crypto-Asset Framework creates opportunities for #RegulatoryArbitrage and complicates oversight of the crypto-asset market, which is inherently global and evolving. Our peer review has more: https://t.co/IdgZgErsKF#crypto #stablecoins pic.twitter.com/ieF7sZOf0f
— The FSB (@FinStbBoard) October 16, 2025
En Europe, le débat s’intensifie. Bruxelles presse pour un cadre robuste, assorti d’une transparence des réserves et de plafonds de risques. Ces exigences d’urgence montrent la nervosité des autorités face à l’essor du secteur. Voir à ce sujet notre article sur l’exigence de règles d’urgences pour les stablecoins.
Arbitrage réglementaire : quels risques systémiques ?
Le diagnostic du FSB est sans détour : la fragmentation ouvre la porte à l’arbitrage. Les acteurs agiles optimisent leur domiciliation, échappant ainsi aux mailles trop lâches du filet réglementaire. Et en cas de choc, les effets de réseau démultiplient les pertes.
Au Royaume-Uni, le principe de précaution prévaut. En effet, la Banque d’Angleterre se dirige vers un cadre prudent sur les plafonds applicables aux stablecoins, qu’elle n’assouplira que si l’absence de menace est démontrée.
Le FMI, de son côté, alerte sur le risque de corrections désordonnées en cas de surchauffe financière. Les liens entre établissements bancaires, non-bancaires et crypto peuvent amplifier les chocs. Quoi qu’on en pense, il semble clair que la macro n’offrira pas toujours un filet de sécurité.
Quelles suites possibles pour le G20 ?
Dès lors, on distingue trois chantiers prioritaires à mettre en œuvre ou à achever. Tout d’abord, l’implémentation homogène des recommandations FSB/IOSCO, avec des évaluations périodiques publiques. Ensuite, la supervision des groupes internationaux, pour réduire le “forum shopping”. Enfin, un véritable régime de résolution pour les émetteurs systémiques.
Cependant, l’urgence reste opérationnelle : données, disclosures et tests de liquidité chez les émetteurs de stablecoins, y compris sur les réserves souveraines. Last but not least, la cohérence des signaux G20 conditionnera la stabilité des prochains cycles.
Sources
- Reuters — G20 risk watchdog warns of ‘significant gaps’ in global crypto rules
- FSB — Press release: Significant gaps and inconsistencies in implementation
- IOSCO — News & reports on crypto/digital assets