La pression fiscale est un indicateur mesurant le poids des prélèvements obligatoires (impôts, taxes, cotisations sociales) sur le produit intérieur brut (PIB) d’un pays. Elle permet de comparer le niveau de fiscalité entre les pays et d’évaluer son évolution dans le temps.
La France, « championne d’Europe » en 2017
La France est connue pour avoir la pression fiscale la plus élevée au monde, notamment au sein de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) et de l’Union européenne. Selon les données de l’OCDE, la France affichait un taux de prélèvements obligatoires de 45,1 % du PIB en 2017, le plus haut parmi les 37 pays membres, le « record d’Europe » selon l’INSEE, les entreprises et les ménages ayant payé à l’Etat, aux collectivités locales et aux organismes de Sécurité sociale 1 038 milliards d’euros en 2017. La moyenne de l’OCDE était de 34,3 % et celle de l’UE à 27 de 40,2 %. La fiscalité a représenté en 2017, pour la TVA 160 milliards d’euros collectés, tandis que la CSG-CRDS, a permis à l’Etat de collecter 107 milliards d’euros la même année, là où la fiscalité directe des collectivités locales a atteint 90,7 milliards d’euros, soit en augmentation de plus de 21% sur les six dernières années.
Quant aux « impôts de production », CVAE, CFE, C3S, IFER, ils ont grevé lourdement et de plus en plus la production de services et de biens, et par conséquent la « compétitivité » des entreprises, car en constante augmentation depuis dix ans (20%).
Une (légère) amélioration (contrariée) depuis 2017
Mais depuis 2017, le gouvernement d’Emmanuel Macron a engagé une baisse du taux de prélèvements obligatoires, avec en particulier la réforme de la taxe d’habitation, la suppression progressive de l’ISF (impôt sur la fortune) – remplacé par l’IFI (impôt sur la fortune immobilière) – avec la transformation du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) en baisse pérenne de charges sociales, la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS) ou encore la suppression de la taxe sur les salaires.
Ces mesures ont permis de réduire le taux de prélèvements obligatoires à 44,3 % du PIB en 2021, soit une baisse cumulée de 0,8 point depuis 2017. Toutefois, cette baisse reste modeste au regard du niveau élevé de départ et des baisses plus importantes réalisées par d’autres pays européens à l’instar de l’Allemagne ou du Royaume-Uni.
Cependant la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 (le fameux « quoi qu’il en coûte » du gouvernement) a eu un impact majeur sur les finances publiques françaises, en entraînant une chute du PIB de 8 % en 2020 et une reprise incomplète en 2021 (+ 6 %), en augmentant mécaniquement le ratio des prélèvements obligatoires sur le PIB. Par ailleurs, elle a nécessité des dépenses publiques exceptionnelles pour soutenir l’économie et les secteurs les plus touchés par les restrictions sanitaires, le confinement de la population, les fermetures de certains commerces et établissements (plan de relance, activité partielle, fonds de solidarité, etc.), ce qui a creusé le déficit public à 9,2 % du PIB en 2020 et à 8,4 % en 2021.
La « quadrature du cercle » pour le gouvernement
Face à cette situation, le gouvernement a choisi de ne pas augmenter les impôts pour ne pas pénaliser la reprise économique et pour préserver le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité des entreprises. Il a également bénéficié d’un contexte favorable sur les marchés financiers, avec des taux d’intérêt très bas et durablement, ce qui a limité le coût de la dette publique.
Malgré tout le gouvernement avait prévu une hausse du taux de prélèvements obligatoires en 2022, à 45,2 % du PIB, soit un niveau supérieur à celui de 2017, cette hausse étant due principalement à un effet conjoncturel : le rebond du PIB en 2021 (+ 6%) et en 2022 (+ 4 %) ayant entraîné une augmentation proportionnelle des recettes fiscales et sociales, qui sont plus élastiques à la croissance que les dépenses publiques. Or le taux définitif (source : INSEE) des prélèvements obligatoires pour 2022 en France a été de 45,4 % du PIB.
Parmi les mesures prises par le gouvernement pour « limiter la casse », on citera (en particulier) la poursuite de la baisse du taux de l’IS (impôt sur les sociétés) à 25 % pour toutes les entreprises, la suppression de la majoration de la taxe sur les véhicules de sociétés (TVS) pour les véhicules électriques, la réduction du taux de TVA sur certains produits dont les tests de dépistage du Covid-19, la baisse des cotisations sociales des travailleurs indépendants ou encore la création d’un crédit d’impôt pour les dons aux associations.
Des perspectives en demi-teinte pour le « bilan » 2023
En 2023, le gouvernement a misé sur une légère baisse du taux de prélèvements obligatoires, à 44,7 % du PIB, grâce à la poursuite de la croissance économique et à l’absence de nouvelles mesures fiscales. Cependant il convient de rester prudent par rapport à cette prévision en raison de nombreuses incertitudes, liées (entre autres) à l’évolution de la situation sanitaire, à l’inflation, à la politique monétaire de la Banque centrale européenne, aux négociations internationales sur la fiscalité des multinationales, ou encore au contexte international (conflits en Ukraine ; Israël/ Palestine) ainsi qu’au nombreux bouleversements climatiques et leurs impacts sur l’économie, française et mondiale.
De plus on peut craindre un alourdissement plus important encore de la « fiscalité directe locale » en 2023 et 2024 (elle avait rapporté plus de 90 milliards d’euros en 2017), en parallèle à la suppression de la taxe d’habitation, par l’anticipation des communes, obligées de compenser ces baisses de ressources par des hausses conséquentes des taux d’imposition sur les taxes foncières notamment, sur la taxe d’habitation des redevables qui y restent assujettis (ce qui a un « effet dépresseur » sur le marché de l’immobilier), ou par la suppression de certains abattements.
On s’attend donc plutôt à ce que le taux de prélèvements obligatoires français pour 2023 batte un nouveau « record », ce qui a fait dire à une certaine presse que, paradoxalement, « plus les impôts diminuent, plus les prélèvements obligatoires s’envolent ! ».
Conclusion
La pression fiscale en France reste encore très forte depuis 2017 (« année record ») et jusqu’en 2023, malgré les baisses d’impôts décidées par le gouvernement. Elle dépasse largement la moyenne européenne et celle de pays comparables. Elle est très volatile, en raison de l’impact de la crise sanitaire et des fluctuations de la croissance, et elle reste un enjeu majeur pour les Finances publiques et pour la compétitivité de l’économie française, les prélèvements obligatoires en France ayant indubitablement atteint leur limite.
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