Les lecteurs s’en douteront bien évidemment, il ne s’agit nullement du « Carrousel » du Louvre, pas plus que du « Carrousel du Cadre Noir de Saumur », ou de toute autre manifestation ainsi nommée !
Le « carrousel » est en fiscalité un mécanisme parfois complexe et totalement illégal d’échapper à l’impôt, en particulier à la TVA. Qu’est-ce, exactement ? Quels en sont les procédés ? Le carrousel est-il une spécialité franco-française, ou bien au contraire, existe-t-il aussi dans d’autres pays ? Quelles en sont les sanctions ?
Le carrousel, un mécanisme complexe
La fraude fiscale de type « carrousel » est un mécanisme complexe et illégal utilisé pour échapper à l’impôt, en particulier à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
La fraude carrousel est une fraude à la TVA qui implique plusieurs entreprises situées dans différents pays de l’Union européenne. Le but est de récupérer indûment des remboursements de TVA ou de réduire le montant de la TVA à payer. Le mécanisme repose sur des transactions intracommunautaires, c’est-à-dire des échanges de biens entre entreprises situées dans différents États membres de l’UE.
Comment fonctionne le carrousel ?
Le carrousel procède des actions suivantes.
Création de sociétés éphémères : des sociétés fictives ou éphémères, souvent appelées « sociétés taxis », sont créées dans différents pays. Ces sociétés n’ont généralement pas de réelle activité économique et disparaissent rapidement après avoir accompli leur rôle dans la fraude.
Transactions intracommunautaires : une société A dans un pays de l’UE vend des biens hors taxe à une société B dans un autre pays de l’UE. La société B revend ces biens à une société C dans le même pays, en facturant la TVA (cf : article 272,3 du code général des impôts ; décisions de la CJUE des 6 juillet 2006, 18 décembre 2014 et du 7 décembre 2010 n° 285/ 09).
Non-paiement de la TVA : la société B, qui est fictive, ne reverse jamais la TVA collectée à l’État et disparaît rapidement. La société C, quant à elle, demande le remboursement de la TVA qu’elle a payée à la société B.
Répétition du cycle : les biens peuvent être revendus plusieurs fois entre différentes sociétés, et parfois même revenir à leur point de départ, d’où le nom de « carrousel ».
Des exemples de carrousels
En France
– Affaire des quotas de carbone (2008-2009) : cette fraude a impliqué plusieurs entreprises françaises et européennes qui ont échangé des quotas de carbone de manière fictive pour récupérer indûment des remboursements de TVA. Le préjudice pour l’État français a été estimé à environ 1,6 milliard d’euros.
A l’international
– Royaume-Uni (2016) : une fraude carrousel impliquant des téléphones portables et des composants électroniques a été découverte. Les fraudeurs ont utilisé des sociétés fictives pour échanger des biens entre le Royaume-Uni et d’autres pays de l’UE, causant un préjudice de 300 millions de livres sterling.
– Allemagne (2019) : une fraude carrousel dans le secteur des métaux précieux a été découverte. Les fraudeurs ont utilisé des sociétés fictives pour échanger de l’or et de l’argent entre l’Allemagne et d’autres pays de l’UE, causant un préjudice de 100 millions d’euros.
Le procédé du carrousel, pour éluder l’impôt, existe aussi ailleurs qu’en France
La fraude carrousel n’est pas limitée à la France. Elle existe dans de nombreux pays de l’Union européenne en raison des facilités offertes par le marché unique européen et les transactions intracommunautaires. Les pays les plus touchés sont ceux où les taux de TVA sont élevés et où les contrôles fiscaux sont moins rigoureux.
Des sanctions, variables selon les pays
En France
Les sanctions pour fraude carrousel y sont sévères. Elles incluent :
– des sanctions fiscales : les entreprises impliquées peuvent être soumises à des redressements fiscaux, avec des pénalités pouvant aller jusqu’à 80 % des montants fraudés. Les entreprises impliquées dans un circuit frauduleux de fraude à la TVA intracommunautaire (de type carrousel) peuvent se voir contesté et repris leur droit à déduction de la TVA acquittée, cependant : aussi bien le Conseil d’Etat que la CJUE conditionnent cette remise en cause du droit à déduction de la TVA concernée, à l’établissement de la preuve concrète et patente par l’administration fiscale que les entreprises impliquées ne pouvaient manifestement pas ignorer qu’elles participaient sciemment à un circuit de fraude à la TVA. A défaut de pouvoir administrer une telle preuve, les contrevenants sont réputés avoir agi à leur insu, et ils conservent tous leurs droits à déduction.
– Des sanctions pénales : les responsables peuvent être poursuivis pour fraude fiscale, avec des peines de prison pouvant aller jusqu’à 7 ans et des amendes pouvant atteindre 2 millions d’euros.
A l’international
Les sanctions varient d’un pays à l’autre, mais elles sont généralement sévères :
– Au Royaume-Uni : les fraudeurs peuvent être condamnés à des peines de prison allant jusqu’à 10 ans et à des amendes illimitées.
– En Allemagne : les sanctions incluent des peines de prison pouvant aller jusqu’à 10 ans et des amendes proportionnelles aux montants fraudés.
Conclusion
La fraude au carrousel est un mécanisme complexe et sophistiqué qui cause des pertes importantes pour les États. Les autorités fiscales de l’UE collaborent étroitement pour détecter et sanctionner ces fraudes, mais les fraudeurs continuent de trouver de nouvelles méthodes pour contourner les contrôles. Les sanctions sont sévères, tant en France qu’à l’étranger, pour dissuader les entreprises et les individus de participer à de telles activités illégales.
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