Les contrôles fiscaux sont des vérifications effectuées par l’administration fiscale afin de s’assurer de la véracité et de l’exactitude des déclarations de revenus et de patrimoine des contribuables. Ils peuvent être réalisés « du bureau », sur place ou à distance, et peuvent aboutir à la mise en recouvrement de droits et pénalités supplémentaires, voire à des poursuites pénales en cas d’infractions graves.
Pour quelles finalités ?
Ces contrôles répondent en principe aux trois finalités suivantes :
- dissuasive afin, par des exemples de condamnations, de pousser les citoyens-contribuables au « civisme fiscal » ;
- répressive en condamnant les fraudeurs à des sanctions administratives (amendes) ou pénales (peines d’emprisonnement, et fortes amendes) ;
- budgétaire en récupérant dans l’escarcelle de l’Etat, l’impôt éludé.
Ces contrôles fiscaux, quels sont-ils ?
Ils sont dans leur plus grand nombre effectués « du bureau », autrement appelés « contrôles sur pièces ». Ainsi environ un million de ces contrôles sont chaque année exerçés sur les déclarations des ménages, contre environ trois cent mille sur celles des entreprises.
En comparaison, les services de la Direction générale des Finances publiques, qui compte plus ou moins dix mille agents affectés à tous ces contrôles fiscaux, toutes formes confondues, affectent environ six mille de ces agents à ces « contrôles du bureau », les autres étant des « vérificateurs » répartis entre les « vérifications de comptabilité » des entreprises, et les « vérifications personnelles » (ESFP), ces quatre mille agents spécialisés représentant en résultats bon an mal an plus ou moins 48 000 vérifications.
Comme on peut le voir, ce sont les « contrôles sur pièces » (ou « du bureau ») qui de loin, couvrent le plus large spectre d’examens des déclarations de contribuables, qui sont « repérés » à des « indices » concordant, d’une part à partir du rapprochement de leurs déclarations des revenus avec la multitude d’informations que reçoit de tiers automatiquement chaque année, l’administration fiscale, de même que par l’exercice de son droit de communication, et d’autre part, par une coopération de plus en plus grande avec d’autres administrations (douanes ; urssaf ; etc) ;
les déclarations devant donner lieu à « demande de renseignement », ou directement à « proposition de rectification » sont également repérées par anomalies relevées entre le « train de vie » supposé de certains contribuables eu égard aux revenus qu’ils ont déclarés, et leur « train de vie » réel ou en tout cas supposé tel, par des « recoupements » les plus divers (articles de presse, photos, montrant par exemple un contribuable censé déclarer un salaire équivalant au SMIC, paradant sur un terrain de golf en compagnie de personnes connues comme ayant un niveau de vie nettement supérieur ;
ou encore – autre exemple – un contribuable dans la même situation déclarative, surpris à plusieurs reprises au volant d’une voiture sportive de marque, ou bien encore pilotant un bateau de plaisance), par ce que l’on appelle le « datamining », aidé aujourd’hui part l’IA, l’intelligence artificielle.
Des contrôles fiscaux en constante augmentation
La lutte contre la fraude, l’optimisation fiscale, l’évasion fiscale et le blanchiment de fraude fiscale ne cessent de croître, et les récentes intentions de Bercy et du Gouvernement actuel pour 2024 est d’en renforcer encore plus les moyens, en exploitant à fond le « datamining » et les données patrimoniales télédéclarées au cours de l’année 2023 par tous les propriétaires immobiliers.
Par ailleurs, depuis la disparition du « verrou fiscal » de Bercy, les Parquets n’ont plus le monopole des plaintes pour fraude fiscale, et un Procureur Financier dont la compétence est nationale a été institué depuis 2013 pour les dossiers très complexes.
Pour quelle efficacité dissuasive ?
Au regard du rendement net pour l’Etat, des contrôles fiscaux :
le rendement du contrôle fiscal est un indicateur de son efficacité, mesurant le montant des droits et pénalités recouvrés à la suite des vérifications. Cependant, le rendement ne reflète pas nécessairement le niveau réel de la fraude fiscale, car il dépend également du ciblage des contribuables contrôlés, du taux de recouvrement effectif des sommes réclamées et du résultat des contentieux.
Selon les chiffres du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, le rendement du contrôle fiscal, qui atteignait 9 milliards d’euros pour l’année 2018 (effectivement recouvrés, le rendement initial avant dégrèvements ayant été de 14 milliards d’euros), a atteint un niveau record en 2022, avec 14,6 milliards d’euros mis en recouvrement, soit une augmentation de 8,2% par rapport à l’année précédente, mais à seulement 10,6 milliards d’euros effectivement encaissés par les services de l’Etat.
Cette performance est en partie due au renforcement du ciblage national du contrôle fiscal par l’analyse de données, qui a permis d’engager plus de la moitié des contrôles des entreprises en 2022. Sur les 14,6 milliards d’euros mis en recouvrement, 8,8 milliards proviennent des contrôles sur place et 5,8 milliards des contrôles sur pièces.
Au regard du taux de pénalisation suite aux contrôles fiscaux :
le taux de condamnation à de la prison ferme ou au paiement d’amendes est un autre indicateur de l’efficacité dissuasive du contrôle fiscal. Il mesure le nombre de poursuites pénales engagées par l’administration fiscale et leur résultat devant les tribunaux. Selon le rapport annuel du Comité national de lutte contre la fraude, le nombre de saisines du procureur par le fisc a augmenté régulièrement ces dernières années, passant de 900 en 2018 à 1 484 en 2020 et à 1 770 en 2022.
Le taux moyen de condamnation est également en hausse significative, atteignant 87% en 2020 (pour rappel il n’était que de 20% en 2018). Cependant, le nombre de peines d’emprisonnement ferme prononcées est en baisse, passant de 113 en 2019 à 87 en 2020 (180 en 2018). Il faut néanmoins souligner que ces données ne reflètent que les affaires ayant abouti à un jugement définitif.
Au regard du taux de dégrèvements, suite aux contrôles fiscaux :
les réclamations contentieuses et les dégrèvements d’impôts accordés aux contribuables contestataires sont un indicateur de la qualité du contrôle fiscal et du respect des droits des contribuables. Selon le rapport annuel de la Médiation du Crédit aux Entreprises, le nombre de réclamations contentieuses a diminué de 8% entre 2019 et 2020, passant de 213 000 à 196 000, alors qu’il atteignait presque 33% pour l’année 2018.
Le montant des dégrèvements accordés a également baissé de 13%, passant de 2,4 milliards d’euros à 2,1 milliards d’euros. Le rapport attribue cette baisse à la crise sanitaire, qui a entraîné une diminution des contrôles fiscaux et des recours des contribuables. Le rapport précise que le taux moyen de dégrèvement est de 11%, ce qui témoigne d’un niveau élevé de qualité du contrôle fiscal.
Un « effet dissuasif » pas très évident
L’une des trois « finalités » des contrôles fiscaux, la « dissuasion », n’atteint pas vraiment son but, bien que des progrès aient été enregistrés depuis 2018, d’abord parce qu’ il ne peut y avoir d’effet « dissuasif » que si le
« rendement » de ces contrôles, tel que se traduisant par des « espèces sonnantes et trébuchantes » tombant dans l’escarcelle de l’Etat est, sinon « exponentiel », au moins et à défaut « constant », ce qui est loin d’être toujours le cas, et alors que davantage de moyens sont sans cesse alloués à cette lutte contre la « fraude fiscale », et ensuite parce que les contrôles fiscaux, entendus comme « armes de dissuasion », ne peuvent atteindre leurs objectifs, que lorsque proportionnellement à tous les contrôles entrepris chaque année (cf en introduction), il ne ressort qu’un faible pourcentage de condamnations à de la prison ferme et de fortes amendes !
Conclusion
On constate donc que le contrôle fiscal en France a été renforcé entre 2018 et 2023, tant sur le plan du ciblage que de la sanction des fraudes, et que les résultats obtenus en termes de rendement, de condamnation et de dégrèvement témoignent d’une efficacité réelle du dispositif, mais aussi de ses limites.
En effet, le contrôle fiscal ne peut pas à lui tout seul dissuader tous les comportements frauduleux, qui relèvent aussi d’une question d’éducation, d’éthique et de civisme. Il convient donc d’agir également sur le plan de la prévention, de l’éducation et de la coopération internationale pour renforcer l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale.
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