Faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’État est plus que jamais la priorité des priorités pour le gouvernement, après la sévère mise en garde récente de la Cour des comptes sur la dégradation des finances publiques de la France, et la dégradation de sa note par les agences de notation et en particulier par Standard & Poor’s. Dans ce contexte, le contrôle fiscal trouve plus que jamais sa place et son utilité, boosté à l’intelligence artificielle, ce qui lui permet de traquer de manière de plus en plus précise et fine les fraudeurs.
Un grand nombre d’éléments ou de situations sont susceptibles d’attirer l’attention des inspecteurs des Finances publiques en France, et de déclencher ainsi un contrôle fiscal pour les contribuables pris en faute.
Des variations de revenus suspectes
Les entreprises avec des variations importantes de chiffre d’affaires d’une année à l’autre risquent d’être examinées de près, tout comme pour les particuliers. Pour ces derniers, les mouvements patrimoniaux sont comparés aux revenus déclarés.
Un compte bancaire à l’étranger non déclaré
La détention d’un compte bancaire à l’étranger doit être déclarée chaque année. Le non-respect de cette obligation peut entraîner un contrôle fiscal.
Fausse domiciliation fiscale à l’étranger
La règle (article 4 B du Code général des impôts – CGI) est claire : pour être considéré comme résident fiscal à l’étranger, il faut passer 183 jours par an hors de France, ne pas exercer une activité professionnelle dans l’Hexagone (sauf à prouver que celle-ci est accessoire) et ne pas y avoir le « centre de ses intérêts économiques ».
Les limiers des services déconcentrés de contrôle de Bercy, quand ils ont des soupçons sur la domiciliation réelle d’un contribuable, scrutent le moindre indice à leur disposition, par exemple l’endroit où la personne a scolarisé ses enfants mineurs, ou celui où elle a ouvert un compte bancaire, où elle a utilisé sa carte bancaire pour régler ses achats, sachant que depuis plusieurs années déjà, les échanges d’informations entre États sont très nombreux et automatiques.
Les contrôleurs des Finances publiques utilisent aussi de plus en plus les données en accès libre figurant sur les réseaux sociaux, et des indices précieux prouvant qu’un contribuable qui s’est domicilié à l’étranger, est fréquemment vu en photos en boîtes de nuit à Paris, ou encore au volant d’une voiture de sport dans une région française – le Midi par exemple – passe en fait la majorité de son temps dans l’Hexagone et qu’il lui revient donc d’y régler ses impôts plutôt qu’au Luxembourg, au Lichtenstein, en Suisse ou encore en Belgique ! Les inspecteurs du Fisc peuvent en outre facilement obtenir à une adresse donnée, les consommations d’électricité relevées par les services d’EDF/ Enedis ou autre, idem pour les consommations d’eau et de téléphone !
Résidence insuffisamment « principale »
C’est un peu le corollaire du paragraphe précédent !
Le « faux démembrement de propriété », qui peut de transformer par une « donation » pure et simple !
La pratique est courante : les parents, pour anticiper la transmission de leur patrimoine, donnent la nue-propriété de leurs biens immobiliers à leurs enfants mais conservent l’usufruit. Au décès des parents, les enfants deviennent alors pleinement propriétaires. Mais attention : pour cela les enfants ne doivent pas habiter le bien démembré du vivant de leurs parents, sauf s’il est pourvu à la signature d’un bail de location et au paiement réel d’un loyer, de surcroît, qui soit considéré comme « normale » ! A défaut, l’administration considère que le contribuable n’a pas donné que la nue-propriété, mais en réalité la totalité du bien, et qu’il s’agit en conséquence d’une « donation déguisée », redressement en droits et pénalités à la clef !
Train de vie incohérent
Les agents des impôts lisent également la presse, y compris parfois la presse régionale ! Certains signes extérieurs de richesses peuvent attirer leur attention. La première chose que regardent les agents des impôts est la cohérence de la « balance de trésorerie du foyer », et toute distorsion entre le niveau de vie du contribuable et les revenus qu’il déclare débouche sur un contrôle fiscal personnel approfondi ; si le cas échéant, l’activité du contribuable dissimule une activité occulte, il est redressé à la fois au niveau de son entreprise non déclarée, et à titre personnel (dirigeant ; gérant associé ; entreprise individuelle etc). Environ 30% des contrôles résultent de l’identification d’un manque de cohérence entre le niveau de vie et les revenus déclarés.
Négligences dans les déclarations personnelles et (ou) professionnelles
Les entreprises qui négligent leurs obligations déclaratives, délibérément ou non, attirent l’attention du fisc, tout comme les particuliers d’ailleurs, ce qui paraît une évidence.
Chiffre d’affaires inadapté au secteur d’activité
Un chiffre d’affaires disproportionné par rapport au secteur d’activité peut susciter des interrogations, et de là, à des investigations plus poussées pouvant révéler d’autres anomalies ou manquements, à l’origine de contrôles et redressements !
Différences entre les éléments déclarés et les informations de l’administration fiscale
Tout écart entre les déclarations et les données dont dispose l’administration fiscale peut entraîner – a minima une demande de renseignements – et sinon, un contrôle fiscal !
Niches fiscales personnelles et professionnelles
L’utilisation abusive de niches fiscales est souvent un domaine étudié de près !
Directives administratives internes
Les inspecteurs se basent sur des directives internes pour cibler certains contribuables. Il existe en effet ce que l’on appelle les « dossiers sensibles », ou « à risques », en fonction de différents critères établis par la Direction du Contrôle fiscal en coordination avec les Directions Nationales et les Echelons régionaux et départementaux du contrôle fiscal. Ces dossiers-là sont prioritairement examiné de près.
Pension alimentaire injustifiée
De nombreux parents aident encore leurs enfants, même devenus de jeunes adultes, en leur octroyant de l’argent. Cependant au regard de la loi fiscale, le versement d’une pension alimentaire n’est déductible des revenus de celui qui la verse que si l’enfant est en état de nécessité. Or à partir du moment où l’enfant perçoit l’équivalent d’un SMIC mensuel, le Fisc estime que les sommes qui lui sont versées excèdent ses besoins essentiels, et il engage alors un contrôle, aboutissant généralement à la réintégration au revenu imposable de la partie versante, de la pension alimentaire déduite à tort, pénalités en plus !
Location meublée en SCI
Certains particuliers l’oublient un peu vite et décident du jour au lendemain de louer leur bien en meublé, sans autres formalités, là où ils auraient dû changer le régime fiscal de la SCI et la soumettre à l’impôt sur les sociétés. Il est souvent trop tard lorsqu’ils s’aperçoivent de leur erreur : le Fisc a déjà frappé !
Train de vie incohérent avec les déclarations de revenus
Un niveau de vie disproportionné par rapport aux revenus déclarés et (ou) par rapport aux informations dont le Fisc a eu connaissance de la part de tiers, peut éveiller ses soupçons et enclencher la mécanique du contrôle !
Contrôle fiscal d’un partenaire de l’entreprise et délation
Les partenaires d’une entreprise peuvent être contrôlés, et la délation, relativement pratiquée et prise en compte par les agents du Fisc, peuvent également déclencher des vérifications. A noter le rôle croissant des « aviseurs fiscaux » (ou lanceurs d’alerte) dans les contrôles fiscaux !
Sous-évaluation à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI)
Une sous-évaluation des biens immobiliers, volontaire ou involontaire, car en ce domaine assez complexe, une juste évaluation de ses biens immobiliers ne relève pas d’une « science exacte », peut entraîner un contrôle fiscal.
Investissements Pinel
Les investissements dans le dispositif Pinel et leurs pièges sont scrutés par l’administration fiscale. Un déclassement de la zone où se situe le bien acheté juste avant son rachat par un contribuable, et qui n’en a pas connaissance, peut lui valoir par exemple de louer ensuite ce bien au-dessus du plafond autorisé, et donc un redressement d’impôts, avec la reprise de son avantage Pinel, pénalités en plus !
Piscine, ou (et) abri de jardin > 5 M² non-déclarés
Les contribuables fautifs ont peu de chance d’échapper à la vigilance du dispositif « Foncier Innovant », mis en place par l’administration fiscale, expérience lancée en octobre 2021 dans les Alpes-Maritimes, le Var, les Bouches-du-Rhône, l’Ardèche, le Rhône, la Haute-Savoie, le Morbihan, le Maine-et-Loire et la Vendée et qui a permis d’identifier plusieurs dizaines de milliers de piscines non déclarées !
Le dispositif « Foncier innovant » utilise des technologies novatrices en matière d’intelligence artificielle (IA) visant à optimiser la détection des constructions ou aménagements non déclarés. Pour ce faire, la Direction générale des Finances publiques (DGPIP) a travaillé sur le projet avec des partenaires privés comme Google ou Cap Gemini, et les algorithmes utilisés fonctionnent sur la base des images aériennes publiques de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), consultables par tous sur le site www.geoportail.gouv.fr.
Grâce à l’intelligence artificielle, ces algorithmes ont appris à détecter correctement les piscines, permettant à l’administration de faire le lien avec le plan cadastral, et les données d’urbanisme afin de voir si la piscine est identifiée dans ses bases, et il en est de même à présent de certains abris de jardin, et de certaines vérandas. À défaut, il y a taxation du bien considéré. Outre la taxe foncière de l’année en cours, les propriétaires doivent s’acquitter des impositions antérieures, la cotisation de taxe foncière pouvant être multipliée jusqu’à quatre fois en fonction de la date de construction de la piscine, de l’abri de jardin, de la véranda, ou de l’année d’acquisition du bien (c’est ce que l’on appelle l’émission d’un « rôle particulier d’imposition »).
Prêts familiaux non déclarés
Les prêts familiaux non déclarés peuvent susciter des vérifications, et être requalifiés par l’administration fiscale en « donations », avec toutes les conséquences en droits et pénalités que cela implique, d’où la nécessité de grande prudence en cas de « prêts familiaux », de remplir les formulaires adéquats, de conserver tous les éléments de preuves.
Conclusion
Tous ces facteurs ou situations ne garantissent pas systématiquement un contrôle fiscal, ni même un redressement, mais ils attirent en tout cas à coup sûr l’attention des inspecteurs des Finances publiques chargés des contrôles !
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