Le bras-de-fer budgétaire en cours à Washington déclenche un choc d’incertitude politique. Pour les marchés crypto, une question critique se pose : cela va-t-il enclencher un catalyseur haussier, ou provoquer un frein durable si le blocage s’éternise ?
Trois canaux de transmission : dollar, taux, données macro
Premièrement, la suspension de nombreuses publications officielles plonge la Fed dans un brouillard statistique inhabituel. En effet, le Bureau of Labor Statistics (BLS), le Bureau of Economic Analysis (BEA) et le U.S. Census Bureau (Census) interrompent leurs rapports jusqu’au rétablissement des crédits. Une panne d’indicateurs qui accroît inévitablement la prime de risque.
Deuxièmement, un épisode de recherche de duration peut pousser les taux longs à la baisse, et desserrer mécaniquement les conditions financières. Et si un reflux devait s’opérer, il dépendrait des signaux d’inflation résiduels et des flux de réallocation.
Troisièmement, l’activité publique ralentit au rythme des plans d’arrêt, comme le décrit le mémorandum M-25-35 de l’OMB. Dès lors, la liquidité de marché alterne entre “macro muette” et surprises idiosyncratiques, souvent suivies de mouvements techniques brusques.
US government shutdown would halt September jobs report, other data https://t.co/hDNHR71Xuv https://t.co/hDNHR71Xuv
— Reuters (@Reuters) September 30, 2025
Court terme : squeeze haussier, carnets plus nerveux
Dès le début du shutdown, les shorts ont été pris de vitesse sur Bitcoin et les grandes capitalisations. Les desks suivent une trajectoire relativement classique : ventes forcées, spreads qui s’écartent, puis normalisation partielle. Les relevés de liquidations à 24 h visibles sur CoinGlass cadrent avec ce schéma, tandis que l’appétit pour le levier reste erratique.
Dans ce contexte, les données privées prennent le relais des statistiques officielles. L’exemple ADP illustre ce glissement temporaire de thermomètre, et la sensibilité accrue des marchés aux surprises. Par ricochet, les actifs risqués réagissent encore plus vite aux inflexions de taux implicites.
Scénarios pour les semaines à venir
Scénario 1 (shutdown bref) : détente du dollar et reflux des rendements. Historiquement, cette combinaison a soutenu une jambe haussière sur BTC et les capitalisations majeures, surtout si l’actualité crypto-native reste constructive. Et en général, la saisonnalité d’octobre à tendance à amplifier le mouvement.
Scénario 2 (shutdown prolongé) : la Fed navigue à vue faute de données publiques, et la prime de risque se retend. Dans ce cas de figure, un rallye obligataire plus prononcé amortirait la casse côté crypto, maintenant un range de consolidation plutôt que des cassures baissières.
Scénario 3 (détérioration réelle) : si l’arrêt des services publics vient peser lourdement sur la demande et la confiance, la volatilité risque d’exploser. Dans ce cas, BTC aurait des chances de conserver son statut de baromètre macro, tandis que les altcoins à faible profondeur deviendraient bien plus sensibles aux chocs de flux.
Quid des catalyseurs crypto-natifs ?
Cette année plus encore, l’impact du shutdown ne s’exerce pas en vase clos. Il module d’autres narratifs, qu’il s’agisse des flux ETF, de l’adoption on-chain, ou encore des épisodes de deleveraging. Pour un zoom sur BTC, relire notre décryptage sur l’effet combiné du shutdown et des ETF sur le rois des cryptos.
À plus long terme, la question fondamentale reste la trajectoire de croissance sous contraintes budgétaires. En cas de ralentissement prolongé relayé par des sources privées, la dépendance aux signaux de marché deviendra cruciale pour calibrer les risques. Les investisseurs crypto devront donc rester disciplinés sur leur exposition aux effets de levier.
Sources
- Reuters – How the US government shutdown affects economic data publishing
- OMB – Memorandum M-25-35: Status of Agency Operations
- Reuters