La fraude fiscale est un fléau qui prive l’État de ressources essentielles pour financer les services publics et la transition écologique. Selon le syndicat Solidaires Finances Publiques, elle représenterait entre 80 et 100 milliards d’euros par an (bien que difficile par essence de la chiffrer avec précision), soit plus que le déficit public.
Dans les partis d’opposition et suite à ce constat, la NUPES, le nouveau parti de gauche qui a émergé lors des élections législatives de 2022, a présenté mardi 19 septembre, par la voix de cinq députés issus des quatre groupes politiques qui composent la coalition de gauche lors d’une conférence de presse un “contre-projet” ambitieux au plan gouvernemental pour lutter contre l’évasion fiscale et les fraudes.
Comportant 47 mesures, ce plan qui synthétise le travail d’ONG, de chercheurs, d’économistes et de parlementaires de gauche depuis plusieurs années, vise à renforcer les moyens de contrôle et de sanction, à rétablir la justice fiscale et à harmoniser les règles au niveau européen et international. Ses propositions les plus significatives sont les suivantes.
Supprimer de niches fiscales injustes et inefficaces
Parmi les 465 niches fiscales qui existent, le crédit impôt recherche est visé par le plan NUPES, et sur les 82 niches fiscales créées depuis 2018, 44 ne sont pas bornées dans le temps, en contravention avec la Loi de programmation des Finances publiques de 2018.
Elles coûtent (selon la NUPES) près de 100 milliards d’euros par an à l’État et elles profitent surtout aux plus riches et aux grandes entreprises. Ce parti d’opposition propose notamment de supprimer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (le CICE), le crédit d’impôt recherche (le CIR), le régime des sociétés mères-filiales, le régime des impatriés et les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires, ce qui devrait rapporter selon lui au bas mot quelques 54 milliards d’euros à l’Etat.
Imputer les revenus d’une holding à son propriétaire réel pour pouvoir soumettre ses revenus à l’impôt sur le revenu.
Cette mesure viserait à empêcher les stratégies d’optimisation fiscale qui consistent à créer des « sociétés écrans » pour détenir des actifs et percevoir des dividendes sans payer d’impôt. Elle estime que cette mesure permettrait de récupérer 10 milliards d’euros par an.
Instaurer un impôt universel sur les sociétés transnationales
Actuellement avec le système dit « mère-fille », certaines sociétés peuvent échapper à l’impôt en France car leurs bénéfices ne sont pas réalisés sur le sol français et elles peuvent déclarer leurs bénéfices dans des pays à la fiscalité plus avantageuse.
Un tel impôt universel obligerait les entreprises à payer l’impôt sur les sociétés correspondant à leur activité en France, quelle que soit la localisation de leur siège et de leurs filiales. Cette mesure s’inspire du projet de taxation unitaire porté par l’ONG Oxfam, qui consiste à calculer le bénéfice mondial d’une entreprise et à le répartir entre les pays où elle opère en fonction de critères objectifs comme le chiffre d’affaires, le nombre d’employés ou les actifs. La NUPES estime que cette mesure permettrait de récupérer 20 milliards d’euros par an.
Augmenter des effectifs
Ces partis de gauche voudraient une augmentation des effectifs dans l’administration fiscale, avec création de 4 000 postes à la direction générale des finances publiques (DGFiP) d’ici à 2027 pour revenir aux effectifs de 2010, considérant que c’est l’administration qui a le plus perdu de postes depuis 20 ans.
Ils veulent aussi doubler le nombre de magistrats du Parquet national financier dédiés à la délinquance financière et économique.
Mettre en place un système de « reporting pays par pays »
Cette opposition souhaite mettre en place un dispositif de « reporting pays par pays » pour contraindre les multinationales à publier les informations clés (chiffre d’affaires, bénéfices, nombre d’employés) sur les impôts qu’elles payent et leurs activités pour chaque pays dans lequel elles opèrent, pour ainsi beaucoup plus de transparence que le système actuellement en vigueur qui contraint les entreprises à un échange « confidentiel » avec l’administration fiscale.
Ce qui différencierait ce plan, du plan gouvernemental actuel
Il s’oppose au plan gouvernemental, présenté en mai 2023, et qui est un plan contre la fraude fiscale axé sur la lutte contre les « ultrariches » et les « multinationales », mais que les syndicats et associations ont jugé insuffisant et inefficace.
Le plan du gouvernement prévoit notamment de renforcer la coopération internationale, de créer un registre public des bénéficiaires effectifs des sociétés, de renforcer les sanctions pénales ou encore de créer un conseil d’évaluation des fraudes.
La NUPES juge son plan plus ambitieux et plus juste, car visant à réduire les inégalités fiscales et à faire contribuer davantage les plus fortunés et les grandes entreprises, espérant en outre par un tel plan rétablir la confiance des citoyens dans l’impôt et dans la puissance publique.
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