Des députés du groupe Les Républicains (LR) ont déposé en décembre 2023 une proposition de loi visant à alléger la fiscalité du patrimoine en appliquant l’inflation aux abattements, exonérations et autres seuils fiscaux. « La fiscalité du patrimoine est celle qui connaît le plus de seuils fixes qui ne sont jamais mis à jour. Cela concerne aussi bien l’assurance vie que les droits de succession, les revenus fonciers, les plus-values ou encore le plafonnement des niches fiscales », dénoncent les députés LR.
Cette proposition vise à corriger l’absence de réévaluation de nombreux seuils fiscaux qui n’ont pas été ajustés depuis leur mise en place, ce qui peut entraîner des effets de seuil préjudiciables aux contribuables, et de tenir donc compte pour ces seuils, de l’inflation intervenue depuis leurs mises en oeuvre. Ils proposent donc de revoir 17 seuils fiscaux afin de préserver le pouvoir d’achat des contribuables et faciliter notamment la transmission du patrimoine.
Les domaines fiscaux visés par cette proposition de loi
Les seuils fiscaux concernés par la proposition de loi englobent différents aspects de la fiscalité, tels que l’assurance-vie, la fiscalité immobilière, les plus-values et le plafonnement des niches fiscales.
Dans le cas de l’assurance-vie, la proposition de loi prévoit notamment de relever le seuil d’abattement pour le prélèvement de 20% sur les capitaux décès, en prenant en compte l’inflation depuis la mise en place de ce dispositif il y a 25 ans. Les députés proposent de relever le premier seuil d’abattement de 152 500 € pour le calcul du prélèvement de 20% dû sur les capitaux décès issus de primes versées avant les 70 ans de l’assuré. Un rattrapage de l’inflation depuis la mise en place de de ce dispositif il y a 25 ans permettrait d’appliquer un abattement beaucoup plus avantageux de 225 000 €.
De même, les abattements annuels de revenus issus de l’assurance vie sur les contrats de plus de huit ans (exonération d’impôt sur le revenu) seraient relevés de 4 600 € à 7 000 € pour une personne seule à et de 9 200 € à 14 000 € pour un couple.
En ce qui concerne la fiscalité immobilière, la proposition de loi suggère de revoir le seuil d’application du régime forfaitaire du microfoncier, ainsi que le seuil d’exonération de taxation sur la plus-value lors de la vente d’un bien immobilier. En matière de fiscalité des revenus immobiliers, il est suggéré de revoir le seuil d’application du régime forfaitaire du microfoncier qui deviendrait applicable lorsque le montant annuel brut des loyers n’excède pas 21 000 € et non plus 15 000 €.
La vente d’un bien immobilier dont la valeur de cession n’excède pas 15 000 € est aujourd’hui exonérée de taxation sur la plus-value. Un seuil que cette proposition de loi propose de mettre à jour à 21 000 €.
Le plafond annuel des niches fiscales serait quant à lui relevé au passage de 10.000 € à 12.000 €.
Quel est l’objectif de cette proposition de loi ?
Son objectif est de corriger une lacune dans le système fiscal français, qui ne tient pas compte de l’évolution de l’inflation lorsqu’il s’agit de seuils fiscaux. Les députés argumentent que la non réévaluation de ces seuils entraîne une perte de pouvoir d’achat pour les contribuables, car les montants initialement fixés il y a des années sont souvent désuets. En revalorisant ces seuils sur la base de l’inflation constatée depuis leur entrée en vigueur, la proposition de loi cherche à maintenir un certain équilibre fiscal et à éviter des situations injustes pour les contribuables.
Il est important de noter que cette proposition de loi vise avant tout à ouvrir le débat sur la nécessité d’ajuster régulièrement les seuils fiscaux en fonction de l’évolution de l’inflation. Les députés LR défendent l’idée qu’une fiscalité juste et équilibrée doit prendre en compte les fluctuations économiques et inflationnistes pour éviter des effets de seuil qui pourraient pénaliser certains contribuables
Quelle « faisabilité » d’une telle proposition de loi ?
Cependant, cette proposition de loi suscite également des interrogations quant à sa faisabilité et à ses implications financières pour l’État. En effet, si elle était adoptée, elle aurait un impact sur les recettes fiscales en réduisant le nombre de contribuables assujettis à certains impôts et en diminuant le montant des impôts qu’ils auraient à payer. Les députés LR estiment que cela entraînerait une perte de recettes fiscales entre 2 et 4 milliards d’euros par an pour l’État.
Pour compenser cette perte de recettes, les députés proposent une réduction des dépenses publiques, en particulier celles liées aux prestations sociales qui sont indexées sur l’inflation. Ils affirment que cette réduction des dépenses permettrait de maintenir l’équilibre budgétaire de l’État malgré la perte de recettes fiscales.
Des conséquences budgétaires contestées parce que sous-évaluées
Cependant, cette estimation des impacts financiers de la proposition de loi pourrait être contestée, car elle repose sur des hypothèses optimistes et ne prend pas en compte tous les effets indirects de la mesure. Par conséquent, la faisabilité réelle de cette proposition de loi et son impact sur le budget de l’État restent incertains.
Même si cette proposition de loi ne semble pas avoir une forte chance de connaître une suite législative positive en raison de ses implications budgétaires, elle met en lumière un aspect du système fiscal français qui mériterait certainement d’être examiné et ajusté pour plus de justice fiscale.
Conclusion
En résumé, la proposition de loi déposée par les députés LR et qui vise à revaloriser 17 seuils fiscaux en prenant en compte l’inflation afin de préserver le pouvoir d’achat des contribuables soulève des questions quant à sa faisabilité et à ses implications financières pour l’État si elle devait être votée, au risque de réduire les recettes fiscales de l’État, même si ces pertes seraient compensées (insuffisamment) par des réductions de dépenses publiques. La proposition de loi met en lumière l’importance de réévaluer régulièrement les seuils fiscaux pour maintenir un équilibre fiscal et éviter des situations injustes pour les contribuables, tout en rendant sa mise en œuvre concrète et son impact sur le budget de l’État très incertains.
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