En ce mois, le sujet de la régulation des cryptomonnaies revient à nouveau sur les tables à Moscou. Mais cette fois, la proposition faite prend une forme plus institutionnelle : la création d’une « Banque crypto nationale ». L’idée, avancée par un haut responsable du Kremlin, vise à structurer un secteur longtemps teinté d’ambiguïté au sein de la Russie.
Une initiative pour recentraliser un marché fragmenté
L’idée est née chez Sberbank, poids lourd du système financier russe. Anatoly Pronin, son directeur des solutions alternatives, évoque un rôle de dépositaire national des actifs numériques.
En effet, l’objectif est double. Il s’agit, dans un premier temps, de mettre en place un cadre fiable aux investisseurs russes. Et dans un second, de limiter l’influence croissante des plateformes étrangères.
Les volumes crypto domestiques ont explosé (+51 % au premier trimestre 2025, soit 81,5 milliards de dollars traités), mais l’appétit grandit dans un vide réglementaire dangereux.
Au sein d’un pays où la dépendance aux infrastructures financières occidentales est aujourd’hui un risque stratégique, une telle institution pourrait offrir à la Russie un canal crypto souverain, assorti d’une supervision claire et d’une vigilance accentuée sur les mouvements de capitaux numériques.
Un cadre prudent, mais évolutif
Jusqu’ici, la Banque centrale russe (BCR) maintenait un blocage ferme : pas de crypto comme moyen de paiement et interdiction des transactions entre résidents. Toutefois, le pragmatisme semble gagner du terrain.
Depuis mars 2025, l’institution propose un régime expérimental de trois ans réservé aux investisseurs qualifiés, appelés ici “super-qualified” ou “très qualifiés”. Pour en faire partie, il faut disposer d’au moins 100 millions de roubles en actifs ou gagner 50 millions l’an passé.
Ce dispositif ambitieux est accompagné par le ministère des Finances, qui planche sur une infrastructure nationale crypto, le tout encadré, contrôlé, mais évolutif.
À terme, cette Banque Nationale pourrait être le pivot de la supervision crypto en Russie, en lien étroit avec le futur rouble numérique prévu pour septembre 2026.
Une réponse aux pressions géopolitiques
Le contexte extérieur n’est jamais loin. Effectivement, les sanctions occidentales incitent la Russie à diversifier ses voies financières. Les cryptomonnaies étaient déjà un canal alternatif pour les échanges internationaux. Mais leur usage sans encadrement est devenu une vulnérabilité.
Une Banque crypto nationale, couplée à des stablecoins liés au rouble, voici une solution susceptible de garantir la manipulation des flux numériques sous supervision. En plus, cela pourra réduire l’exposition aux réseaux opaques et aux plateformes étrangères non fiables.
En gros, créer une Banque crypto nationale, c’est pour la Russie un pari stratégique. L’État assume vouloir gérer, redistribuer et contrôler l’avenir des actifs numériques au sein du pays, dans un cadre qui sécurise le système. L’avenir nous dira si l’idée portera un modèle exportable, notamment parmi les nations du bloc BRICS.
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