Le Canada ne veut plus rester spectateur face à l’essor des stablecoins. Ces jetons numériques adossés à une monnaie traditionnelle et perçus comme une alternative moderne aux paiements bancaires, sont aujourd’hui entourés d’enjeux stratégiques.
La Banque du Canada l’a rappelé avec force : un cadre réglementaire fédéral et provincial cohérent est urgent pour éviter que le pays ne soit distancé par ses concurrents internationaux.
Ron Morrow met la pression
Le 17 septembre 2025, à Ottawa, Ron Morrow, directeur exécutif chargé des paiements et de la supervision à la Banque du Canada, n’a pas mâché ses mots devant les Comptables Professionnels Agréés.
« Même si vous êtes sur la bonne voie, vous risquez de vous faire dépasser si vous restez immobile », a-t-il lancé,
Aussi, souligne-t-il la rapidité avec laquelle les autres grandes économies régulent déjà les stablecoins. Son message est clair. Ces actifs peuvent améliorer les paiements, mais seulement s’ils affichent la même sécurité et la même stabilité qu’un compte bancaire. Sans cela, ils risquent d’ébranler la confiance du public et de créer plus de problèmes qu’ils n’en résolvent.
Pourquoi encadrer les stablecoins ?
Contrairement au Bitcoin ou à l’Ethereum, les stablecoins cherchent à maintenir une valeur fixe, en l’occurrence adossée au dollar canadien. Ce mécanisme les rend attractifs pour les paiements numériques, les transferts internationaux et l’inclusion financière.
Au Canada, l’enjeu est double. D’un côté, les frais de transferts transfrontaliers restent élevés et pénalisent les particuliers comme les entreprises. De l’autre, le pays doit moderniser ses infrastructures de paiement pour suivre le rythme de l’innovation mondiale.
Alors, en intégrant les stablecoins dans son système, le Canada pourrait réduire les coûts, accélérer les transactions et améliorer l’accessibilité. Mais sans un encadrement strict, les risques de crédit, de liquidité ou de cyberattaques demeurent réels.
De la CBDC aux stablecoins : un virage assumé
Il y a quelques années, l’effort de recherche de la Banque du Canada se concentrait sur la création d’une monnaie numérique de banque centrale (CBDC), en collaboration avec le MIT.
Cependant, les perspectives ont changé. L’institution privilégie désormais l’amélioration des systèmes de paiement existants. Les stablecoins sont perçus comme un levier plus pragmatique, capable de renforcer rapidement l’écosystème financier.
Ce choix peint un réalisme assumé : plutôt que d’attendre une solution entièrement publique, pourquoi ne pas tirer parti de la dynamique déjà créée par le secteur privé ?
Un enjeu économique et géopolitique
Au-delà des promesses d’efficacité, la régulation des stablecoins s’avère un outil géopolitique. Chaque pays cherche à attirer les talents, les capitaux ainsi que les entreprises qui façonnent la finance numérique. Avec une telle dynamique, le cadre réglementaire canadien pèsera lourd sur l’avenir économique du pays.
Comme le rappelait Ron Morrow, l’objectif est de bâtir des systèmes de paiement « plus rapides, moins chers, plus transparents et accessibles, mais aussi sûrs et sécurisés ». Un équilibre difficile, mais vital.
Dans les mois qui viennent, l’enjeu sera d’éviter les demi-mesures. Car plus le Canada attend, plus le risque est grand de voir les stablecoins s’imposer sans garde-fous, au détriment de la sécurité et de la souveraineté.
Source : Zonebourse
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