Face à l’essor des stablecoins, les lobbys bancaires américains veulent interdire la rémunération de ces tokens. En effet, ils redoutent qu’un rendement attractif attire l’épargne des ménages hors du système bancaire, fragilisant le financement de l’économie.
Pourquoi les banques sonnent l’alarme
Selon le Financial Times, plusieurs associations du secteur alertent sur un risque d’exode massif des dépôts. Or, un tel mouvement forcerait les banques à relever leurs taux ou à recourir à des financements plus coûteux, avec des effets en chaîne.
Le texte américain en vigueur interdit aux émetteurs bancaires de verser un intérêt sur leurs stablecoins. Toutefois, des plateformes partenaires pourraient offrir des « récompenses » sur des stablecoins tiers, créant un terrain de jeu inégal, selon les lobbys.
Le contexte est explosif : la capitalisation des stablecoins dépasse désormais 290 milliards de dollars. Par conséquent, tout ajustement réglementaire peut rapidement influer sur la liquidité crypto et la concurrence avec les dépôts. Voir l’agrégat sur CoinMarketCap pour l’ampleur du marché.
En pratique, les banques s’inquiètent de voir des fintechs capter la marge d’intérêt des T-Bills logés en réserve derrière les stablecoins. Dès lors, elles plaident pour un resserrement visant aussi les courtiers, exchanges et affiliés.
Par ailleurs, le débat dépasse Wall Street. En effet, la question touche aux règles de concurrence, au périmètre des intermédiaires habilités à rémunérer la monnaie numérique, et au partage de valeur avec les utilisateurs.
Que change vraiment la loi américaine ?
Le cadre dit « GENIUS Act » interdit le paiement d’intérêt par les émetteurs de stablecoins, mais laisse des zones grises pour des programmes de récompenses via des tiers. C’est précisément cette brèche que les banques veulent fermer au Congrès.
I think JPMorgan Chase is confused. Can someone tell them that the 0% interest rule is only for stablecoins, not bank accounts? https://t.co/cXIuWJJMeb pic.twitter.com/oj8b1zC3cC
— Matt Hougan (@Matt_Hougan) August 25, 2025
Les lobbys avancent un risque de fuite des dépôts de plusieurs milliers de milliards si des rendements compétitifs se généralisaient sur les stablecoins. Toutefois, d’autres acteurs y voient une tentative de freiner la concurrence au bénéfice du statu quo.
Le Trésor a récemment sollicité des commentaires publics sur l’application de la loi, signe que le calibrage final des règles reste ouvert. Or, les arbitrages à venir détermineront qui peut verser un rendement, et sous quelles conditions opérationnelles.
Pour les banques, l’objectif est clair : éviter que des circuits non bancaires captent l’épargne grâce aux intérêts générés par les T-Bills de réserve. En effet, ce différentiel pourrait peser sur leurs marges nettes d’intérêt et sur le coût du crédit.
Côté crypto, l’argument est inverse : mieux partager la valeur des réserves avec les porteurs et fluidifier les paiements. Toutefois, les émetteurs devront composer avec des exigences de transparence, de réserves et de supervision prudentielle.
Pour éclairer ce débat, notre analyse récente sur le rôle des stablecoins montre qu’ils renforcent la liquidité des marchés, sans créer de crédit comme les banques. Elle aide à distinguer l’impact financier réel de leur statut monétaire limité.
Enfin, les prochains mois seront décisifs : si le Congrès ferme la brèche sur la rémunération, les programmes de yield devront se réinventer. En revanche, si le statu quo perdure, la concurrence sur l’épargne digitale s’intensifiera.
Sources
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