Le 2 avril 2025, Donald Trump a stupéfait Wall Street en décrétant d’un trait de plume de nouvelles taxes de 19 % sur les équipements high-tech importés de 57 pays d’Asie du Sud-Est. Les importateurs américains d’ASIC, fortement dépendants de ces chaînes, n’ont bénéficié que de sept jours de préavis pour réorganiser leurs flux logistiques.
Pourtant, le bref sursis annoncé le 9 avril n’a pas apaisé les courtiers, qui redoutaient déjà l’entrée en vigueur, ce 7 août, d’un droit cumulé atteignant désormais 21,6 % pour chaque machine transitant par les ports américains.
Une annonce éclair qui a pris les importateurs de court
En effet, la décision a lancé une course contre la montre sans précédent : Luxor Technology a affrété un Boeing 777 entier pour rapatrier 3 000 kg d’ASIC depuis Singapour, le coût du vol bondissant de 1,7 million à 3,5 millions de dollars en une seule nuit. Des concurrents ont surenchéri jusqu’à dix fois les tarifs fret habituels afin de trouver une soute libre, signe d’un marché logistique soudainement saturé.
Les transitaires d’Anchorage à Miami ont même signalé des files de camions s’étirant sur plusieurs kilomètres, chacune cherchant un créneau d’embarquement avant la date fatidique.
https://twitter.com/LuxorTechTeam/status/1953176810583409061
Un coût supplémentaire qui se chiffre déjà en millions
Toutefois, l’affrètement n’est qu’un élément de la facture. Selon Bitbo, le prix moyen d’un ASIC neuf livré aux États-Unis grimpe de 2 600 $ à plus de 3 100 $ dès l’application des droits, tandis que la valeur des modèles d’occasion repart à la hausse, gagnant 15 % sur les places de marché américaines en quarante-huit heures.
Les analystes notent qu’un parc de 10 000 machines – taille courante pour une ferme texane – nécessite désormais un capital supplémentaire dépassant 5 millions de dollars, uniquement pour couvrir la taxe. Parallèlement, le cours du BTC reste volatil, évoluant sous les 70 000 $ depuis plusieurs semaines.
Cette instabilité pousse certains opérateurs à rediriger leurs investissements vers le Canada ou l’Europe du Nord, où l’électricité est souvent moins chère et les taxes inexistantes. D’autres préfèrent l’option durable : un récent projet d’éoliennes dédié au minage démontre que la chasse aux coûts passe aussi par l’énergie renouvelable, laquelle compense partiellement la facture douanière.
Quelles stratégies pour rester compétitif ?
Néanmoins, plusieurs pistes émergent. D’une part, Luxor et MicroBT étudient la possibilité d’assembler certains modèles directement au Texas ou dans l’Oklahoma, stratégie qui permettrait d’éviter le tarif sur les produits finis tout en profitant d’incitations fiscales locales.
D’autre part, les principaux lobbys de la filière réclament une reclassification : ils affirment que les ASIC sont des ordinateurs spécialisés, et non des « machines-outils électroniques », catégorie frappée de plein fouet par la nouvelle grille tarifaire plus agressive.
Par ailleurs, l’USTR a prolongé jusqu’au 31 août certaines exclusions relevant de la section 301, laissant entrevoir un couloir étroit de négociation pour des exemptions ciblées. Pourtant, rien ne garantit une issue favorable, car la Maison-Blanche martèle vouloir rapatrier les chaînes de valeur stratégiques.
Si aucun compromis n’est trouvé, la rentabilité moyenne d’un mégawatt de puissance de calcul pourrait reculer de 9 % d’ici la fin de l’année, et le centre de gravité du hashrate mondial se déplacer vers des juridictions plus accueillantes.
Sources
Sur le même sujet