À la demande du régulateur financier sud-coréen, la plateforme Bithumb va fermer son marché USDT dédié au partage de carnet d’ordres. Une décision qui relance les inquiétudes sur la place de Tether dans l’écosystème local.
Un service expérimental stoppé net par le régulateur
Le « Tether Market » de Bithumb permettait initialement à ses clients de négocier en USDT du Bitcoin et neuf altcoins majeurs. Un accord de partage de carnet d’ordres avec l’exchange australien Stellar permettait de soutenir le dispositif.
Cependant, suite à une enquête menée sur place par l’unité de renseignement financier coréenne (KoFIU), Bithumb a été contraint d’annoncer la fermeture du marché USDT dès cette semaine. En effet, les autorités s’interrogeaient quant à d’éventuelles failles dans les mécanismes KYC, AML et dans la mise en œuvre de la Travel Rule.
Évidemment, le modèle de partage de carnet d’ordres mis en place entre deux juridictions complique la traçabilité des flux. L’une des craintes des régulateurs étant que les marchés USDT “importés” servent de point d’entrée à des capitaux opaques. Ce qui est d’autant plus problématique dans un pays déjà ciblé par les hackers nord-coréens.
Bithumb shutters its USDT market & ends partnership with Australia's Stellar Exchange following intense FIU investigation into AML and Travel Rule compliance gaps. Stricter cross-border crypto rules are here.#SouthKoreaCrypto #Bithumb #AML #CryptoRegulation #TravelRule… pic.twitter.com/A4JwkzgjkR
— CryptoniteUae (@CryptoniteUae) November 27, 2025
Un signal fort envoyé à l’écosystème sud-coréen
Pour rappel, Bithumb reste le deuxième plus grand exchange sud-coréen, derrière Upbit. Cependant, son marché USDT ne représentait qu’une faible part des volumes. Quoi qu’il en soit, les plateformes locales tentées d’importer des liquidités offshore ne manqueront pas de recevoir le message clair envoyé par la fermeture de ce service.
Par ailleurs, la Corée du Sud poursuit le renforcement de son arsenal réglementaire, en témoigne l’adoption du Virtual Asset User Protection Act et une surveillance accrue des stablecoins. Dès lors, une lecture stricte de la conformité vient se dresser face à toute tentative d’élargir l’offre de marchés en dollars numériques.
Enfin, ce tour de vis intervient alors que les autorités se penchent aussi sur la concentration du marché entre quelques grandes plateformes. En effet, le régulateur veut éviter une aggravation des risques systémiques, qui serait induite par la course à la liquidité USDT aggrave les risques systémiques. Et cette prudence s’applique aussi bien en matière d’abus de marché que de pur blanchiment.
Capitalisation boursière totale d’USDT
Tether sous pression, mais la liquidité reste massive
Pour Tether, cet « épisode Bithumb » survient dans un contexte déjà tendu. En effet, S&P Global a tout récemment abaissé la note de stabilité d’USDT à « faible », estimant que le risque de rupture de parité a augmenté du fait de la composition plus risquée de ses réserves.
S’ajoute à cela le manque de transparence, qui renforce aussi les craintes sur la solidité de l’émetteur d’USDT. Des craintes qui poussent de plus en plus d’investisseurs à repenser leur gestion du risque stablecoin. Malgré tout, il ne faut pas oublier que la demande pour la liquidité dollar on-chain reste élevée.
Rappelons-le quand même : avec près de 185 milliards de dollars USDT en circulation, Tether domine largement le marché mondial de la liquidité crypto. Et si, en pratique, une fermeture isolée comme celle de Bithumb ne fera pas trembler la profondeur globale des carnets, elle fragilise inévitablement la présence locale d’USDT.
Car c’est un fait : les investisseurs sud-coréens voient se réduire leur accès direct aux marchés libellés en USDT. D’ailleurs, notons que cette fermeture pourrait aussi encourager les traders actifs à se tourner vers des plateformes offshore, certes moins exposées au régulateur local, mais aussi moins protégées.
Au final, l’affaire Bithumb peut se voir, pour les exchanges, comme à un rappel à l’ordre. Les plateformes devront prouver qu’elles maîtrisent leurs obligations de conformité, si elles espèrent déployer des solutions de partage de carnet d’ordres ou d’intégration de marchés USDT. Car sans cela, elles risquent de subir le même sort que Bithumb.
