Le récit d’un Bitcoin éternellement exponentiel heurte désormais la réalité des chiffres. Les multiples de cycle se contractent, l’euphorie se dilue et la question n’est plus de savoir si le réseau grandit, mais comment. Derrière la hausse de 2025 se dessine un actif en milieu de vie, accepté par les institutions, surveillé par les régulateurs, et contraint par ses propres limites de maturité.
Le plafond de verre n’est pas une prophétie, c’est une dynamique.
Des cycles à rendement décroissant
L’histoire récente est limpide. Le cycle 2013 a affiché un multiple d’environ 310. Celui de 2017 a reculé vers 143. En 2021, la progression a culminé autour de 11.
En 2025, elle gravite près de 2,1. Chaque cycle délivre un rendement divisé par environ quatre. C’est une décroissance géométrique qui traduit l’augmentation de la capitalisation, l’arbitrage plus rationnel des investisseurs et une offre flottante de plus en plus rigide.
La vélocité on-chain tombe en même temps, non pas parce que Bitcoin « s’éteint », mais parce qu’il est davantage détenu qu’échangé.
The Bitcoin 1+ Year HODL Wave has begun trending to the upside! 👀
Indicating that long term hodlers have stopped selling BTC. Waiting for higher prices? 🧑🚀
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— Bitcoin Magazine Pro (@BitcoinMagPro) January 16, 2025
Le signal est double : d’un côté, la conservation longue renforce la thèse de réserve de valeur ; de l’autre, l’amplitude des rallyes s’érode, car chaque dollar entrant doit déplacer un marché plus lourd, mieux arbitré et mieux couvert. Cette évolution s’inscrit dans une logique de maturation décrite dans notre analyse des crypto long terme.
Un actif de foi ou une monnaie encadrée
Un débat persistant oppose l’idée d’un actif reposant sur la foi à celle d’une monnaie adossée à des politiques économiques. Les partisans de la première vision rappellent que la valeur est un contrat social. Les seconds soulignent que le fiat s’ancre aussi dans l’impôt, la banque centrale, le budget et, en dernier ressort, l’austérité.
Cette nuance compte. Un actif purement dépendant de la demande et du récit devient, par construction, sensible aux régimes de liquidité et aux cycles médiatiques. La trajectoire de marché le montre.
La récente bascule d’une société qui a voulu « pivoter sa trésorerie » vers un mème token, avant de voir son titre perdre environ 60 %, illustre la fatigue face aux paris opportunistes. Le fameux « break the internet » des premières années laisse place à une exigence de preuves, d’utilité, de robustesse. Cela ne disqualifie pas Bitcoin, cela impose un changement d’angle.
Un mur technologique ou un simple palier
La contraction des multiples pose la question des limites. Dans un cadre mathématique, aucune courbe de prix d’un actif non productif ne peut croître indéfiniment au même rythme. La dynamique des bulles finit par s’user à mesure que la base d’investisseurs s’élargit et que les contraintes techniques, énergétiques et d’usage s’accumulent.
Diminuer les rendements ne signifie pas fin de partie. C’est le signe d’une normalisation où l’actif devient collatéral macro, réserve, ou brique d’un système à plusieurs couches. Le marché lui-même intègre cette idée de rendements décroissants à mesure que les cycles passent, avec des objectifs plus mesurés que par le passé et des fenêtres de prudence plus longues.
The perfect storm for #Bitcoin at $500,000 and #Ethereum at $20,000.
The current sentiment of the markets is ultra bearish as the biggest daily capitulation in the history of the crypto markets has been taking place.
Understandable.
What's next?
Well, if your positions were… pic.twitter.com/q7IvIXM7VU
— Michaël van de Poppe (@CryptoMichNL) February 5, 2025
Dans ce contexte, une vélocité faible et des détenteurs de long terme dominants créent un environnement d’offre rare. Si la demande est tirée par des flux institutionnels et des politiques monétaires accommodantes, un nouveau mouvement de prix est possible, mais probablement moins « explosif » que les légendes de 2013 et 2017.
Que faire d’un Bitcoin qui vieillit
Quand un produit vieillit, l’infrastructure prend le relais. Le message pour les capitaux patients est clair. Plutôt que chercher un « prochain 100x » qui se fait rare à l’échelle de Bitcoin, l’attention se déplace vers les rails qui rendent le réseau utile et sûr dans la durée.
Nœuds, stockage à froid, solutions multi-signatures, outils de données, ponts inter-chaînes, tout ce qui fiabilise l’usage réel tend à capter la valeur lorsque le produit central mûrit. Les investisseurs de la première heure l’ont compris. Une partie a diversifié vers d’autres couches et protocoles.
D’autres ont recentré leur thèse sur la conservation disciplinée, tout en acceptant que la volatilité structurelle baisse et que le delta de performance par cycle se tasse. Il reste une inconnue : Bitcoin aura 41 ans en 2049. Quel autre appareil chez vous a cet âge et fonctionne encore au quotidien ? Cette simple question force à penser long terme, maintenance, sécurité et gouvernance, plutôt que feux d’artifice.
Le « mur » de Bitcoin n’est pas une fin, c’est une charnière. Des multiples divisés par cent en dix ans ne disent pas que l’actif est mort, ils disent qu’il a grandi. La suite se jouera moins sur des chiffres stratosphériques que sur la qualité des usages, la solidité des couches d’infrastructure et l’intégration dans la finance réelle.
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