Les sanctions pour fraude fiscale en France vont bien au-delà des peines d’emprisonnement et des amendes. Voici un aperçu détaillé des sanctions complémentaires auxquelles les contribuables fraudeurs peuvent se voir condamnés, après un rappel des sanctions fiscales applicables.
Rappel des sanctions fiscales
Les sanctions fiscales consistent principalement en des majorations et des intérêts de retard :
– majoration de l’impôt dû : selon l’article 1729 du code général des impôts (CGI), une majoration de 40 % s’applique en cas de manœuvres frauduleuses ou d’abus de droit. Cette majoration peut atteindre 80 % si la fraude est particulièrement grave, comme en cas de dissimulation volontaire ou d’organisation frauduleuse.
– Intérêts de retard : conformément à l’article 1727 du CGI, les contribuables doivent payer des intérêts de retard calculés au taux de 0,20 % par mois sur le dû.
Sanctions administratives
Les sanctions administratives incluent des mesures restrictives ou privatives de droits :
– Privation de droits civiques et civils : en vertu de l’article 1741 du CGI, les fraudeurs peuvent se voir privés de leurs droits civiques, civils et de famille, ce qui inclut l’inéligibilité et la perte du droit de vote.
– Interdiction professionnelle : en application de l’article 1750 du CGI, les professionnels reconnus coupables de fraude fiscale peuvent être interdits d’exercer leur activité, pour une durée de 15 ans minimum, notamment dans les professions réglementées (avocats, experts-comptables, etc.).
– Suspension du permis de conduire : en vertu du même article que précédemment, les fraudeurs fiscaux peuvent voir leur permis de conduire un véhicule automobile suspendu par un tribunal pour une durée de 3 ans maximum, qui peut être doublée en cas de récidive de fraude fiscale, la suspension du permis pouvant n’affecter que la conduite d’un véhicule en-dehors de l’activité professionnelle. Si le condamné contrevient à cette sanction, il encourt alors une peine de 2 ans d’emprisonnement et une amende de 30 000 euros (article 434-41 du code pénal), ces sanctions étant cumulables !
– Publication de la condamnation : l’article 1741 et l’article 1729 A bis du même code prévoit également la possibilité de publier la condamnation dans la presse, ce qui peut avoir des conséquences importantes sur la réputation du fraudeur, lorsque la fraude atteint un montant au moins égal à 50 000 euros, qu’elle résulte de manœuvres frauduleuses ou d’un abus de droit, et que cette condamnation a reçu un avis préalable favorable de la Commission des infractions fiscales (CIF).
– exclusion des marchés publics : c’est le cas – et pour une durée de 5 ans – des personnes en situation irrégulière sur le plan de leurs impôts et des cotisations de sécurité sociale, et de celles reconnues coupables de fraude fiscale, d’opposition individuelle ou collective à l’exercice du contrôle fiscal, et celles coupables de refus collectif de l’impôt.
– publication de l’identité des opérateurs de plateformes « en ligne » non coopératifs : en application de l’article 1740 D du CGI, l’administration peut publier la liste des opérateurs de plateformes numériques de transactions « en ligne » qui ont été sanctionnés pour n’avoir pas respecté leurs obligations. L’accord préalable de la CIF est là aussi obligatoire avant toute publication.
Les sanctions patrimoniales
Ces sanctions patrimoniales visent à confisquer les biens obtenus frauduleusement :
- Confiscation des biens : selon l’article 131-21 du Code pénal, applicable en matière fiscale, les biens ayant servi à commettre l’infraction ou en étant le produit peuvent se voir confisqués.
- Saisie des avoirs : il peut y avoir saisie des avoirs financiers et immobiliers des fraudeurs afin de garantir le recouvrement du dû.
Les sanctions procédurales
Les sanctions procédurales concernent les restrictions imposées dans le cadre des relations avec l’administration fiscale :
- Exclusion des régimes fiscaux avantageux : les fraudeurs peuvent se voir exclus de certains régimes fiscaux avantageux. Par exemple, le régime des micro-entreprises ou des exonérations spécifiques.
- Obligation de garanties : en vertu de l’article L. 252 du Livre des procédures fiscales (LPF), l’administration fiscale peut exiger des garanties financières pour couvrir les montants en litige.
Jurisprudence et cas notables
La jurisprudence administrative et judiciaire a renforcé ces sanctions dans plusieurs cas :
- Conseil d’État, arrêt du 8 juillet 2016 : cet arrêt a confirmé la possibilité pour l’administration fiscale de refuser l’accès à certains avantages fiscaux en cas de fraude avérée.
- Cour d’appel de Paris, arrêt du 15 mars 2019 : la Cour a validé la confiscation de biens immobiliers dans une affaire de fraude fiscale organisée.
Ces sanctions visent ainsi à dissuader la fraude fiscale tout en garantissant l’équité du système fiscal.