La loi de Finances (LF) 2024, votée en décembre 2023, inscrit la réforme de la fiscalité des logements meublés, par l’adoption (entre autres), semble-t-il « par erreur » et par le biais de la procédure forcée du 49.3, d’un amendement voté au Sénat et dont le Gouvernement ne veut pas. Ce dernier a en effet prévenu, sans que l’on sache d’ailleurs de quelle manière il s’y prendra pour qu’il ne s’applique pas, qu’il ne veut pas d’un tel amendement.
Cette réforme concerne essentiellement les règles applicables au régime simplifié de déclaration et d’imposition des bénéfices industriels et commerciaux – autrement appelé le micro-BIC – introduisant des changements importants pour la fiscalité des locations meublées touristiques, qu’elles soient classées ou non. Ces changements concernent à la fois le régime d’imposition des revenus locatifs et l’assujettissement à la TVA.
Le régime micro-BIC : un durcissement pour les locations « non classées »
Le régime micro-BIC est un régime simplifié qui permet aux loueurs en meublés non professionnels (LMNP) de bénéficier d’un abattement forfaitaire sur leurs revenus locatifs, sans avoir à tenir une comptabilité détaillée ni à déduire leurs charges réelles. Ce régime s’applique de plein droit aux loueurs dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas un certain seuil, qui varie selon le type de location.
Avant la loi de Finances 2024, le seuil était de 77 700 euros hors taxes pour les locations meublées « non classées », et de 188 700 euros pour les locations meublées classées (c’est-à-dire ayant obtenu un classement officiel par étoiles). L’abattement forfaitaire était de 50% pour les locations « non classées », et de 71% pour les locations classées.
Or le Sénat a proposé (et son texte a été adopté) de réduire le montant des recettes retenu pour l’application du micro-BIC aux locations de meublés touristiques « non classées », pour l’aligner sur celui des locations vides (15 000 €, avec un abattement de 30 %), ceci afin de stopper le foisonnement des locations de « type Airbnb ».
La loi de Finances 2024 a modifié ces conditions à partir des revenus de 2023. Le seuil du régime micro-BIC est désormais fixé à 15 000 euros pour les locations meublées « non classées », et l’abattement forfaitaire n’est plus que de 30%. Pour les locations meublées classées, le seuil reste à 188 700 euros, mais l’abattement forfaitaire passe à 50%, mais avec toutefois un abattement supplémentaire de 21% si le logement est situé dans une zone géographique présentant une offre locative suffisante et si le chiffre d’affaires est inférieur à 15 000 euros.
Les loueurs en meublés « non-classés » : les « dindons de la farce » !…
Ces changements ont pour conséquence de rendre le régime micro-BIC moins attrayant et moins avantageux pour les loueurs en meublés « non classés », dont l’imposition va augmenter. En effet, ils vont devoir, soit opter pour le régime réel d’imposition, qui leur permettra de déduire leurs charges réelles, mais qui implique une comptabilité plus complexe, soit rester au régime micro-BIC, mais avec un abattement forfaitaire plus faible, et respecter un plafond de chiffre d’affaires plus bas, ce qui va limiter leur activité.
Pour les loueurs de meublés classés, le régime micro-BIC reste intéressant, surtout s’ils bénéficient de l’abattement supplémentaire de 21%.
La TVA : une clarification pour les locations touristiques
La loi de Finances 2024 a également clarifié les règles d’assujettissement à la TVA des locations touristiques de courte durée. La TVA s’applique aux prestations d’hébergement fournies dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire. La loi ajoute un critère de durée de la location pour pouvoir assujettir l’activité à la TVA : la durée de location ne doit pas excéder 30 nuitées consécutives pour un même client. Le critère de fourniture des services para-hôteliers (petit déjeuner, nettoyage quotidien des locaux, fourniture du linge de maison, accueil) reste également valable.
Le taux de TVA applicable est de 10% pour tous les types de locations hôtelières ou assimilées (2,10% en Corse). Les locations de locaux nus ou meublés à l’exploitant d’établissements hôteliers ou résidentiels restent également assujetties à la TVA.
Une telle mesure tend à harmoniser les règles fiscales entre les différents acteurs du secteur touristique, et à éviter les distorsions de concurrence. Elle permet aussi de simplifier la gestion administrative des loueurs en meublés, qui n’ont plus à se soucier de la TVA si leur activité ne remplit pas les critères d’assujettissement.
Conséquences fiscales et économiques de la réforme
La réforme fiscale de la location meublée touristique a pour vocation de réguler ce secteur en pleine expansion, qui représente une concurrence importante pour l’hôtellerie traditionnelle et qui pose des problèmes de logement dans certaines zones tendues. Elle veut aussi renforcer les recettes fiscales de l’État, en augmentant l’imposition des revenus locatifs et en élargissant l’assiette de la TVA.
Les conséquences fiscales et économiques de la réforme sont différentes selon le type de location et la zone géographique. Les loueurs en meublés non classés vont être les plus impactés, car leur imposition va augmenter et leur activité diminuer. Ils vont devoir, soit se conformer aux nouvelles règles, soit se reconvertir vers d’autres types de location (meublés classés, meublés de longue durée, etc.). Les loueurs en meublés classés sont moins touchés, car ils bénéficient encore d’un régime micro-BIC avantageux et d’une exonération de TVA dans la plupart des cas.
La réforme a évidemment un impact sur le marché du logement, en incitant les propriétaires à libérer des logements destinés à la location touristique pour les remettre sur le marché locatif classique ou les vendre. Elle peut donc contribuer à augmenter l’offre de logement et à faire baisser les prix dans certaines zones tendues, mais elle peut aussi entraîner une baisse de l’attractivité touristique et une perte de revenus pour les acteurs locaux du secteur (commerçants, restaurateurs, etc.), et elle n’atteint pas du tout la « cible Airbnb » qui valorise les « meublé touristiques classés ». Enfin, il y a urgence à ce que le Gouvernement prenne les dispositions qui s’imposent s’il veut empêcher l’application de l’amendement sénatorial en défaveur des « loueurs en meublés non classés », car les revenus 2023 de telles locations vont devoir être déclarés au Fisc en début d’année 2024 !…
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