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L’exonération d’impôt sur la plus-value de cession de la résidence principale

Exonération d’impôt sur la plus-value de cession de la résidence principale : la jurisprudence récente, à travers plusieurs arrêts du Conseil d’État, a défini les limites d’une approche fondée uniquement sur l’intentionnalité supposée du vendeur.

En France, la fiscalité immobilière suscite de nombreuses interrogations, notamment en ce qui concerne l’imposition des plus-values réalisées lors de la revente d’un bien immobilier. L’article 150 U, II, 1° du code général des impôts (CGI) prévoit un régime d’exonération totale de la plus-value lorsque le bien cédé constitue la résidence principale du vendeur à la date de la vente.

Si ce principe semble clair, son application fait l’objet de multiples contentieux, souvent liés à l’interprétation de la notion de résidence principale et à l’usage par l’administration fiscale du critère d’intentionnalité. 

Face à cela, la jurisprudence administrative récente s’est attachée à réaffirmer l’importance des éléments factuels objectifs pour apprécier l’occupation effective du logement. Cet article propose une analyse complète et structurée de ce dispositif fiscal, des conditions légales de l’exonération, ainsi que des enseignements tirés des décisions jurisprudentielles les plus marquantes.

Le cadre juridique de l’exonération de la plus-value immobilière

Les dispositions du code général des impôts

Le cœur du régime fiscal de l’exonération repose sur l’article 150 U, II, 1° du CGI, qui stipule que la plus-value issue de la cession d’un bien immobilier est exonérée d’impôt si le bien constitue la résidence principale du cédant au jour de la vente. 

Cette exonération est également étendue aux dépendances immédiates et nécessaires, telles que les caves, garages ou annexes, à condition qu’elles soient cédées en même temps que le bien principal (BOI-RFPI-PVI-10-40-10).

Précisions apportées par le Livre des procédures fiscales

Le Livre des procédures fiscales (LPF) vient préciser les modalités d’application de cette exonération, notamment en termes de contrôle de l’occupation effective. L’administration peut demander des preuves concrètes telles que :

  • les factures de consommation (eau, électricité),
  • l’avis d’imposition à la taxe d’habitation,
  • les attestations d’assurance habitation,
  • les relevés bancaires ou documents contractuels mentionnant l’adresse.

Ces documents permettent de confirmer que le bien n’était pas vacant ou utilisé dans un autre but que celui de résidence principale.

Les conditions pour bénéficier de l’exonération

L’occupation effective, habituelle et durable

La résidence principale est définie comme le lieu où le contribuable réside de manière effective, habituelle et durable. Il ne suffit pas de le déclarer comme tel sur le plan fiscal : une présence réelle doit être démontrée. Ainsi, des éléments matériels sont nécessaires pour prouver une utilisation continue du bien comme logement principal.

Une simple occupation temporaire, notamment dans le cas d’un déménagement prématuré, peut encore permettre de bénéficier de l’exonération si la mise en vente intervient dans un délai raisonnable, généralement considéré comme n’excédant pas un an.

Critères complémentaires : dépendances, délai de mise en vente et départ temporaire

La jurisprudence confirme que la vente des dépendances est éligible à l’exonération si elles sont liées à l’usage quotidien du logement et cédées simultanément.

Le caractère raisonnable du délai de mise en vente et les conditions objectives du départ du logement sont aussi déterminants. 

Un départ pour mutation professionnelle ou une situation familiale (séparation, naissance, etc) justifie l’interruption de l’occupation sans remettre en cause l’exonération, à condition que le bien soit vendu rapidement et que des preuves d’occupation soient conservées.

Jurisprudence récente : l’objectivité contre l’intentionnalité

Rejet d’une approche purement subjective par l’administration fiscale

Certaines décisions de l’administration fiscale ont été annulées car fondées uniquement sur l’intention supposée du contribuable de bénéficier indûment de l’exonération. La jurisprudence réaffirme que l’intentionnalité ne peut primer sur les faits matériels.

Par exemple, dans un arrêt du Conseil d’État de 2021, le redressement fondé sur la seule présomption de fraude a été annulé, les juges ayant constaté que le bien avait été réellement habité, avec de nombreux justificatifs à l’appui.

Exemples de jurisprudence récentes

CE, 14 juin 2023, n°461960

Le Conseil d’État rappelle qu’en l’absence d’abus de droit prouvé, la succession d’achats et reventes de résidences principales ne suffit pas à disqualifier l’exonération. La matérialité de l’occupation reste le critère central.

CAA de Douai, 4 décembre 2019

La cour accorde l’exonération malgré une occupation brève, justifiée par des factures d’énergie, des documents fiscaux et une consommation cohérente avec la composition familiale.

CAA de Marseille, 21 octobre 2014

L’exonération est refusée en l’absence de preuve d’occupation et d’explication valable sur la brièveté de la résidence.

TA de Grenoble, 14 juin 2024

Refus d’exonération sur fond de manque de diligence dans les démarches de mise en vente. Le bien était resté vacant pendant 22 mois, ce qui dépassait le délai toléré.

TA de Besançon, 18 décembre 2015

L’administration fiscale est sanctionnée pour avoir refusé l’exonération sans prendre en compte les justifications apportées par le contribuable, qui avait quitté le bien pour raisons professionnelles 27 mois avant la vente.

Cour de cassation du 14 mars 2025, avec pourvoi, et arrêt du Conseil d’Etat du 14 mars 2025, n°474943

Pour le Conseil d’État, la cour administrative d’appel doit apprécier, avec des critères objectifs, les conditions dans lesquelles les contribuables avaient occupé le bien, sur la base de l’occupation effective et non l’intention qu’avaient les requérants, quand bien même ils ont quitté leur résidence principale le 29 avril 2015 alors que ce même bien n’a été vendu que le 26 juin 2015, dérogeant ainsi aux dispositions de l’article 150 U du CGI, lequel dispose :

 » I. – (…) les plus-values réalisées par les personnes physiques (…) sont passibles de l’impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH (…) II. – Les dispositions du I ne s’appliquent pas aux immeubles (…) : / 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession (…) « .

Analyse des critères déterminants retenus par les juridictions

Les décisions des juridictions administratives convergent vers une approche équilibrée :

  • Occupation réelle et continue : documentée par des preuves matérielles, indépendamment de la durée exacte.
  • Mise en vente dans des conditions normales : absence de stratégie fiscale manifeste.
  • Appréciation globale et circonstanciée : l’analyse tient compte du contexte personnel du contribuable.

L’objectif est de protéger les contribuables de bonne foi tout en permettant de détecter et sanctionner les montages frauduleux réels.

Conclusion

L’exonération de la plus-value sur la vente de la résidence principale repose sur un socle juridique solide et des principes clairs, renforcés par une jurisprudence exigeante mais protectrice. Le droit fiscal impose aux contribuables de démontrer l’occupation effective du bien au moyen d’éléments matériels et tangibles.

En retour, l’administration ne peut s’appuyer uniquement sur des soupçons d’intentionnalité pour contester l’exonération, au risque de se voir désavouée par les juridictions.

Les décisions les plus récentes du Conseil d’État et des cours administratives d’appel confirment la tendance suivante : seule l’analyse factuelle et objective permet de trancher légitimement les contentieux. Cette orientation vise à garantir une application équitable de la loi, préservant l’intérêt général sans porter atteinte aux droits des particuliers.

Enfin, pour éviter tout risque de litige, les vendeurs doivent constituer un dossier complet, justifiant par des preuves avérées l’usage du bien comme résidence principale jusqu’à la vente. A l’avenir, une meilleure harmonisation des critères entre administration fiscale et juridictions pourrait contribuer à clarifier encore plus ce dispositif clé du droit fiscal immobilier.

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Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité

Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité

Dans la filière fiscale, je suis particulièrement compétent et formaté pour la fiscalité des entreprises et des particuliers, le contrôle fiscal et son assistance, les conseils aux entreprises et aux particuliers, le traitement des contentieux suite aux contrôles fiscaux, l'assistance aux vérifications de comptabilité informatisées (compétence informatique particulière dans le traitement des données), mais apte à défendre de la même manière un contrôle fiscal des particuliers (contrôle sur pièces, ou un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'ensemble; impositions directes locales: taxe d'habitation, taxes foncières), je suis également compétent dans une autre spécialité mal connue, y compris de beaucoup d'avocats, les évaluations domaniales de valeurs vénales et de valeurs locatives d'immeubles, évaluations des indemnisations en matière d'expropriations pour cause d'utilité publique, et leurs contentieux (au sein de l'Agence France Domaine en qualité de Chargé de mission, évaluateur et commissaire du gouvernement devant le Juge de l'expropriation et devant les SAFER).

Ma carrière administrative m'a valu d'exercer dans pratiquement tous les domaines du droit fiscal, y compris international, au sein de plusieurs Grandes Directions Nationales (ex-DSGI aujourd'hui DRESG ; DNVSF, en liaison avec Bercy, puis dans une Grande Direction Régionale de contrôles fiscaux, la DIRCOFI Centre-Val de Loire). 

Plus que mes compétences techniques très étendues, ma personnalité s'est toujours distinguée par une exigence de rigueur, mon adaptabilité, l'esprit d'analyse et de synthèse, le pragmatisme, la créativité, réactivité, curiosité, l'aisance relationnelle et en équipe, la vitesse de compréhension et d'exécution, le goût de l'initiative, des responsabilités et de la négociation. J'aurais pu par exemple intégrer un cabinet spécialisé, pour assurer la défense des intérêts des clients dans les domaines précités. J'aurais tout aussi bien pu travailler en "back office" en défense et recours des contribuables vérifiés, sur études des dossiers, ou les assister pendant les vérifications. Mes principaux hobbies sont : musique, art en général et littérature en particulier, étant auteur publié, et je suis également intéressé par l'activité de rédacteur.

Mes compétences fiscales et "para-fiscales" sont des plus étendues : juridiques (droit civil, fiscal et pénal découlant du fiscal, et droit de l'urbanisme + droit administratif, public et constitutionnel).

Aujourd'hui à la retraite, je reste actif en qualité d'auto-entrepreneur, en matière de conseils et défense en fiscalité des particuliers uniquement, et secondairement conseil dans les activités liées à l'écriture. Mon site web professionnel est https://www.cdjf-casav.com, où je réponds aux contribuables (ou écrivains) qui me sollicitent (mes tarifs et honoraires y sont clairement mentionnés).

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