Pays suivant dans un mouvement de fond qui semble inéluctable, le Japon voit naître un stablecoin adossé au yen. C’est le premier du genre qui soit pleinement convertible et conçu pour rester au plus près de la valeur de la devise. Toutefois, la question clé qui émerge est cruciale : s’imposera-t-il dans un pays où le cash et la carte dominent encore ?
D’après la société émettrice de ce nouveau jeton, l’objectif est d’abaisser les coûts de règlement et d’ouvrir des cas d’usage B2B. Car en effet, une infrastructure numérique en yen peut fluidifier les paiements domestiques et les transferts internationaux, tout en sécurisant la convertibilité 1:1.
Que sait-on du jeton et du cadre nippon ?
L’émetteur vise bel et bien une convertibilité intégrale en yen et un modèle de réserves composé de dépôts et d’obligations d’État japonaises (JGB). Avec, évidemment, des frais de transaction initiaux réduits à néant pour accélérer l’adoption. Ainsi, le pari est de créer un instrument de règlement simple, transparent et rapidement transférable.
Or, ce lancement s’inscrit dans un écosystème en pleine réorganisation : méga-banques et grands conglomérats testent des standards d’émission et d’interopérabilité pour les paiements et le règlement-livraison de titres. À ce titre, le Japon veut arrimer l’innovation à un cadre strict, pensé pour limiter les risques de fuite de dépôts.
円建てステーブルコイン「JPYC」、27日から発行
ー日本経済新聞日本を代表する円建ステーブルコイン企業として日経にも取り上げられています🔥https://t.co/Pfe5FmrCjC pic.twitter.com/pUeLMwcr5d
— JPYC株式会社 (@jpyc_official) October 24, 2025
Par ailleurs, un autre aspect important de cette réorganisation est que l’empilement réglementaire vise une réversibilité sans friction : procédures de rachat, garde conforme et audit des réserves. Dès lors, l’outil peut servir de pont entre rails bancaires et rails blockchain, tant que l’expérience utilisateur reste fluide.
Pourquoi ce lancement compte-t-il ?
À court terme, l’impact le plus tangible concerne les paiements domestiques (e-commerce, micro-paiements, B2B) et la baisse des délais de règlement. Cependant, l’ambition affichée n’est pas seulement locale, elle vise aussi à connecter les corridors Asie–USD, notamment pour les PME exportatrices.
Aujourd’hui, le marché reste ultra-concentré sur les stablecoins en dollars. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder la liste des principaux stablecoins du marché, massivement libellés en USD. Toutefois, l’arrivée d’un jeton en yen a le potentiel de diversifier les devises on-chain et de réduire le risque de change pour les acteurs japonais.
Les autorités monétaires, elles, doivent surveiller le risque systémique : fuite de dépôts, pro-cyclicité, gouvernance des réserves et droit au rachat. Avec pour ligne de mire l’ouverture à l’innovation, sans fragiliser l’intermédiation bancaire locale.
Quels scénarios à suivre ?
Scénario de base : intégration dans les parcours de paiement (marchands, plateformes, fournisseurs) via des partenariats bancaires et fintech. Dans ce cas de figure, c’est sur l’acceptation réseau, la transparence des réserves et l’interopérabilité avec d’autres chaînes que la valeur se jouera.
Scénario d’accélération : en cas d’adossement par des banques de premier plan et d’usage pour le règlement de titres tokenisés, les volumes et la confiance vont inévitablement croître.
Enfin, n’oublions pas que l’inertie des habitudes de paiement pourrait freiner l’extension au quotidien. L’usage fera les changements, ou les rejettera.
