Le système fiscal allemand et son homologue français présentent des similitudes mais aussi des différences notables. En effet, ces deux pays sont soumis à l’impôt sur le revenu, à l’impôt sur les sociétés, à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et à diverses taxes locales, mais selon des modalités de calcul, des taux, des seuils d’imposition et des exonérations qui varient selon les cas, et sans qu’il soit possible en fin de compte, de trancher sur le système fiscal le plus avantageux. Intéressons-nous aux principaux impôts et prélèvements : sur le revenu ; sur les sociétés ; la TVA ; les cotisations sociales.
L’impôt sur le revenu
En Allemagne, l’impôt sur le revenu est prélevé à la source depuis 2019 et il s’applique aux revenus du travail, du capital, des activités indépendantes et des locations. L’impôt sur le revenu est prélevé à la source par l’employeur, qui verse directement au fisc la part correspondante au salaire brut du salarié. Le salarié reçoit donc un salaire net après impôt sur son compte bancaire. Il doit toutefois remplir une déclaration d’impôt (« Steuererklärung ») (avant le 2 octobre 2023 pour l’année 2022 par exemple), afin de faire valoir ses éventuels frais professionnels, ses dons ou ses crédits d’impôt. Il peut ainsi obtenir un remboursement du fisc si celui-ci lui a prélevé trop d’impôt, ou au contraire payer un complément si son impôt est insuffisant.
En Allemagne, l’impôt sur le revenu est calculé selon un barème progressif par tranches, qui varie selon le statut marital du contribuable. Il existe six classes d’impôt (« Steuerklassen ») :
- La classe I pour les célibataires, les veufs ou les divorcés sans enfant.
- La classe II pour les célibataires, les veufs ou les divorcés avec au moins un enfant à charge.
- La classe III pour les personnes mariées dont le conjoint ne perçoit pas ou peu de revenus.
- La classe IV pour les personnes mariées dont le conjoint perçoit des revenus similaires.
- La classe V pour les personnes mariées dont le conjoint est en classe III.
- La classe VI pour les personnes qui ont plusieurs employeurs.
Le barème de l’impôt sur le revenu est progressif et comporte cinq tranches allant de 14 % à 45 %. En 2023, les tranches de revenus sont indexées sur l’inflation. Ainsi, le seuil d’imposition est fixé à
9 984 euros par an et le seuil de la tranche maximale à 283 516 euros par an. En plus de l’impôt sur le revenu, les contribuables allemands doivent payer une contribution de solidarité de 5,5 % sur leur impôt. Le taux moyen d’imposition sur le revenu en Allemagne est de 22,8 %.
En France, l’impôt sur le revenu est également prélevé à la source depuis 2019. Il s’applique aux revenus du travail, du capital, des activités non salariées et des locations. Le barème de l’impôt sur le revenu est également progressif et comporte cinq tranches allant de 11 % à 45 %. En 2023, les tranches de revenus sont également indexées sur l’inflation de 5,4 %. Ainsi, le seuil d’imposition est fixé à 10 224 euros par an et le seuil de la tranche maximale à 159 326 euros par an. En plus de l’impôt sur le revenu, les contribuables doivent payer des prélèvements sociaux de 17,2 % sur leurs revenus du capital et certains revenus du travail. Le taux moyen d’imposition sur le revenu en France est de 20 %.
Avantages et inconvénients
A titre d’exemple, un célibataire sans enfant qui gagne 40 000 euros brut par an paiera en Allemagne un impôt sur le revenu de 8 569 euros, soit un taux moyen d’imposition de 21,4%. En France, il paiera un impôt sur le revenu de 5 633 euros, soit un taux moyen d’imposition de 14,1%.
On constate donc que le système fiscal allemand est plus lourd que le système fiscal français pour les revenus moyens et élevés, mais qu’il est plus avantageux pour les revenus faibles et très élevés.
L’avantage du système fiscal allemand est qu’il permet une plus grande souplesse de l’impôt grâce au prélèvement à la source modulable selon les variations de revenus. Il favorise également la solidarité entre les régions grâce au mécanisme de péréquation financière entre les « Länder ». En revanche, il présente l’inconvénient d’être complexe et coûteux à gérer, avec de nombreux formulaires à remplir et des délais courts pour déclarer ses revenus. Il pèse également plus lourdement sur les hauts revenus et les ménages sans enfants. En Allemagne, le système fiscal est plus redistributif que le système fiscal français, c’est-à-dire qu’il fait payer plus d’impôt aux plus riches et moins aux plus pauvres. Selon une étude de l’OCDE publiée en 2018, le coefficient de Gini, qui mesure les inégalités de revenus après impôts et transferts sociaux, était de 0,29 en Allemagne contre 0,32 en France (plus le coefficient est proche de zéro, moins les inégalités sont fortes).
L’une des raisons de cette différence est que l’Allemagne applique un système de « quotient conjugal » (« Ehegattensplitting »), qui permet aux couples mariés de diviser leur revenu total par deux avant d’appliquer le barème de l’impôt sur le revenu. Ce système favorise les couples dont l’un des conjoints a un revenu nettement supérieur à l’autre, car il réduit leur taux marginal d’imposition. Il pénalise en revanche les couples dont les conjoints ont des revenus similaires, car ils paient plus d’impôt que s’ils étaient célibataires.
L’avantage du système fiscal français est qu’il permet aux foyers fiscaux de bénéficier d’une réduction d’impôt proportionnelle au nombre de personnes à charge (enfants, personnes invalides…). Ce système favorise les familles nombreuses, car il augmente leur nombre de parts et réduit leur taux marginal d’imposition. Il pénalise en revanche les célibataires sans enfant, car ils paient plus d’impôt que s’ils étaient mariés avec des enfants. Il offre également plus de possibilités de réductions et de crédits d’impôt pour encourager certaines dépenses (transition écologique, emploi à domicile, dons…), et il est a priori plus simple à déclarer avec en particulier la déclaration « préremplie » et « en ligne », entre mai et juin suivant les versions (papier ou « en ligne ») et que les déclarants sont résidents de France ou résidents français à l’étranger. En revanche, il présente l’inconvénient d’être moins transparent et moins équitable que le système allemand, avec des niches fiscales qui profitent surtout aux plus aisés. Il pèse également plus lourdement sur les revenus du capital et les activités non salariées.
L’impôt sur les sociétés
En Allemagne, l’impôt sur les sociétés s’applique aux bénéfices des sociétés de capitaux (GmbH, AG, KGaA…). Le taux de l’impôt sur les sociétés est de 15 % au niveau fédéral, auquel s’ajoute une contribution de solidarité de 5,5 % et un impôt commercial de 14 % en moyenne au niveau local. Le taux global d’imposition sur les sociétés en Allemagne est donc de 30,2 % en moyenne. Toutefois, les petites et moyennes entreprises (PME) bénéficient d’un taux réduit de 15 % sur les premiers 42 500 euros de bénéfices en 2023. Par ailleurs, les entreprises énergétiques sont soumises à une contribution temporaire de solidarité de 33 % sur leurs profits supérieurs de 20 % à leurs profits des années précédentes.
En France, l’impôt sur les sociétés s’applique aux bénéfices des sociétés de capitaux (SA, SAS, SARL…) et de certaines sociétés de personnes (SNC, SCP…) ayant opté. Le taux de l’impôt sur les sociétés est de 25 % au niveau national, sauf pour les PME qui bénéficient d’un taux réduit de 15 % sur les premiers 38 120 euros de bénéfices. Le taux global d’imposition sur les sociétés en France est donc de 25 % en moyenne. Toutefois, certaines entreprises sont soumises à des contributions additionnelles, comme la contribution sociale sur les bénéfices de 3,3 % ou la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés de 10,7 % pour les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 250 millions d’euros. Le taux global d’imposition sur les sociétés peut alors atteindre 34,4 %. Par ailleurs, les entreprises bénéficient d’un crédit d’impôt en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments tertiaires, rétabli pour 2023 et 2024.
Avantages et inconvénients
L’avantage du système fiscal allemand est qu’il permet une plus grande autonomie des collectivités locales dans la fixation du taux d’impôt commercial. Il favorise également la compétitivité des PME grâce au taux réduit d’impôt sur les sociétés. En revanche, il présente l’inconvénient d’être plus élevé que le système français pour les grandes entreprises et les entreprises énergétiques. Il pèse également plus lourdement sur les dividendes distribués aux actionnaires.
L’avantage du système fiscal français est qu’il permet une plus grande harmonisation du taux d’impôt sur les sociétés au niveau national. Il favorise également la transition écologique des entreprises grâce au crédit d’impôt pour la rénovation énergétique. En revanche, il présente l’inconvénient d’être plus complexe et plus instable que le système allemand, avec des contributions additionnelles variables selon les années. Il pèse également plus lourdement sur les bénéfices réinvestis dans l’entreprise.
La taxe sur la valeur ajoutée
En Allemagne, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) s’applique à la consommation finale des biens et services. Le taux normal de la TVA est de 19 % et le taux réduit est de 7 %. Le taux réduit s’applique notamment aux produits alimentaires, aux livres, aux médicaments, aux transports publics et aux services culturels. Certains produits et services sont exonérés de TVA, comme les services médicaux, les services financiers ou les services éducatifs. La TVA rapporte environ 240 milliards d’euros par an au budget allemand.
En France, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) s’applique également à la consommation finale des biens et services. Le taux normal de la TVA est de 20 % et le taux réduit est de 5,5 %. Le taux réduit s’applique notamment aux produits alimentaires, aux livres, aux médicaments, aux transports publics et aux services culturels. Un taux intermédiaire de 10 % s’applique à certains produits et biens et services, comme les médicaments non remboursables, le bois de chauffage, les produits destinés à la production agricole, la restauration, l’hôtellerie ou les travaux portant sur des locaux d’habitation, ou encore les services d’aide à la personne. La TVA a rapporté 272 milliards d’euros au budget français en 2022, en hausse de 30 milliards d’euros par rapport à l’année 2021, à cause des effets amplificateurs de l’inflation, et d’une augmentation du nombre d’entreprises collectrices.
Avantages et inconvénients
Globalement c’est en France que le poids de la TVA est le plus lourd, avec trois taux de taxation au lieu de deux en Allemagne, et moins de produits et services exonérés que dans ce pays.
Les cotisations sociales
En Allemagne, les cotisations sociales sont prélevées sur le salaire brut du salarié et sont partagées entre l’employeur et le salarié. Elles comprennent les cotisations pour l’assurance maladie, l’assurance dépendance, l’assurance retraite, l’assurance chômage et l’assurance accident du travail.
En France, les cotisations sociales sont également prélevées sur le salaire brut du salarié et sont aussi partagées entre l’employeur et le salarié. Elles comprennent les cotisations pour la sécurité sociale (maladie, maternité, invalidité, décès), la retraite complémentaire, l’assurance chômage, la contribution sociale généralisée (CSG) etc.
Avantages et inconvénients
L’Allemagne prélève moins de cotisations sociales que la France sur les salaires, ce qui réduit le coût du travail et augmente le salaire net des salariés. Selon l’OCDE, le taux moyen de cotisations sociales était de 20,9% en Allemagne contre 37% en France en 2019.
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