À la veille du budget concocté par Rachel Reeves et son équipe, les marchés britanniques respirent enfin. La détente des rendements américains a réduit la pression sur les gilts, mais n’a pas pour autant effacé les interrogations budgétaires.
Un soutien venu des Treasuries américains
Portés par la perspective d’une nouvelle baisse de taux de la Fed en décembre, les rendements des Treasuries se replient depuis quelques séances. Un mouvement qui, mécaniquement, les gilts britanniques à la baisse dans son sillage. Le rendement du gilt à 10 ans est ainsi revenu vers 4,5 %, après un pic proche à 4,6 % mi-novembre. Dans le même temps, le Treasury 10 ans américain oscille autour de 4 %.
Cette récente accalmie contraste nettement avec la violente correction observée mi-novembre, quand une vente massive de gilts avait sanctionné l’hypothèse d’abandon d’une hausse de l’impôt sur le revenu. Pour rappel, les investisseurs redoutaient alors un dérapage durable des finances publiques, qui entraînerait la chute de la livre sterling et des obligations.
Budget Reeves : un test pour la crédibilité fiscale
Ce mercredi, la chancelière de l’Échiquier est censée livrer le détail de hausses d’impôts totalisant des dizaines de milliards de livres. Mais selon les informations ayant fuité dans la presse, elle devrait épargner l’impôt sur le revenu, afin de tenir sa promesse électorale.
En effet, le marché exige désormais une discipline budgétaire stricte, comme nous l’expliquions récemment dans cet article sur les Gilts. Car il ne faut pas oublier que le spectre d’un épisode à la « Liz Truss » rôde encore dans les esprits.
C’est donc, pour les gérants obligataires, le programme d’émissions qui sera la clé d’interprétation. Ce dernier doit détailler les montants, les maturités et la répartition dans la courbe. Et pour éviter tout risque de nouvelle flambée des rendements, il faudra probablement satisfaire les banques comme Barclays avec un calendrier qu’elles pourront juger « digeste ».
BoE, sterling et actions : un équilibre fragile
Rappelons que la stratégie de Reeves se place dans un contexte monétaire particulier : la Banque d’Angleterre pourrait baisser ses taux dès décembre. Les marchés monétaires jugent même qu’une réduction de 25 points de base est quasi certaine, et pricent déjà en conséquence.
Cependant, il faut préciser qu’un assouplissement survenant au Royaume-Uni avant (ou plus vite que) les États-Unis aurait probablement fragilisé la livre. Mais la pression sur celle-ci est retombée grâce au rallye obligataire américain et à la probabilité d’une coupure de la Fed.
Some quick thoughts on the current UK gilt market sell-off
1) This started as a broad-based move across all major economies, driven (once again) by concerns over US fiscal sustainability and a sell-off in Treasuries. However, UK gilts are being hit harder than others (including… pic.twitter.com/UZCXS42Azh
— Kallum Pickering (@KallumPickering) July 2, 2025
D’ailleurs, les données de volatilité implicite confirment cet effet : la volatilité à trois mois sur la livre est retournée près de ses niveaux annuels les plus bas. Le marché semble donc estimer que, pour l’instant, le choc fiscal demeure globalement gérable.
Et même les actions britanniques profitent de ce répit. En effet, le FTSE 100 et le FTSE 250 ont rebondi de quasiment 1 % ce mardi, portés par l’humeur plus positive de Wall Street en cette semaine de Thanksgiving.
Mais n’oublions pas que cette embellie reste fragile. Car si le budget attendu aujourd’hui manque d’ambition ou de clarté, on assistera sûrement à un retour des « bond vigilantes » et donc à une remontée brutale des rendements, au détriment de la livre et des actions domestiques.
Un répit, pas un quitus
Pour l’heure, il apparaît que les marchés parient plutôt sur une prise en compte des mauvaises nouvelles déjà intégrée aux prix. Et la perspective d’un budget austère, combiné à de probables baisses de taux de la Fed comme de la BoE, alimente ce scénario de « soft landing ».
À plus long terme, c’est surtout la capacité de Reeves à concilier investissement public, transition énergétique et maîtrise de la dette qui interroge les investisseurs. Car en l’absence d’une croissance plus robuste, une confiance durable ne reviendra pas, ou en tout cas pas grâce à des rendements plus bas.
Sources
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