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Une « notice explicative » de l’administration fiscale lui est-elle opposable ?

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L’opposabilité à l’Administration fiscale française d’une « notice d’explication » de formulaire de déclaration est une question qui peut intéresser les contribuables qui souhaitent contester le montant ou le mode de calcul de leur impôt, dans la mesure où la « notice d’explication » est un document qui accompagne les formulaires de déclaration et qui donne des indications sur la façon de les remplir. Mais ces indications ont-elles une valeur juridique ? Peuvent-elles être invoquées par le contribuable en cas de litige avec l’Administration ? 

Une notice explicative n’a, par principe, aucune valeur réglementaire

Il convient en effet de rappeler que la notice d’explication n’est pas un texte officiel, contrairement au formulaire de déclaration lui-même, qui est un acte administratif. La notice d’explication n’est pas publiée au Journal officiel, ni soumise à l’avis du Conseil d’État. Elle n’a donc pas de valeur réglementaire, et ne peut pas modifier ou compléter les dispositions légales ou réglementaires relatives à l’impôt.

Mais il convient de distinguer, selon que la notice contient seulement une erreur manifeste, ou au contraire une interprétation favorable au contribuable 

Il y a lieu de distinguer deux situations, selon que la notice d’explication contient une erreur manifeste, ou qu’elle contient une interprétation favorable au contribuable. 

Si la notice contient une erreur, par exemple en indiquant un taux ou un abattement erroné, le contribuable ne peut pas s’en prévaloir pour réduire son impôt, d’autant moins si l’erreur est grossière, manifeste. En effet, l’Administration fiscale n’est pas liée par ses propres erreurs, et peut rectifier la déclaration du contribuable en se fondant sur les textes applicables. Le contribuable ne peut pas non plus invoquer le « principe de confiance légitime », car il lui appartient de vérifier la conformité de la notice aux textes en vigueur.

En revanche, si la notice contient une interprétation formelle favorable au contribuable, par exemple en admettant une déduction ou une exonération non prévue par les textes, le contribuable peut s’en prévaloir pour réduire son impôt. En effet, l’Administration fiscale est tenue par ses propres interprétations, et ne peut pas revenir sur celles-ci au détriment du contribuable. Le contribuable peut invoquer le principe de sécurité juridique, qui lui garantit le respect des règles établies par l’Administration. Lorsqu’un imprimé déclaratif et sa notice explicative comportent une interprétation formelle de la loi fiscale, les contribuables peuvent s’en prévaloir sur le fondement du second alinéa de l’article L. 80 A LPF (Livre des procédures fiscales). 

Selon ce texte « il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration ».

Il en est de même lorsque, dans le cadre d’un examen ou d’une vérification de comptabilité ou d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, et dès lors qu’elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l’administration a pris position sur les points du contrôle, y compris tacitement par une absence de rectification !

Distinction confirmée par le Conseil d’Etat

Cette distinction entre erreur et interprétation favorable est confirmée par la jurisprudence du Conseil d’État, qui a jugé à plusieurs reprises que la notice d’explication est opposable à l’Administration fiscale lorsqu’elle contient une interprétation libérale des textes fiscaux, mais pas lorsqu’elle contient une erreur matérielle (CE du 9 mars 2016, n° 375 996 ; CE du 27 juin 2018, n° 412 563).

Le Conseil d’État  a d’ailleurs récemment confirmé cette jurisprudence, en se prononçant  sur le caractère opposable du contenu de la notice explicative d’un formulaire de déclaration (CE, 9e-10e ch. réunies, 20 juin 2023, n° 462501) dans des circonstances précises et propres au cas de l’espèce, c’est-à-dire la documentation officielle qui était muette sur le retrait du Togo de la liste des pays concernés par un ancien « crédit d’impôt » dont se prévalait un couple de contribuables, constatant de surcroît que la déclaration et sa notice explicative n’avaient pas été mises à jour.

Le Conseil d’État rappelle qu’un formulaire de déclaration ou une notice explicative ne sont pas au nombre des instructions ou circulaires que publie l’administration fiscale pour faire connaître son interprétation des textes fiscaux.

Toutefois, il admet qu’il en aille différemment lorsque ces documents, mis à la disposition des contribuables sur son site internet ou sur demande, comportent une interprétation formelle de la loi fiscale, laquelle peut être invoquée sur le fondement des dispositions du second alinéa de l’article L. 80 A du Livre des procédures fiscales.

En l’espèce précitée, le Conseil d’État a admis que la notice explicative du formulaire déclaratif, renvoi qui était opéré dans la rubrique « TOGO – Dividendes du tableau C – Crédit d’impôt : taux applicables aux revenus nets de l’impôt prélevé à la source » de la déclaration, constituait bien une prise de position formelle, et qu’à ce titre, elle est bien opposable à l’administration.

Pour en venir à cette décision, la Haute Assemblée a jugé que la documentation officielle ne comportait aucune mention explicite du retrait, à compter de 1996, des dividendes de source togolaise du champ du crédit d’impôt dit « décote africaine » institué par la doctrine administrative, et que cette documentation officielle se bornait à ne plus mentionner le Togo dans la liste des pays concernés. Les Magistrats ont en outre relevé que le formulaire déclaratif en cause mentionnait, sans réserve ou précision particulière, le Togo au titre des pays concernés par cette mesure de faveur et se bornait à renvoyer, pour les dividendes de source togolaise, à la disposition relative à la formule de calcul du taux, de sa notice explicative, laquelle notice, malgré sa formule préliminaire spécifiant « qu’ elle ne se substituait pas à la documentation officielle de l’administration », indiquait immédiatement ensuite que le contribuable y trouverait « toutes les explications nécessaires ».

De ce fait, la Haute Assemblée en a conclu que « l’imprimé déclaratif et sa notice explicative devaient être regardés comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale dont les contribuables pouvaient se prévaloir sur le fondement du second alinéa de l’article L. 80 A du LPF ».

Conclusion

Une notice d’explication de formulaire de déclaration n’a pas de valeur juridique en tant que telle, mais elle peut être opposable à l’Administration fiscale dans certains cas, en particulier si elle contient une interprétation formelle de la loi fiscale favorable aux contribuables, qui peuvent alors s’en prévaloir. Il convient donc de vérifier attentivement son contenu et les ambiguïtés qu’elle peut éventuellement contenir, avant de remplir sa déclaration, et de se renseigner sur les textes applicables, en cas de doute.

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Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité

Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité

Dans la filière fiscale, je suis particulièrement compétent et formaté pour la fiscalité des entreprises et des particuliers, le contrôle fiscal et son assistance, les conseils aux entreprises et aux particuliers, le traitement des contentieux suite aux contrôles fiscaux, l'assistance aux vérifications de comptabilité informatisées (compétence informatique particulière dans le traitement des données), mais apte à défendre de la même manière un contrôle fiscal des particuliers (contrôle sur pièces, ou un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'ensemble; impositions directes locales: taxe d'habitation, taxes foncières), je suis également compétent dans une autre spécialité mal connue, y compris de beaucoup d'avocats, les évaluations domaniales de valeurs vénales et de valeurs locatives d'immeubles, évaluations des indemnisations en matière d'expropriations pour cause d'utilité publique, et leurs contentieux (au sein de l'Agence France Domaine en qualité de Chargé de mission, évaluateur et commissaire du gouvernement devant le Juge de l'expropriation et devant les SAFER).

Ma carrière administrative m'a valu d'exercer dans pratiquement tous les domaines du droit fiscal, y compris international, au sein de plusieurs Grandes Directions Nationales (ex-DSGI aujourd'hui DRESG ; DNVSF, en liaison avec Bercy, puis dans une Grande Direction Régionale de contrôles fiscaux, la DIRCOFI Centre-Val de Loire). 

Plus que mes compétences techniques très étendues, ma personnalité s'est toujours distinguée par une exigence de rigueur, mon adaptabilité, l'esprit d'analyse et de synthèse, le pragmatisme, la créativité, réactivité, curiosité, l'aisance relationnelle et en équipe, la vitesse de compréhension et d'exécution, le goût de l'initiative, des responsabilités et de la négociation. J'aurais pu par exemple intégrer un cabinet spécialisé, pour assurer la défense des intérêts des clients dans les domaines précités. J'aurais tout aussi bien pu travailler en "back office" en défense et recours des contribuables vérifiés, sur études des dossiers, ou les assister pendant les vérifications. Mes principaux hobbies sont : musique, art en général et littérature en particulier, étant auteur publié, et je suis également intéressé par l'activité de rédacteur.

Mes compétences fiscales et "para-fiscales" sont des plus étendues : juridiques (droit civil, fiscal et pénal découlant du fiscal, et droit de l'urbanisme + droit administratif, public et constitutionnel).

Aujourd'hui à la retraite, je reste actif en qualité d'auto-entrepreneur, en matière de conseils et défense en fiscalité des particuliers uniquement, et secondairement conseil dans les activités liées à l'écriture. Mon site web professionnel est https://www.cdjf-casav.com, où je réponds aux contribuables (ou écrivains) qui me sollicitent (mes tarifs et honoraires y sont clairement mentionnés).

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