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Article 774 bis du code général des impôts (CGI), quelle légalité ?

Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité Author expertise

L’administration fiscale a publié fin 2024 ses commentaires concernant une nouvelle disposition visant à supprimer la possibilité de déduire de l’actif successoral les sommes d’argent démembrées. La loi de finances pour 2024 a créé un nouvel article du Code général des impôts (CGI), l’article 774 bis, qui encadre et limite le quasi-usufruit de sommes d’argent permettant de réduire les droits de succession, et qui dispose que « ne sont pas déductibles de l’actif successoral les dettes de restitution exigibles qui portent sur une somme d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit ».

Quelle est la légalité de ce nouvel article du CGI, dans quelle mesure peut-il être contesté, et quels sont ses différents impacts juridiques et successoraux ? Ci-après, un résumé des principaux points concernant cet article, et les possibles critiques qu’il est susceptible d’engendrer.

Le contexte et le contenu de l’article 774 bis du CGI

L’article 774 bis du CGI a été introduit par la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024. Cet article stipule que les dettes de restitution exigibles portant sur une somme d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit ne sont pas déductibles de l’actif successoral. Il prévoit également des exceptions pour les dettes de restitution contractées sur le prix de cession d’un bien dont le défunt s’était réservé l’usufruit, sous réserve qu’il soit justifié que ces dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal.

Sur les critiques et la conformité juridique de ce nouvel article

– Il déroge aux « principes généraux du droit fiscal » :

l’article 774 bis introduit une dérogation à l’article 1133 du CGI, qui concerne la déductibilité des dettes dans le cadre des successions, et une telle dérogation pourrait être perçue comme une atteinte aux principes d’égalité devant l’impôt et de non-rétroactivité des lois fiscales, car elle modifie les règles de calcul de l’actif successoral de manière significative.

– Son « objectif principalement fiscal » :

la notion d’objectif principalement fiscal  pour justifier la non-déductibilité des dettes de restitution peut être critiquée pour son manque de clarté et de précision, cette notion subjective pouvant entraîner des interprétations divergentes et des contentieux devant les juridictions administratives.

– Sa possible non-conformité avec le droit civil :

l’article774 bis pourrait être contesté pour sa non-conformité avec les dispositions du Code civil, notamment avec les articles 757 et 1094-1 qui régissent les droits des usufruitiers et des nu-propriétaires. En effet, la non-déductibilité des dettes de restitution pourrait être perçue comme une atteinte aux droits des héritiers et des légataires.

– La jurisprudence et les précédents juridiques :

la jurisprudence administrative pourrait jouer un rôle crucial dans l’interprétation et l’application de cet article. Des décisions antérieures du Conseil d’État ou des cours administratives d’appel pourraient être invoquées pour contester la légalité de l’article 774 bis, notamment en matière de respect des principes constitutionnels et des droits fondamentaux des contribuables.

loi article 774

Les impacts juridiques et successoraux de l’article 774 bis du CGI

L’article 774 bis du CGI entraîne plusieurs conséquences pratiques importantes pour les successions. 

– Son impact sur l’évaluation de l’actif successoral

La non-déductibilité des dettes de restitution : les dettes de restitution exigibles portant sur une somme d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit ne sont plus déductibles de l’actif successoral, ce qui implique que la valeur de l’actif successoral sera plus élevée, entraînant potentiellement une augmentation des droits de succession à payer par les héritiers.

– Une complexité accrue pour les héritiers

Une exigence de justification des dettes : les héritiers devront prouver que les dettes de restitution contractées sur le prix de cession d’un bien dont le défunt s’était réservé l’usufruit n’ont pas été contractées dans un « objectif principalement fiscal ». Cette exigence de justification est donc susceptible de venir compliquer le processus de règlement de la succession et d’entraîner des délais supplémentaires.

– Des risques de contentieux

Dans l’interprétation et l’application de la notion d’ objectif principalement fiscal  :  cette notion est subjective et elle pourrait donner lieu à des interprétations divergentes. Cela pourrait entraîner des litiges entre les héritiers et l’administration fiscale, nécessitant des recours devant les juridictions administratives pour trancher les différends.

– Des répercussions financières plus ou moins importantes

L’augmentation des droits de succession : en augmentant la valeur de l’actif successoral, ce nouvel article du CGI peut entraîner une hausse des droits de succession à payer. Les héritiers pourraient alors se retrouver parfois dans une situation financière plus difficile, surtout si les dettes de restitution sont importantes.

– L’impact sur la planification successorale

Vers une révision des stratégies : les conseillers fiscaux et les notaires devront revoir les stratégies de planification successorale pour leurs clients afin de minimiser l’impact de cet article 774 bis du CGI. Cela pourrait inclure des ajustements dans la manière dont les biens sont transmis et les dettes sont gérées.

Conclusion

L’article 774 bis du CGI introduit des changements significatifs dans la manière dont les successions sont évaluées et gérées, avec des implications financières et administratives importantes pour les héritiers. Bien que créé pour renforcer la lutte contre l’évasion fiscale, il pourrait être critiqué pour ses dérogations aux principes généraux du droit fiscal, son manque de clarté, et sa possible non-conformité avec le droit civil. 

Ces éléments pourraient constituer des bases solides pour des contestations futures devant les juridictions administratives.

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Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité

Didier Brochon Rédacteur Expert en Fiscalité

Dans la filière fiscale, je suis particulièrement compétent et formaté pour la fiscalité des entreprises et des particuliers, le contrôle fiscal et son assistance, les conseils aux entreprises et aux particuliers, le traitement des contentieux suite aux contrôles fiscaux, l'assistance aux vérifications de comptabilité informatisées (compétence informatique particulière dans le traitement des données), mais apte à défendre de la même manière un contrôle fiscal des particuliers (contrôle sur pièces, ou un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'ensemble; impositions directes locales: taxe d'habitation, taxes foncières), je suis également compétent dans une autre spécialité mal connue, y compris de beaucoup d'avocats, les évaluations domaniales de valeurs vénales et de valeurs locatives d'immeubles, évaluations des indemnisations en matière d'expropriations pour cause d'utilité publique, et leurs contentieux (au sein de l'Agence France Domaine en qualité de Chargé de mission, évaluateur et commissaire du gouvernement devant le Juge de l'expropriation et devant les SAFER).

Ma carrière administrative m'a valu d'exercer dans pratiquement tous les domaines du droit fiscal, y compris international, au sein de plusieurs Grandes Directions Nationales (ex-DSGI aujourd'hui DRESG ; DNVSF, en liaison avec Bercy, puis dans une Grande Direction Régionale de contrôles fiscaux, la DIRCOFI Centre-Val de Loire). 

Plus que mes compétences techniques très étendues, ma personnalité s'est toujours distinguée par une exigence de rigueur, mon adaptabilité, l'esprit d'analyse et de synthèse, le pragmatisme, la créativité, réactivité, curiosité, l'aisance relationnelle et en équipe, la vitesse de compréhension et d'exécution, le goût de l'initiative, des responsabilités et de la négociation. J'aurais pu par exemple intégrer un cabinet spécialisé, pour assurer la défense des intérêts des clients dans les domaines précités. J'aurais tout aussi bien pu travailler en "back office" en défense et recours des contribuables vérifiés, sur études des dossiers, ou les assister pendant les vérifications. Mes principaux hobbies sont : musique, art en général et littérature en particulier, étant auteur publié, et je suis également intéressé par l'activité de rédacteur.

Mes compétences fiscales et "para-fiscales" sont des plus étendues : juridiques (droit civil, fiscal et pénal découlant du fiscal, et droit de l'urbanisme + droit administratif, public et constitutionnel).

Aujourd'hui à la retraite, je reste actif en qualité d'auto-entrepreneur, en matière de conseils et défense en fiscalité des particuliers uniquement, et secondairement conseil dans les activités liées à l'écriture. Mon site web professionnel est https://www.cdjf-casav.com, où je réponds aux contribuables (ou écrivains) qui me sollicitent (mes tarifs et honoraires y sont clairement mentionnés).

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