Entretien avec Docteur Jean-Claude Marian, Président directeur général d’Orpea

Boursier.com : Vous venez d’annoncer une évolution du périmètre d’Orpea…

J-C. M. : Nous venons effectivement d’annoncer des acquisitions et autorisations complémentaires pour 760 lits qui portent le total de lits du groupe à 33.700, qui sont donc répartis à 85% en France et 15% en Italie, Belgique, Espagne et en Suisse.

Boursier.com : Quel est votre objectif pour la fin d’année et à moyen terme en termes de nombre de lits ?

J-C.M. : Nous venons de réaliser une opération de croissance externe importante de 5.000 lits et avons, en une seule opération, acquis un nombre de lits proche de celui que nous acquérons habituellement en deux ans, puisque le rythme traditionnel est d’environ 3.000 lits de plus tous les ans.

Boursier.com : Vous avez pris de l’avance dans le domaine de la croissance externe, serez-vous donc moins actifs en la matière dans les prochains mois?

J-C.M. : En 2011, nous procèderons à des acquisitions sélectives, l’objectif étant toujours d’avoir 3.000 lits de plus par an. Nous venons de prendre un peu d’avance et cela nous permet d’annoncer, pour 2011, un objectif de chiffre d’affaires de 1,21 Milliard d’Euros, soit une augmentation de 26% par rapport aux 964 ME réalisés en 2010. Notre schéma reste toujours de nous développer de façon active, avec des établissements de qualité, dans des endroits de qualité. Nous allons ouvrir 2.000 lits dans les 12 mois qui viennent et engager entre 1.200 et 1.400 collaborateurs supplémentaires.

Boursier.com : La croissance organique reste aussi très élevée, 8% encore en 2010…

J-C.M. : Absolument ! Elle résulte de la mise en oeuvre d’autorisations que nous avons obtenues et de la montée en charge : nous disposons d’un réservoir de 9.000 lits en construction ou restructuration et tout ceci crée un processus de croissance organique forte, en plus de nos acquisitions.

Boursier.com : L’intégration de Mediter se déroule t-elle conformément à vos attentes?

J-C.M. : Tout à fait ! Les groupes acquis sont sur les mêmes métiers que nous, avec les mêmes principes, donc l’intégration se fait de façon harmonieuse. Nous mettons en place des procédures communes. Orpea apporte ses services de « Siège » : formation permanente, services de comptabilité, d’audit, de contrôle qualité. Avec les 5.000 lits acquis et les 9.000 lits que nous allons ouvrir dans les 3 à 4 ans qui viennent, il était nécessaire d’être proactifs et d’adapter encore plus notre organisation avec un renforcement de nos structures d’encadrement et de management.

Boursier.com : Quelle est la rentabilité de Mediter?

J-C.M. : Mediter, ainsi que les groupes acquis récemment, disposaient de lits en cours d’ouverture ou avec des autorisations de construction en cours. Le schéma n’est pas celui d’une société à maturité, c’est pour cela que nous expliquons que cette acquisition sera très fortement relutive dans 2 à 3 ans, mais qu’actuellement sa rentabilité est techniquement inférieure.

Boursier.com : Cela va-t-il peser sur la rentabilité d’Orpea à court terme ?

J-C.M. : Ca ne pèsera pas, l’effet sera neutre.

Boursier.com : Sans dévoiler les comptes annuels que vous publierez le 30 mars prochain, quelle tendance pouvez-vous donner ?

J-C.M. : Nous sommes extrêmement confiants : ils seront dans la lignée de ceux que nous avons annoncés lors du premier semestre. Notre métier nous permet d’afficher une visibilité forte avec des taux d’occupation élevés. Dans tous les établissements matures, nous affichons un taux d’occupation de 95%, nous sommes donc confiants quant à notre capacité à être dans la lignée des résultats publiés à l’issue du premier semestre. Y compris dans les années qui viennent puisque le nombre d’établissements arrivant à maturité est de plus en plus important, ce qui nous permet d’assumer encore plus facilement le coût du développement.

Boursier.com : Pouvez-vous commenter l’évolution de l’activité du premier semestre ?

J.-C.M. : Nous sommes très satisfaits. Notre chiffre d’affaires a progressé de 16,3%. En outre il est passé de 404 millions au premier semestre 2009 à 470 millions au premier semestre 2010. Cela témoigne de la montée en charge progressive des établissements que nous ouvrons successivement ainsi que de ceux ouverts l’année dernière et qui arrivent à maturité. Je rappelle que nous possédons 9.000 lits en construction-restructuration lourde qui vont s’ouvrir progressivement. Cela nous permet d’être très confiants sur l’annonce d’un chiffre d’affaires d’1,1 milliard pour 2011 et 1,225 milliard pour 2012.

Boursier.com : La rentabilité sera-t-elle au rendez-vous ?

J.-C.M. : Nous sommes tout à fait confiants sur le maintien d’une rentabilité homogène étant donné que nous arrivons à assumer le poids d’un développement coûteux. D’ailleurs le pourcentage des établissements arrivés à maturité est de plus en plus important par rapport à ceux qui sont en développement.

Boursier.com : Pour le moment l’international ne représente que 10% des facturations de l’entreprise, ce qui reste assez faible. Comptez-vous le développer ?

J.-C.M. : Nous avons de solides ambitions car nous considérons que la Belgique, l’Italie, l’Espagne sont des pays où il existe des besoins considérables du fait du retard de démarrage du secteur privé commercial. Notre ambition est d’arriver à environ 3.000 lits dans chacun de ces pays dans les deux à trois ans avec la possibilité d’obtenir de nouvelles autorisations de créations dans ces divers pays.

Boursier.com Les mesures d’austérité prises en Europe pourraient-elles avoir des répercussions sur votre activité ?

J.-C.M. : Nous ne pensons pas. Rappelons que dans le secteur d’activité des maisons de retraite, la partie payée par l’assurance maladie et les conseils généraux est un simple remboursement -de l’activité des aides soignants, infirmiers, auxiliaires de vie- et non un prix de journée avec une marge bénéficiaire. Nous ne pouvons donc pas imaginer un arrêt des remboursements de soins… Par ailleurs, les personnes que nous prenons en charge sont très dépendantes, nous répondons à un besoin de tous les jours. C’est pourquoi malgré une évolution économique difficile ces dernières années, le secteur a maintenu des taux d’occupation très élevés, y compris en Espagne où la crise se fait d’autant plus ressentir.

Boursier.com : Vous êtes un actionnaire important d’Orpéa. Comment voyez-vous évoluer la structure capitalistique de l’entreprise ?

J.-C.M. : Nous n’avons pas de plan précis. En tout cas nous n’avons aucun besoin d’adossement de l’entreprise à une structure plus importante. L’année dernière nous avons réalisé une émission d’OBSAAR de 217 millions et une augmentation de capital de 64 millions. Nous disposons donc de moyens financiers suffisants d’autant plus que le marché apprécie le secteur et accepte de nous fournir volontiers les financements dont nous avons besoin.

Boursier.com : Comment se répartit la progression de votre activité lors du premier semestre ?

J.C.M. : Cette progression correspond de manière globale à une augmentation de notre activité, tant dans les maisons de retraite que dans notre activité de cliniques de moyen séjour et de psychiatrie… C’est légèrement plus important à l’étranger, puisque nous partons d’une base moins haute. Mais, même en France, nous avons une augmentation d’activité qui est importante, puisqu’elle est de plus de 20%.

Boursier.com : Du coup, vous relevez votre objectif de chiffre d’affaires cette année…

J.C.M. : Nous considérons que nous devrions atteindre un chiffre d’affaires de l’ordre de 830 Millions d’Euros, au lieu de notre objectif initial de 820 ME.

Boursier.com : Pour l’activité à l’horizon 2011, visez-vous toujours la barre du Milliard d’Euros ?

J.C.M. : Nous sommes confiants pour estimer que nous devrions pouvoir avoir un chiffre d’affaires sensiblement supérieur à 1 Milliard d’Euros en 2011.

Boursier.com : Vous parlez de « solide rentabilité » attendue cette année… Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

J.C.M. : C’est toujours un petit peu similaire… Nous avons une rentabilité opérationnelle qui reste solide, puisque nous pouvons estimer qu’elle sera similaire à celle que nous avons eue les dernières années, autour de 13% de rentabilité opérationnelle.

Boursier.com : Dans la foulée de ces annonces, vous avez publié un communiqué concernant un placement obligataire de 217 ME sous la forme d’OBSAAR. Pourquoi cette opération ?

J.C.M. : Tout simplement, cette opération nous permet, d’une part, d’optimiser une partie de notre endettement avec une possibilité de financement à moyen terme, avec une durée moyenne d’environ 5 ans à un coût très bas, puisque le taux Euribor 3 mois est de +1,37%. Le principe de l’OBSAAR représente, à terme dans 6 ans, une éventuelle dilution limitée de l’ordre de 3,3%. Tout ceci nous permet d’accroître notre flexibilité financière, de disposer de ressources complémentaires de l’ordre de 70 ME pour continuer notre développement, tout en restant à un développement prudent et très maîtrisé…