La France fait face depuis plusieurs mois à un risque de crise économique, sociale et sociétale que représente celle du « pouvoir de se loger » à laquelle font face de plus en plus de Français, et au risque de pertes d’emplois massifs dans ce secteur. Le logement constitue un bien primordial qui touche au pouvoir d’achat, à la santé, à la qualité de vie, à la possibilité d’avoir un emploi ou non, et aux territoires, et il ne pourra jamais y avoir de plein-emploi si les salariés ne peuvent plus se loger convenablement et aisément.
Or c’est ce qu’il se passe dans le pays, ce qui vaut aux principaux acteurs et représentants du bâtiment, de l’habitat, de l’immobilier, d’alerter E. Macron dans une lettre ouverte qui lui a été adressée, dans laquelle ils lui réclament de faire preuve d’urgence « d’une volonté présidentielle claire et ambitieuse, ainsi que d’annoncer des mesures chiffrées » , sorte d’électrochoc pour sortir de cette crise. Comme le dit l’adage : « quand le bâtiment va, tout va ». Mais quelle est donc cette crise, et quelles en sont les causes ?
Des causes multiples à la crise immobilière :
- Macron l’a lui-même reconnu dans une interview donnée dans le magazine Challenges, il y a une crise multi-factorielle du logement dans notre pays, et il convient donc d’aller beaucoup plus loin dans les efforts (de l’État) à faire.
Les biens immobiliers sont ceux parmi les plus taxés :
Les propriétaires de biens immobiliers locatifs sont parmi les plus lourdement imposés :
- à l’acquisition du bien (droits d’enregistrement : droits de mutation, ou de succession)
- pendant leur détention : taxe foncière sur les propriétés bâties notamment, entre autres impositions
- à la revente du bien : si plus-value de cession immobilière, taxation de celle-ci (après abattements pour durée de détention), à l’impôt sur le revenu au taux de 19% auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux au taux de 17,20%
et durant la vie de l’immeuble, les propriétaires doivent répondre financièrement à de multiples demandes, d’entretien, de réfection mais aussi de plus en plus souvent de « conformité » aux diverses normes qui ne cessent d’évoluer, surtout en matière énergétique, ce qui souvent dans des immeubles collectifs ou de vieux immeubles, peut entraîner des coûts faramineux et plutôt dissuasifs et donc, contre-productifs !
La chute des prix de l’immobilier :
Depuis plusieurs mois le marché immobilier est « baissier », tandis que de nouvelles normes DPE (sur la « rénovation énergétique ») contraignent les investisseurs dans le secteur du « locatif » à des dépenses gigantesques et parfois même irréalisables pour les raisons développées infra, pour pouvoir conserver le droit de mettre leur logement en location ! La perspective de la valeur de revente du bien en chute libre, et des coûts parfois monstrueux de leur remise en état, quelque fois pour juste changer le classement du logement d’une lettre, ce qui resterait insuffisant pour le relouer au regard de la loi, fait très souvent renoncer les propriétaires à engager les travaux nécessaires. Ce sont donc autant de biens immobiliers qui vont rester en l’état – non loués – alors que la demande de logements explose : 100 000 nouvelles demandes en an dans le logement social !
Des contraintes normatives trop importantes :
Le nouveau « DPE » en matière de « rénovation énergétique » et de « lutte contre les passoires thermiques » fait qu’un logement qui n’est pas classé « A », « B », « C » ou « D » est condamné – à terme – variable suivant les lettres « E », « F » ou « G », à ne plus pouvoir être donné en location du tout ! Cela concerne dans les villes moyennes et les grandes villes, les derniers étages d’immeubles (souvent d’anciennes chambres de bonnes, transformées en studettes ou studios) ainsi que leurs rez de chaussée quand les sous-sols des immeubles ont été mal isolés. Or il existe de nombreuses réticences, impossibilités et blocages autres, au niveau de l’obligation faite aux propriétaires d’améliorer le classement de leurs logements afin de les rendre de nouveau « habitables » c’est-à-dire : faire qu’ils se trouvent classés dans l’une des quatre premières catégories.
De nombreuses impossibilités et blocages autres, aux travaux de rénovation énergétique:
de l’avis même de tous les professionnels de la restauration et de l’amélioration de l’habitat, il est quasiment impossible la plupart du temps d’espérer pouvoir faire passer un immeuble de la classe « G » à la classe « D » pour de nombreuses raisons purement techniques (parois trop minces pour recevoir une isolation thermique de l’extérieur ; derniers étages d’immeubles trop exigüs ou encore à plusieurs parois) : tout au plus les propriétaires peuvent-ils espérer voir leurs biens passer de « G » à « F » ou, au mieux, à « E » ce qui les condamne de toute manière à ne pas pouvoir les relouer : en pareil cas, les propriétaires concernés n’engageront évidemment pas de travaux et le bien restera en l’état, donc non-loué !
– la copropriété : un juge ne pourra pas ordonner d’engager des travaux si le copropriétaire bailleur démontre à la fois que :
– malgré ses diligences à faire examiner en assemblée générale (AG) des résolutions tendant à la réalisation de travaux de rénovation énergétique dans les parties communes (isolation de la toiture, des murs par l’extérieur, etc.), il n’est pas parvenu au niveau requis pour atteindre la décence (article 20-1 al. 5 du 6 juillet 1989), et s’il produit une résolution détaillée visant à faire engager ces travaux, rejetée par l’AG ;
– les travaux mis en œuvre dans ces parties privatives (isolation des murs par l’intérieur, des menuiseries, VMC…) n’ont pas pu être effectués ou sont restés infructueux.
Les contraintes architecturales :
lorsque l’interdiction de louer des propriétés classées « G » entrera en vigueur au1er janvier 2025, les propriétaires pourront demander aux juges de ne pas ordonner la réalisation des travaux susceptibles de représenter un danger pathologique du bâti du bâtiment rénové. Le Conseil national de l’Habitat (CNH) pense que ce serait un risque particulièrement lié aux enceintes et revêtements de structures ou de bâtiments, dont l’isolation par l’extérieur de certaines façades.
Les contraintes visant certains biens :
un décret examiné au sein du CNH mentionne les types d’immeubles pour lesquels un juge ne pourra pas ordonner la mise en œuvre de travaux de rénovation énergétique, quand ceux-ci menaceront de modifier l’état des parties extérieures ou des éléments d’architecture ou de décoration du bâtiment.
On pense naturellement aux immeubles protégés au titre des monuments historiques, ou pour lequel les travaux doivent recueillir l’accord de l’Architecte en Chef des Monuments historiques, ou qui sont situés dans leur périmètre ; aux immeubles classés ; à ceux identifiés comme présentant un intérêt patrimonial dans le cadre d’un plan local d’urbanisme (PLU).
Une lettre ouverte au président de la République :
Ses signataires font valoir que l’habitat est un « formidable moteur » pour l’économie, mais également un fort risque de destructions d’emplois si rien n’est fait, ainsi que d’une pénurie d’offres de logements pour les Français, qui concernera aussi les logements sociaux dont 54 % sont réalisés par les promoteurs immobiliers.
Ils alertent aussi sur la « rénovation énergétique », et sur les multiples obstacles qui se dressent face à la volonté gouvernementale d’assainir le parc immobilier et d’éradiquer rapidement les « passoires thermiques ». « Les moyens doivent être à la hauteur des enjeux et des ressources des ménages » ont-ils écrit dans cette lettre-ouverte.
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