C’est par l’intermédiaire de l’irlandaise Mairead McGuiness que l’Europe fait un appel du pied aux législateurs américains. En mettant en avant, la nécessité absolue d’une règlementation à l’échelle planétaire.
La règlementation doit être mondiale pour fonctionner
C’est en partant de ce postulat que l’Europe formule sa demande de règlementation auprès des États-Unis. Par l’intermédiaire de Mairead McGuiness, commissaire aux services financiers de la Commission Européenne, l’Europe fait savoir qu’elle n’appréhende la règlementation qu’au niveau mondial. Il en va de son efficacité.
Nous avons besoin de voir d’autres acteurs légiférer également.[…] Peut-être différemment, mais avec le même objectif. Nous devons envisager une réglementation mondiale des crypto-monnaies.
Sur ce point, la ligne défendue par McGuiness est dans la stricte lignée des recommandations du Conseil de stabilité financière. La semaine dernière, le groupement économique appelait déjà à la mise en place d’un cadre mondial pour la règlementation des actifs numériques. Dans le passé, des revendications similaires avaient aussi été entendues. Pour exhorter les législateurs du pays de l’Oncle Sam à légiférer sur Bitcoin et les altcoins, la responsable des services financiers de l’Union Européenne a agité le même talisman : la menace pour la stabilité financière si le secteur des actifs numériques venait à se développer sans contrôle.
Cette demande intervient une semaine après l’approbation du texte de loi MiCA, devant le Conseil de l’Union Européenne le 5 octobre dernier puis devant la Commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen la semaine suivante. Le texte de loi prévoit de redéfinir le statut et l’utilisation des stablecoins mais aussi de renforcer les droits des consommateurs face aux prestataires de services sur actifs numériques.
L’effet Bruxelles va-t-il à nouveau faire effet ?
Théorisé par le professeur américain Anu Bradford, l’effet Bruxelles consiste à attribuer à l’Union Européenne, le rôle de déclencheur d’une règlementation au niveau mondial. En règle générale, l’effet Bruxelles passe par 3 phases distinctes :
- Phase 1 : Mise en place d’une directive européenne
- Phase 2 : La directive européenne devient une règlementation
- Phase 3 : Cette règlementation permet l’élaboration d’un cadre à l’échelle mondiale
Si MiCA doit être adopté et entrer en vigueur pour 2024, l’Europe semble avoir un temps d’avance sur la question de la règlementation. Et pourrait à nouveau enclencher un mouvement règlementaire à l’échelle mondiale. Lors de son voyage à Washington ou elle a rencontré des politiciens au cœur des négociations sur les actifs numériques, la commissaire irlandaise s’est dite ravie de constater que les politiques américaines allaient dans le même sens que celles de l’UE.
Le cadre légal américain pourrait rapidement s’épaissir !
Si les États-Unis semblent avoir adopté une posture moins conservatrice que l’Europe, l’Oncle Sam est actif sur les problématiques de règlementation. En mars dernier, Joe Biden émettait un décret pour les actifs numériques. Ce décret a donné lieu en juillet dernier à la publication d’un cadre de travail donnant des pistes pour développer et mieux encadrer les actifs numériques.
Si la SEC (Securities and Exchange Commission) est active et particulièrement agressive avec les exchanges comme la plateforme Binance, les pièces sont quant à elle très peu contrôlée. À l’exception notable de Ripple et du token XRP…
Quoi qu’il en soit, les États-Unis continuent évidemment de garder un œil attentif au secteur. D’ici quelques semaines, le pays pourrait adopter le Stablecoin Transparency Act, un texte visant à clarifier le rôle et l’usage des stablecoins. Si l’on en croit les dires de l’homme d’affaires Kevin O’Leary, ce texte devrait être largement soutenu par les démocrates comme les républicains. Selon lui, la règlementation est le prix à payer pour voir Bitcoin retrouver les sommets.
Mais pour beaucoup de personnes directement impliquées dans les négociations au Congrès, celles-ci sont encore loin d’être terminées. Notamment sur la question centrale des stablecoins. Malgré la déclaration des membres du Congrès, précisant que la règlementation des monnaies stables était une priorité absolue, il semblerait que les modalités règlementaires fassent encore largement débat. Si l’épisode Terra et ses 40 milliards de dollars de perte a laissé des traces, les États-Unis semblent continuer de tâtonner du point de vue de la législation.
Les questions sur la classification des actifs numériques comme valeurs mobilières sont encore plus éloignées d’un consensus.