Notre système fiscal, l’un des plus complexes du monde (son code général des impôts, créé en 1950 et qui alors ne faisait qu’un petit livret, et qui de nos jours couvre quelques 1 700 pages, sans compter le Livre des Procédures Fiscales), souvent incompris dans un pays où chaque exception donne lieu à une application différente d’une même loi, et qui n’est plus qu’un « millefeuilles », ou empilement de lois, décrets, instructions, jurisprudences – civiles et administratives – peine chacun le voit bien, à remplir aujourd’hui les « missions » qui lui sont demandées, plus exactement à satisfaire les « besoins », de plus en plus nombreux, de plus en plus grands, de plus en plus urgents, que réclame l’action éminemment présente aujourd’hui dans nos vies de l’Etat- cet Etat-providence.
Championne du monde toutes catégories en matière de prélèvements obligatoires (qui ne comprennent donc pas que les impôts), la France a atteint aujourd’hui et même dépassé le seuil maximum supportable (par les contribuables), de sorte que sa fiscalité n’est plus acceptée, et que le « principe du consentement à l’impôt », pilier central de la démocratie représentative, est plutôt mis à mal…
Là pourrait donc être l’occasion de redonner confiance à nos concitoyens dans leurs « services publics » et dans leur système fiscal ! Mais comment ? En « faisant table-rase » de tout, et en repartant de zéro ? Pas nécessairement ! On peut ainsi avancer quelques pistes de réflexion…
La TVA
C’est un impôt de consommation, créé en 1954, qui est acquitté par tous les consommateurs, et ce, dans tous les Etats membres de l’Union Européenne, même s’il existe de petites différences de taux, qui tendent au fil du temps à disparaître, tandis qu’à peu près partout il existe au moins un taux « normal », un taux « réduit », voire un taux « super-réduit ». Cet impôt indirect alimente bon an mal an le budget de l’Etat à hauteur de 47% de ses recettes, ce qui n’est pas rien et en fait « l’impôt » numéro 1 !
Il ne saurait être question de supprimer la TVA ou d’en supprimer un « taux » ou de diminuer ceux-ci drastiquement, pour la bonne raison que dans ce domaine, la France n’est pas libre de pratiquer de telles modifications sans que les autres Etats membres ne l’approuvent, car agir de cette manière fausserait la concurrence ce qui est interdit. Mais notre pays pourrait poursuivre ses efforts – déjà commencés – afin de ramener la France au rang des principaux autres Etats, par les « taux » de taxation, pour une meilleure harmonie, et sans que cela ne grève par trop son budget !
Les nouvelles technologies, le développement de « l’e-commerce » et la nécessaire adaptation de notre système fiscal
Chacun l’a bien vu avec les plateformes collaboratives, et les grandes chaînes de vente sur Internet (Google, Amazon, Facebook, AirBnb, Leboncoin,etc) et la tentative de taxation (« taxe GAFA ») suspendue en attendant des propositions basées sur un modèle OCDE et qui soient acceptables par toutes les parties et tous les pays, des milliards d’euros – même et surtout en cette période de pandémie et de ralentissement du commerce traditionnel, échappent à l’impôt en France ou n’y sont pas suffisamment taxés, faussant là aussi le jeu de la concurrence.
Or cet hypothétique « accord » – remis aux Calendes grecques pour cause de crise sanitaire majeure partout en Europe et dans le Monde, chacun voit bien qu’il sera difficile à obtenir, tant les groupes visés par cette « taxe GAFA » sont puissants ! Ne serait-il pas plus opportun de fixer une « taxe sur les paiements électroniques », puisqu’aujourd’hui par exemple en France, près de 70% des consommateurs règlent leurs achats et transactions par voie électronique, environ 25% via des plateformes comme PayPal, les autres par virements ou, plus rares, par chèques bancaires ?
Une « taxe sur les paiements électroniques »
Préconisée par certains, comme Frédéric Douet, professeur de droit fiscal à l’université Rouen-Normandie et expert à l’Institut Sapiens, une « taxe » (dont le taux pourrait être de 0, 05% ou de 0,10%) pourrait ainsi de façon indolore et sans que les consommateurs aient à y penser – comme pour la TVA, ou encore la TICPE sur les carburants – pourrait venir compenser cette « taxe GAFA » bien mal engagée.
Un prélèvement unique selon trois « tranches » de revenus
Idée avancée par ce même professeur, une contribution assise sur le revenu brut avec disparition de toutes niches fiscales (dont l’utilité et l’efficacité économique a d’ailleurs souvent été contestée, par la Cour des Comptes ou par d’autres voix), pourrait avantageusement et par son rendement, être à la fois être « équitable » parce que tenant compte d’une certaine progressivité, et remplacer l’actuel impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés, la CSG, CRDS etc.
Un taux de « 0 » (zéro) % pourrait être défini jusqu’à 1 900 à 2 000 euros de revenus bruts mensuels, et si l’on calque le barème actuel de l’impôt sur le revenu, une seconde tranche pourrait être taxée à 14% [*] pour des revenus bruts mensuels compris entre 1 901 euros bruts et 5 000 euros, puis une dernière tranche serait taxée à 30% pour les revenus bruts mensuels supérieurs à 5 000 euros bruts par mois. 55% des Français gagnent moins de 1 900 euros par mois, 40% gagnent entre 2 000 et 5 000 euros par mois, et 5% gagnent au-delà.
Environ 14 millions de foyers ne paieraient pas cette « contribution unique ». On assisterait donc à un énorme regain de pouvoir d’achat, d’autant que la suppression de l’impôt sur les sociétés d’une part donnerait des « marges de manœuvre et de compétitivité importantes à nos entreprises – qui pourraient également recruter et augmenter les rémunérations, et que d’autre part la disparition de l’impôt sur le revenu et des CSG, CRDS, également « boosteraient » les salaires autant que le pouvoir d’achat des Français, redynamisant toute l’économie et la rendant compétitive ! De quoi réconcilier les Français avec l’impôt !
[*] les montants et chiffres ne sont pas ceux proposés par M. Frédéric Douet dans son article publié le 2 avril 2020 par l’Institut Sapiens.