Le « choc de simplification » : une priorité gouvernementale
Défendu par le Président F. Hollande en mars 2013 pour libérer les entreprises, les alléger et favoriser leur compétitivité, que reste-t-il quatre ans après des mesures prises ? En effet, quels sont les effets obtenus de la méthode mise alors en place, la simplification coproduite avec les entreprises, avec la création en janvier 2014 du Conseil de la Simplification pour les Entreprises ? Qu’a-t-il résulté de concret, de tangible, des 290 mesures de simplification proposées ?
Des résultats très contrastés…
Sous l’impulsion du SGMAP, le Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, 210 mesures pour simplifier la vie des particuliers ont été annoncées depuis 2013,dont la moitié est déjà effective. En 2016 ce sont presque 4 millions ½ de démarches en ligne qui ont été effectuées sur le site « service-public.fr », et l’on sait que le site www.impots.gouv.fr remporte un grand succès de fréquentation, avec 39% des contribuables qui ont déclaré leurs revenus en ligne (rappelons que la déclaration en ligne sera progressivement généralisée obligatoirement, entre 2016 et 2019). Egalement, le ministère de la Justice met au point un portail très complet qui permettra au justiciable, en 2021, de saisir la justice en ligne, et de suivre la procédure, sur internet. Mais en est-il de même des entreprises et de leurs rapports avec l’administration ?
Une délégation sénatoriale aux entreprises vient de publier un rapport dressant le bilan contrasté du « choc de simplification », estimant que le Conseil de la Simplification pour les Entreprises a multiplié les mesures inefficaces, quand elles n’ont pas été franchement contradictoires, voire contre-productives. La « simplification » pour libérer les entreprises, nécessité reconnue dès les années 2000, a constitué une priorité affichée, pour des résultats sommes toutes minimes. Cette nécessité fait suite à un emballement du droit, qui a des répercussions en termes de compétitivité et d’emplois :
- instabilité du droit, liée à des lois plus longues et des ordonnances plus nombreuses ;
- insécurité juridique croissante en raison de la densité du maquis réglementaire et de revirements jurisprudentiels ;
- obligations souvent plus strictes pour les entreprises françaises que pour leurs concurrentes, européennes ou non.
Un rapport qui cible le mal et propose de vraies solutions efficaces
Le rapport parlementaire s’est attaché à chiffrer méthodiquement la charge administrative qui pèse sur les entreprises afin de les alléger réellement. Cette charge administrative était estimée à 60 milliards d’euros en 2010 par
l’ Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), avec une incidence sur les emplois. Intitulé « Simplifier efficacement pour libérer les entreprises », le rapport parlementa ire apporte de vraies pistes pour libérer les entreprises et accroître leur compétitivité, la simplification devant être conçue et vécue comme un « processus de qualité » qui interagisse directement sur la compétitivité.
On change de méthode…
Le rapport sénatorial du 20 février 2017 préconise en effet un changement de méthode radical, consistant schématiquement à :
- faire du soutien à la compétitivité une priorité politique ;
- se fixer des objectifs de réduction nette de la charge administrative supportée par les entreprises ;
- simplifier le stock de règles qui leurs sont applicables en comparant leur efficacité avec les États voisins ;
- rapprocher la culture politico-administrative des besoins des entreprises ;
- mieux légiférer pour freiner le flux de textes, notamment en associant les entreprises à l’élaboration de la loi et en faisant de l’étude d’impact préalable un outil de qualité de la norme, soumis à la contre-expertise publique d’un conseil indépendant du Gouvernement.
Plus concrètement, la méthode préconisée par les sénateurs consiste à :
1
- faire de la simplification un objectif au service de la compétitivité et favoriser son appropriation politique et administrative ;
- faire de l’étude d’impact un outil de qualité de la norme ;
- fixer des objectifs chiffrés en matière d’allègement des charges administratives pour les entreprises ;
- poser des principes encadrant le recours à la loi pour légiférer moins et mieux à destination des entreprises.
2
- alléger le droit, des normes devenues obsolètes ;
- revoir la réglementation française en comparant sa performance avec celle des états voisins au regard des objectifs communs d’intérêt général ;
- rendre visibles les diverses sources de complexités et réévaluer leur nécessité ;
- comparer la performance des réglementations nationales en Europe au regard d’objectifs partagés.
3
- orienter l’administration vers une mission de services aux entreprises et la sécurisation de l’environnement juridique des entreprises ;
- libérer et responsabiliser les entreprises, en promouvant une régulation par objectif et non par moyen, et en privilégiant la confiance a priori, assortie de contrôles renforcés a posteriori ;
- privilégier l’échelon européen pour réglementer la vie des entreprises, en prenant mieux en compte l’agenda européen en matière de réglementation applicable aux entreprises, et en faisant de la négociation des directives européennes une exigence, également en interdisant les sur-transpositions.
4
- associer les entreprises à l’élaboration des projets de loi, par une meilleure consultation des entreprises en amont, par l’enrichissement des études d’impact et l’élargissement de leur périmètre, par la transformation du Conseil de la Simplification pour les Entreprises en lui confiant mission de contrôler la qualité des études d’impact ;
- améliorer davantage la procédure législative, en organisant un débat d’orientation préalable, en endiguant le gonflement des textes au cours de leur examen parlementaire, et en installant une culture de l’évaluation préalable au Parlement ;
- contrôler l’efficacité des lois mises en œuvre, en améliorant le contrôle du législateur sur la proportionnalité et l’adéquation des règlements d’application au regard des lois, et en développant l’évaluation ex- post des lois.
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