Le phénomène est présent depuis le mois d’Octobre. Si l’épisode de crise sanitaire avait eu pour effet une légère augmentation des taux d’intérêts sur les prêts immobiliers, le phénomène s’inverse depuis plusieurs semaines. Réelles opportunités d’achats immobiliers ? Nous verrons que cela est plus compliqué qu’il n’y parait et que d’autres paramètres limitent encore l’accès au crédit.
Quelle est la réalité du marché et comment expliquer cette baisse des taux ?
La baisse des taux sur les prêts immobiliers s’explique via différents paramètres. En premier lieu par les taux d’intérêts toujours négatifs sur les OAT (obligations assimilables du Trésor) mais aussi par le biais d’une injection massive de liquidité par les banques centrales. Ces deux conditions permettent aux banques commerciales d’emprunter auprès de la Banque Centrale Européenne (BCE), à des taux extrêmement compétitifs. Et de facto, elles peuvent ensuite proposer des taux bas aux emprunteurs.
L’agence Empruntis a par ailleurs cherché à cartographier l’évolution des taux d’intérêts sur les emprunts immobiliers pour les « taux minis », réservés aux meilleurs profils. Pour cette cartographie, l’agence a divisé la France en 7 régions et pris en compte 5 durées d’emprunt. Pour un total de 35 taux analysés. De cette étude sur le mois d’Octobre, il en ressort les résultats suivants :
- 21 taux ont reculés (de 0,01 à 0,4 %)
- 13 sont restés stables sur la période
- 1 taux a augmenté
Aujourd’hui, les taux observés sont les suivants :
Durée de l’emprunt | Meilleur taux constaté | Taux moyen constaté |
7 ans | 0,4 % | 0,75 % |
10 ans | 0,5 % | 0,85 % |
15 ans | 0,58 % | 1,05 % |
20 ans | 0,84 % | 1,25 % |
25 ans | 0,91 % | 1,45 % |
Est ce que la baisse de taux va être durable ?
Le reconfinement pour une durée limitée n’aura que peu de conséquences sur l’évolution des taux de crédit. Rappelons également que les banques cherchent encore à gagner des clients, après une année 2020 marquée par une diminution du nombre de demande de prêts.
En conséquence, les organismes de crédit ont tout intérêt à pratiquer des taux compétitifs pour attirer les candidats à l’achat immobilier. La politique de la banque centrale européenne risque aussi de continuer sur des taux directeurs assez bas, de nature à relancer la croissance, la consommation et l’économie. Néanmoins, ces politiques peuvent s’avérer risquées à plus long terme. Notamment en ce qui concerne la confiance des ménages. En effet, avec des taux bas pendant une très longue période, la confiance peut s’éroder, créant au passage les conditions idéales pour une hausse de l’épargne de précaution. Soit exactement l’inverse de l’objectif initial.
Sur un horizon de court et moyen terme, les taux d’intérêts devraient néanmoins rester bas. Si la situation sanitaire venait à ajouter de l’incertitude sur une période beaucoup plus longue, les réalités du marché de l’emprunt pourraient alors évoluer.
Une baisse des taux propice aux projets immobiliers ?
Si les taux d’intérêts sont très bas, ils favorisent en principe l’investissement immobilier. Dans des projets d’achat de résidence principale ou dans l’optique d’un investissement locatif.
En revanche, les conditions et les recommandations du HCSF (Haut Conseil de Stabilité Financière) ont tendance à faire diminuer le nombre de projets financés par les banques. En effet, dès 2019, le Haut Conseil avait formulé des directives à l’attention des banques, afin de limiter le risque de surendettement des ménages. Ces mesures précisait notamment :
- Le respect plus scrupuleux du taux d’endettement de 33 %
- Un apport pour le projet d’environ 10 % minimum
- L’impossibilité d’emprunter sur une durée supérieure à 25 ans
Sur ces conditions, les banques peuvent déroger aux règles sur environ 15 % des crédits octroyés. La marge de manoeuvre se réduit de ce point de vue pour les organismes financeurs. C’est notamment ce que reprochent certains courtiers qui plaident pour le doublement des dérogations d’ici 2021. Les professionnels entendent en effet porter ce taux d’exception à hauteur de 30 %.
Si en un sens, la baisse des taux a un effet incitatif à l’achat immobilier, celle-ci est par ailleurs freinée par les directives du HCSF. Sur les mois de Septembre et Octobre 2020, le réseau de courtiers Vousfinancer note un taux de refus à hauteur de 15 % du total des dossiers. Pour l’ensemble de l’année 2020, ce taux de refus est de 11 %, alors que la crise sanitaire est présente depuis le mois de Mars. Sur l’ensemble de l’année 2019, les dossiers refusés ne représentaient qu’à peine plus de 5 % des dossiers traités. Les professionnels du réseau Cafpi font le même constat. Le plus inquiétant est probablement la gradation dans le pourcentage de refus. Celui-ci est en hausse permanente depuis Mai dernier. Selon certains experts, ce pourcentage risque même encore de grandir si aucune mesure n’est prise rapidement.
Si les conditions d’accès au crédit se resserrent, cela semble surtout être le cas pour les ménages les plus précaires. Conformément à ce que nous avons vu, les meilleurs profils continuent à bénéficier d’emprunts à des conditions plus favorables. Par ce biais, les banques cherchent aussi à sauvegarder leur clientèle mais aussi à maitriser le risque.
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