On parle beaucoup de « personnes solidairement responsables » (du paiement des impositions dûes) en matière d’impôts de toute nature, mais qu’en est-il concrètement ? Le présent article explore les différents domaines d’application de cette « responsabilité solidaire ».
S’agissant de dirigeants :
Selon l’article L 267 du Livre des procédures fiscales (LPF), toute personne qui exerce directement ou indirectement, en droit ou en fait, la direction effective d’une société, ou autre personne morale, peut être désignée par le président d’un tribunal judiciaire comme étant solidairement responsable du paiement des impositions et pénalités que doit cette société ou personne morale, quand elle est coupable de manœuvres frauduleuses, ou d’inobservations graves et répétées d’obligations fiscales, ayant conduit à l’impossibilité de recouvrer ces impôts et pénalités.
L’administration fiscale est tenue d’engager cette action « en responsabilité solidaire » devant la Justice dans les meilleurs délais, un juge ne pouvant pas statuer sur la solidarité de la personne qi la dette fiscale est prescrite à la date du jugement (Cassation, com. 8 juillet 1997, n° 95-16 757 P).
La décision d’un juge judiciaire déclarant sur le fondement de l’article du LPF précité, qu’un dirigeant est solidairement responsable de l’impôt et des pénalités dûs par une société ou autre personne morale, est interruptif de la prescription (de 4 ans) visée à l’article L 274 du même Livre, et elle a pour effet d’ouvrir (en-avant) au comptable public un nouveau délai de 10 ans (et non 4 ans) pour en poursuivre le recouvrement (en ce sens : Conseil d’Etat, req. n° 406 638 du 18 juillet 2018).
Dans les situations de « distributions occultes » visées aux articles 111 et 117 du code général des impôts (CGI), les pénalités (généralement égales à 100% des distributions occultes) sont mises à la charges des dirigeants de droit ou de fait solidairement responsables et qui exerçaient leurs fonctions à la date du versement des distributions occultes, ou à défaut à la date de déclaration des résultats de l’exercice au cous duquel ont été effectuées ces distributions occultes.
S’agissant d’un propriétaire de fonds de commerce :
le propriétaire d’un fonds de commerce – s’il n’exploite pas lui-même ce fonds – est responsable du paiement des impôts directs dûs par l’exploitant jusqu’à la publication du contrat de location-gérance, si ce propriétaire a eu connaissance des manquements déclaratifs ayant entraîné l’application aux impôts dûs par l’exploitant, les majorations de 40% ou de 80% pour défaut, retard ou insuffisance de déclaration (article 1 684, 3 du CGI).
Concernant les époux et partenaires liés par un PACS :
ils sont solidairement responsables du paiement de l’impôt sur le revenu (article 1 691 bis du CGI), mais cette solidarité ne concerne pas le paiement des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine.
Ils peuvent obtenir la décharge de cette obligation solidaire s’ils sont divorcés ou séparés et qu’une disproportion notable apparaît entre le montant de la dette d’impôt, et leur situation financière et patrimoniale respective.
Les propriétaires, ou les principaux locataires :
ils sont solidairement responsables du paiement de la taxe d’habitation et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) qui sont dues par les locataires qui ont quitté les lieux, sauf à dégager leur responsabilité s’ils informent le comptable public du déménagement de leurs locataires ( articles 1 686 et 1 687 du CGI).
Les héritiers :
ils peuvent être personnellement solidairement responsables des impôts directs recouvrés par voie de rôle, qui sont dus par les personnes dont ils héritent ou auxquelles ils succèdent, à due proportion de ce qu’ils reçoivent de la succession (article 1 682 du CGI).
Les cessionnaires d’une entreprise industrielle, commerciale, artisanale, non commerciale, ou encore d’une charge ou d’un office ministériel (Commissaires de justice ; notaires) :
ils peuvent être poursuivis en paiement solidaire de l’impôt sur le revenu dû par le cédant, à l’impôt sur les sociétés et à la taxe d’apprentissage le cas échéant, à concurrence du prix du fonds de commerce et pendant 90 jours suivant l’avis de cession adressé par l’administration par le cédant, sauf lorsque la cession porte sur un fonds de commerce, auquel cas la solidarité en paiement court du jour de dépôt de la déclaration de résultat, réduit à 30 jours si l’avis de cession et la déclaration de résultat ont été déposés en temps normal (article 1 684, 1 et 2 du CGI).
Les complices de contribuables fraudeurs :
Ils sont tenus solidairement responsables du paiement des impôts soustraits frauduleusement et leurs pénalités, au même titre que les coauteurs ou complices de personnes n’ayant pas versé les retenues à la source sur certains revenus versés à des « non-domiciliés fiscalement en France » et prévues aux articles 182 A et B du CGI (article 1 691 du CGI).
Concernant le paiement des droits d’enregistrement :
Généralement, toutes les parties sont solidaires envers l’administration fiscale pour le paiement des droits simples, des amendes et des pénalités, sauf exceptions (articles 1 705 à 1 710 du CGI).
Paiement de la TVA :
Dans les opérations frauduleuses dites « carrousels », ou encore de « fraude au régime de la marge » sur les ventes de véhicules d’occasion, tout assujetti pour qui a été effectuée une livraison de biens ou une prestation de services qu’il savait due, est tenu solidairement responsable du paiement de la seule TVA impayée. Mais l’administration doit apporter la preuve que l’assujetti savait que la TVA était due (article 283, 4 bis du CGI).
Les opérateurs de plateforme en ligne qui mettent en relation à distance électroniquement des personnes pour la vente d’un bien ou d’un service, peuvent quel que soit leur lieu d’établissement être tenus solidairement responsables du paiement de la TVA due par les personnes vendant un bien par leur intermédiaire (articles 283 bis et 293 A ter du CGI).
Taxe d’aménagement :
Les établissements qui sont garants de l’achèvement de la construction, les époux et les partenaires pacsés, sont tenus solidairement responsables du paiement de la taxe d’aménagement prévue aux articles L 331-1 à L 331-9 du code de l’urbanisme (en ce sens : article L 331-25 dudit code).
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