Les théories économiques divergent parfois. Si certaines prennent en compte le côté parfaitement rationnel des agents économiques, d’autres, pour des raisons parfois diverses viennent amoindrir cette représentation. Parce que l’investisseur, le trader est difficilement séparable de l’humain et des sentiments qu’il peut éprouver, la finance comportementale s’attelle à déconstruire l’image de l’investisseur parfaitement rationnel.
L’application des principes de la psychologie à la finance
Les principes de la finance comportementale apparaissent il y a près de 50 ans. A l’époque il est alors question de trouver des pistes pour expliquer que les marchés financiers ne sont parfois pas efficients. Cette théorie suppose que les investisseurs réagissent sur les marchés en fonction de paramètres rationnels mais aussi sous l’influence de biais. Ces biais peuvent être émotionnels et ainsi influer sans raison particulière sur le cours d’un actif.
Pour mettre sur pied leurs idées, les théoriciens de la finance comportementale identifient plusieurs types de biais, susceptibles d’influencer l’investissement et donc les marchés financiers. Ces biais sont, entre autres :
- Le cadrage : qui consiste à appréhender un actif sous un seul angle, sans en maitriser toute la complexité. On écarte alors une grande partie des facteurs qui pourraient expliquer les fluctuations du cours d’un actif.
- L’ancrage mental : qui consiste à élaborer une théorie en fonction d’un nombre limité d’exemples. Ceci est dangereux pour l’investisseur qui pourrait avoir tendance à raisonner par l’exemple.
- La confirmation : il est alors question de confirmer des impressions plutôt que de chercher à les remettre en doute. Appliqué au domaine de la finance, l’investisseur aura alors tendance à rechercher uniquement des informations venant étayer son avis initial.
- Les biais sociaux : Les investisseurs pourraient par exemple agir via un effet mouton en ne se basant parfois que sur la tendance du marché.
D’autres biais viennent aussi démentir la théorie de l’investisseur parfaitement rationnel comme l’excès de confiance ou le biais affectif. L’approche de la finance comportementale consiste alors à correctement cartographier ces biais potentiels.
Bien comprendre la finance comportementale avec une expérience
Les travaux sur la finance comportementale ont pris une tournure mondiale il y a une vingtaine d’années. En effet, cette théorie a été récompensée par le prix Nobel d’économie en 2002 de leurs deux têtes d’affiches : Daniel Kahneman et Vernon Smith.
Pour pointer du doigt le manque de rationalité des investisseurs, les deux économistes ont mis sur pied une expérience simple. En prenant pour base un jeu de loterie. En choisissant la loterie A, les sujets gagnent dans 100 % des cas, 1 million de dollars. La loterie B offre quant à elles des probabilités différenciés. Avec 10 % de probabilités de gagner 2,5 millions de dollars, 89 % de probabilités de gagner 1 million de dollars et 1 % de probabilités de ne rien gagner.
Un rapide calcul de l’espérance mathématique nous montre que la loterie B est plus avantageuse. En effet, pour la loterie A, l’espérance mathématique est de 1 million. Dans le cadre de la loterie B, l’espérance mathématique est de 1,14 millions de dollars. Cela signifie qu’en moyenne, sur une infinité de tirage, chaque personne gagnerait 1 million (loterie A) ou 1,14 million (loterie B). Dans un monde purement rationnel, chaque individu choisirait donc la loterie B. Ce qui est dans la réalité loin d’être le cas. Dans ce cas précis, afin de sécuriser un gain. Cette expérience a notamment permis de mettre en avant que les individus ne réagissent pas de la même manière au gain et à la perte. En effet, le gain est souvent sécurisé. A l’inverse, une perte est souvent suivie d’une volonté de “se refaire rapidement” de la part de l’investisseur.
Lorsqu’un fond d’investissement ou qu’un conseiller en gestion de patrimoine prend en compte le profil d’un investisseur, il applique d’une certaine manière des principes de finance comportementale.
Une explication de la volatilité des marchés ?
Si l’investisseur peut agir de manière irrationnelle, il est important de comprendre que les marchés dans leur ensemble le peuvent aussi. Les deux notions sont d’ailleurs liées.
Les paramètres qui sous tendent la finance comportementale permettent de déterminer que les marchés financiers ont une mémoire. Cette théorie permet d’affirmer qu’il est alors possible, dans une certaine mesure, d’anticiper des fluctuations d’un actif en fonction de situations passées.
Lors d’épisodes de crise, les émotions des investisseurs peuvent être mises à rude épreuve. En cas de retrait massif d’un actif, cela peut parfois entrainer un effet boule de neige et déclencher une très grande volatilité de l’actif concerné.
Considérer l’irrationnel : une démarche finalement rationnelle ?
Si une stratégie d’investissement rationnelle doit faire la part belle à des études chiffrées et une recherche documentaire, il ne faut pas oublier de prendre en considération les différents biais. A ce titre et selon le contexte, la panique est une variable parfois plus importante que des données chiffrées.
Pour se protéger des mouvements du marché, la stratégie de diversification reste toujours la meilleure solution. De plus, en disposant d’actifs correctement diversifiés, la probabilité d’agir instinctivement et avec émotion diminue. Dans ce genre de cas de figure, un actif dont le prix venait à diminuer sera bien souvent compensé par d’autres actifs dont les cours seront plus à votre avantage.
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