Sous quelles conditions les copies de documents fiscaux peuvent-elles être demandées et même rendues obligatoires dans les contrôles fiscaux ?
Il n’est pas de contrôle fiscal externe efficace et probant, sans l’emport par le service de vérification, des copies de documents qui lui sont nécessaires pour matérialiser (devant le juge de l’impôt) la preuve de l’infraction relevée. Or les entreprises soumises à une vérification, tout comme d’ailleurs certaines personnes physiques, ont jusqu’ici souvent usé de cet atout pour elles, afin de retarder, d’entraver, sinon d’empêcher par des procédés bien rôdés, que le vérificateur se procure ces copies de documents (photocopieuse en panne ou sans cesse occupée ; plus de papier ou pire, plus d’encre ; refus catégorique d’utiliser la photocopieuse, la demande de copies devant passer par le dirigeant, pour lequel parfois, il était visible que ça ne constituait pas sa priorité…).
Une procédure précise, et des sanctions applicables en cas de refus des contribuables :
or la fourniture de la copie d’un document au fisc dans le cadre d’un contrôle fiscal (vérification de comptabilité ; examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ; instruction sur place des demandes de remboursement de crédit TVA) fait désormais l’objet d’une procédure précise, assortie de sanctions en cas de refus. L’administration fiscale commente en effet l’article L 13 F du Livre des Procédures Fiscales, obligeant les entreprises à fournir une copie de certains documents au cours des contrôles effectués par l’administration fiscale (BOI-CF-CPF-40 du 3 mai 2017).
Ledit article dispose en effet que « les agents de l’administration peuvent, sans que le contribuable puisse s’y opposer, prendre copie des documents dont ils ont connaissance dans le cadre des procédures de contrôle prévues aux articles L. 12 et L. 13(du même Livre). Les modalités de sécurisation des copies de documents sous forme dématérialisée sont précisées par arrêté du ministre chargé du budget ».
Issue de l’article 44 de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale, la mesure a pour objet d’inscrire dans la loi la possibilité pour les agents de contrôle de prendre des copies des documents qu’ils sont amenés à consulter lors des procédures de contrôle : « Cette mesure a pour objet de mettre fin à une pratique non coopérative de certaines entreprises qui refusent de donner des copies ou l’autorisation de prendre ces copies au service vérificateur. En cas de non respect de cette obligation, une sanction est applicable afin de rendre effective la nouvelle mesure et de permettre à l’administration d’effectuer au mieux les missions qui lui sont confiées », selon l’auteure de l’amendement à l’origine de cet article L 13 F.
Une forme de copie libre :
ainsi, le vérificateur peut demander à tout moment au contribuable vérifié de lui fournir une copie de tout document consulté lors des opérations de contrôle, sans avoir besoin de « formaliser l’emport de copies » de documents dans le cadre de ses opérations, le contribuable vérifié étant de toutes les façons toujours en possession de ses documents originaux !
De plus, l’article L 13 F du Livre précité précise que le contribuable est entièrement libre de fournir une copie des documents sous la forme qu’il veut : papier ou dématérialisée, la remise de copies de documents sous forme papier n’étant soumise à aucune règle particulière. En revanche, s’agissant des remises de copies de documents sous forme dématérialisée, un arrêté du 17 novembre 2014 définit les modalités ci-après pour leur sécurisation :
ces modalités de remise de copies sous la forme de documents électroniques sont définies en accord avec le vérificateur, tous les supports étant envisageables, (CD-Rom, DVD-Rom, clef USB, support externe, serveur sécurisé), et afin de garantir la lisibilité des copies transmises sous forme dématérialisée, ces copies sont remises par le contribuable sous le format « pdf » (Portable Document Format). En cas d’impossibilité pour le contribuable de les fournir sous ce format « pdf », il peut utiliser un autre format, à partir du moment où celui-ci est compatible pour une conversion au format « pdf » par le vérificateur, sauf pour les documents obtenus dans le cadre d’un contrôle des comptabilités informatisées en application du I de l’article L 47 A du LPF et du II de l’article L 47 A du LPF.
En l’absence de toute réclamation contentieuse de la part du contribuable, les copies ainsi obtenues sont détruites par l’administration fiscale à l’expiration du délai prévu à l’article R* 196-1 du LPF et à l’article R* 196-3 du même Livre, mais en cas de réclamation contentieuse, le service doit conserver les copies des documents jusqu’au prononcé définitif d’une décision statuant sur la réclamation ou d’une décision juridictionnelle qui n’est plus susceptible d’appel ou de pourvoi en cassation (après quoi, l’administration procède à la destruction des copies).
De lourdes sanctions à la clef en cas de refus :
l’article L 13 F du Livre a prévu des sanctions fiscales, en cas de non-respect de ces dispositions. Ainsi, quand le contribuable ne fournit pas la copie demandée (quelle qu’en soit la forme), le vérificateur applique la sanction prévue au deuxième alinéa de l’article 1734 du Code général des impôts, soit une amende de 1 500 euros par document demandé et pour lequel le contribuable s’oppose à sa copie, sans que le total des amendes puisse être supérieur à 50 000 euros. On le voit, ce dernier montant de pénalités est plutôt dissuasif et il permet désormais aux contrôles externes, qui sont légitimes dans un système déclaratif, de pouvoir s’exercer sans rétention de documents ni opposition des contribuables.
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