Les raisons de faire l’objet d’un contrôle fiscal : Quels sont les critères présidant à un contrôle du Fisc ?
Bon an mal an, il s’effectue en France plus ou moins 45 000 contrôles, chiffre à peu près constant chaque année, mais que Bercy veut voir progresser dans les années à venir, le Gouvernement voulant augmenter les « moyens » et les « sanctions » pour lutter contre la fraude fiscale, dont les contrôles ont rapporté plus de 10 milliards d’euros en 2022. Hausse de 25% du nombre de contrôles fiscaux « sur les gros patrimoines » et recrutement de 1500 agents supplémentaires dédiés à cette tâche d’ici à la fin du quinquennat, sont les objectifs assignés aux limiers de Bercy par le ministre de l’Action et des Comptes publics, G. Attal.
Il ne s’agit pas que de vérifications de comptabilité, puisque dans ce nombre, figurent également les ECSFP, beaucoup moins nombreux, et qui sont des situations de vérifications fiscales personnelles (examen contradictoire d’ensemble de la situation fiscale personnelle), et les contrôles effectués « du bureau », c’est-à-dire « sur pièces », autrement dit à partir du simple rapprochement de ce que les contribuables ont déclaré, et des renseignements que l’administration fiscale a reçu de son côté de divers horizons notamment des employeurs, des banques, de l’Urssaf, des assureurs, etc, concernant ces contribuables.
Critères, ou pas critères ? Le top des 18 motifs de contrôles fiscaux
Les contrôles et vérifications (comptabilité) pourraient se jouer sur un « coup de dés », les services des impôts feraient tout de même des découvertes, probablement ; mais, moins bien ciblées, elles seraient sans doute moins efficaces. Les ECSFP constituent un domaine à-part, dans la mesure où d’une part, ils peuvent être la suite logique d’une mise en examen d’un dirigeant, et d’autre part parce qu’ils s’effectuent aussi « du bureau », par rapprochements entre les revenus et montants déclarés, d’une part, et le patrimoine, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie du foyer fiscal du contribuable, et qu’il s’agit d’un type de vérification aux délais très rigoureux, et qui peut se prolonger sur un an.
Dans la pratique, on constate que les dossiers vérifiés ne le sont pas tout à fait au hasard. Mais alors, sur quoi se basent les services fiscaux pour orienter leurs choix ? Il n’existe en réalité pas une cause possible, mais une multitude de situations, susceptibles de provoquer le déclenchement d’une vérification ou d’un contrôle. Parmi elles, les plus courues sont les suivantes, et elles valent essentiellement pour les vérifications de comptabilité, puis pour les contribuables – personnes physiques.
Des entreprises entretenant des relations commerciales et financières avec l’étranger, encore plus avec des pays à fiscalité privilégiée, ou (et) y ayant des sociétés apparentées ; le Fisc sera tenté de faire usage des articles 238 du Code général des Impôts (relations avec entreprises établies dans des pays à fiscalité privilégiée), et 57 du même code, lorsqu’elle soupçonnera les avantages consentis à une société du groupe implantée à l’étranger, en considérant qu’en fixant les prix de transfert entre sociétés, et se basant non pas sur le prix du marché, mais en fonction du régime fiscal privilégié applicable dans le pays étranger, le groupe soustrait en fait au Fisc français une part importante de bénéfices qui devraient y être soumis à l’impôt sur les sociétés ;
Des activités situées dans des secteurs sensibles : restauration (emplois non déclarés) ; bâtiment (emplois clandestins) ; agences d’intérim (fraudes ; emplois non déclarés). Souvent, les contrôles résultent de directives administratives, Bercy décidant de lancer des vérifications systématiques sur tel ou tel secteur d’activité ;
Des activités jamais vérifiées, ou largement « sous-vérifiées » : ça reste rare, mais il existe encore des entreprises qui n’ont jamais été vérifiées ;
Des entreprises en déficits chroniques, sans raisons apparentes : souvent le Fisc découvre qu’elles ne sont pas seules ;
La réalisation d’opérations intra-groupe entre sociétés bénéficiaires et déficitaires : il existe diverses façons de rajeunir les déficits voire de les annuler anormalement ;
L’absence ou le retard dans les déclarations d’IS (impôt sur les sociétés) ou de TVA : si ces retards sont fréquents, ils peuvent susciter la curiosité des inspecteurs des finances publiques ;
Des contribuables ou redevables récidivistes défaillants : aussi étonnant que cela puisse paraître, nombreuses sont les entreprises qui ne retiennent pas la leçon, et qui « retentent leur chance » après un contrôle positif ! Sont-ils « addicts » à la fraude ? (Ne dit-on pas en France que la fraude fiscale est un « sport national » ?). Toujours est-il que les « récidivistes » sont un grand classique du contrôle fiscal !
Des opérations de fusions ; fusions-absorptions ; scissions de sociétés, en franchise d’impôt : c’est en effet la porte ouverte à de nombreux montages financiers souvent très complexes, qui font la réputation et la fortune d’avocats spécialisés dans ceux-ci ;
Des entreprises sous-traitantes ou en relations financières avec des entreprises qui fraudent : il est logique que des soupçons pèsent sur elles, c’est pourquoi elles sont, sinon vérifiées, du moins surveillées de près ;
Un chiffre d’affaires incohérent par rapport au secteur d’activité : les limiers du Fisc qui se penchent sur les comptes d’une entreprise, rapprocheront toujours les marges que celle-ci déclare, avec celles de ses concurrentes dans le même secteur d’activité, et s’ils décèlent une grosse anomalie par rapport à la marge moyenne constatée par ailleurs, dans les entreprises concurrentes, elles rectifieront les résultats de l’entreprise vérifiée en conséquence !
Des variations de revenus suspectes : déclarer des revenus en dents de scie, d’une année sur l’autre, est la meilleure manière d’éveiller l’attention du fisc, même si le plus souvent ces variations se justifient ;
Un train de vie incohérent : les agents des impôts ont de plus en plus les moyens à leur disposition pour traquer la fraude : ils mettent à profit tous les renseignements utiles qui lui sont obligatoirement adressés chaque année par les différents intervenants économiques, même étrangers, dans le cadre de l’échange automatique de renseignements ; ils recoupent les déclarations, les réseaux sociaux sur lesquels ils naviguent eux aussi (Facebook ; YouTube ; instagram ; Tweeter etc), et ils lisent la « presse people ». Certains signes ont vite fait d’attirer l’attention de l’administration fiscale dont l’une des tâches est de confronter la situation déclarée par les contribuables avec la réalité. Il n’est ainsi pas rare qu’ils découvrent qu’une personne déclarant des revenus modestes voire ridicules, soit surprise par exemple sur Facebook, au volant de sa voiture, un modèle « haut de gamme » récent, et dont il se vante dans une vidéo ! …
Les prêts familiaux non déclarés : des prêts entre époux, ou en faveur d’un enfant, ou encore entre frères et sœurs, s’ils sont supérieurs à 5000 euros et qu’ils n’ont pas été enregistrés auprès de l’administration fiscale, peuvent faire penser aux contrôleurs que ces prêts constituent une forme de donation déguisée, alors même que ce n’est souvent pas le cas, et que souvent leur remboursement, bien que prévu, est différé dans le temps ! Il est vivement conseillé d’établir une déclaration de prêt et un échéancier de remboursement, si possible non différé ou en tout cas, non exagérément reporté, et de veiller à ce que des remboursements réguliers soient effectués, et de conserver bien sûr les traces écrites de tous ces documents et opérations !
Une banque étrangère : les « banques en ligne » par exemple proposent l’ouverture rapide d’un compte bancaire gratuit, sauf que certaines d’entre elles sont basées à l’étranger ! Or l’administration fiscale impose de déclarer les comptes ouverts à l’étranger sur un formulaire spécifique depuis 2019 ! La seule omission d’une telle déclaration déclenche l’application d’ une amende forfaitaire de 1500 euros, sur quatre années.
Les erreurs dans les déclarations d’impôt : aussi bête que cela puisse paraitre, de simples erreurs non rectifiées dans les déclarations d’impôts peuvent suffire aux agents du Fisc à se poser des questions et à s’intéresser de près aux contribuables fautifs, bien qu’il ait été instauré un « droit à l’erreur » qui permet aux contribuables qui en respectent les conditions d’application de ne pas être pénalisés !
Une pension alimentaire injustifiée : certains parents continuent d’aider leurs enfants, devenus adultes, par des dons en argent. Le versement d’une pension alimentaire n’est déductible des revenus du donateur que si l’enfant est nécessiteux ! Aussi, donner régulièrement entre 1 000 et 2 000 euros tous les mois à un enfant qui dispose déjà d’un revenu, même faible, est s’exposer à la curiosité des contrôleurs des impôts, qui dans ce cas rejetteront la réalité de « l’état de nécessité » !
Un IFI (Impôt sur la fortune immobilière) sous-évalué : alors que le seuil d’imposition à l’IFI n’a pas été réévalué depuis dix ans, cet impôt est dû sur les valeurs vénales des biens immobiliers, après abattements suivant qu’il s’agit d’une résidence principale ou non, et de décotes (pour vétusté ; ancienneté du bien, etc) dans les limites admises par l’administration fiscale et généralement qui sont des minorations en pourcentage, des valeurs vénales des biens, telles que reconnues par la jurisprudence en la matière. Exagérer ces décotes, trop minorer les valeurs à déclarer, revient certes à diminuer l’IFI voire, dans certains cas, à y échapper, mais tôt ou tard à la revente de l’un de ces biens, les contribuables se font prendre par le Fisc si celui-ci remarque une forte plus-value immobilière ! Il redressera alors l’IFI plusieurs années en arrière, pénalités en sus !
La location meublée en SCI : un bien immobilier détenu au travers d’une Société Civile Immobilière (SCI) présente des avantages, mais cela empêche de pratiquer une activité fiscalement commerciale, comme c’est le cas de la location meublée, à moins de changer le régime fiscal de la SCI pour la soumettre à l’impôt sur les sociétés, mais alors, à la revente du bien et en cas de plus-value, le régime des « plus-values professionnelles » sera un net désavantage. Or beaucoup de contribuables oublient ce détail, en louant leur bien en SCI selon le régime de la location meublée LMNP, sans changer leur SCI de régime fiscal ! C’est aussi là un piège classique, à l’origine de contrôles fiscaux !
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