En ce début d’année 2021, on ne compte plus les exemples ou les marchés se sont révélés particulièrement irrationnels. Au travers de cet article, nous allons reprendre quelques uns de ces éléments. Il sera aussi surtout question d’analyser et de chercher à comprendre les motifs de ces folies des marchés. Entre culture du même, et émergence d’une nouvelle catégorie d’investisseurs.
Elon Musk : influenceur boursier numéro 1 en 2021
Fin janvier 2020, le PDG de Tesla et de SpaceX ajoute à sa biographie Twitter le #bitcoin. En l’espace de 24 heures, le cours du Bitcoin s’envole de 17 %. Même cas de figure le 26 janvier, lorsque l’homme le plus riche du monde tweeta simplement « aimer Etsy ». Dès l’ouverture des marchés, le titre de l’entreprise prendra 18 %.
Quelques semaines plus tôt, c’est par un tweet de deux mots « Use Signal » et un incroyable quiproquo qu’Elon Musk montrera encore son influence sur les marchés. Si il était initialement question de promouvoir l’application Signal comme substitut de Whatsapp, c’est bien le cours de l’entreprise texane Signal Advanced qui profitera directement de ce tweet. En trois séances, l’entreprise de dispositifs médicaux bondit alors de plus de 6 000 %, en passant de 60 centimes à près de 38,70 dollars l’action. Les marchés corrigeront le quiproquo dès le lendemain avec un cours divisé par 4 dans la journée du 12 janvier. Aujourd’hui, une action Signal s’échange sur les marchés contre 2 dollars.
Dogecoin : Une blague à 6 milliards de dollars ?
Car avant Elon Musk, c’est le groupe de traders Wall Street Bets qui avait contribué à populariser la cryptomonnaie qui revendique elle-même son inutilité. Le groupe de traders est d’ailleurs particulièrement actif sur Reddit et connu pour son humour et sa vision décalée de la finance.
L’affaire GameStop : David contre Goliath ?
GameStop a fait beaucoup de bruit sur les marchés ces dernières semaines. Si l’histoire n’a rien du canular, elle reflète aussi à sa manière l’imprévisibilité des marchés. Sur le forum Reddit, des milliers d’investisseurs se sont liés pour prendre à leur propre jeu des fonds d’investissement qui faisaient du « short selling« . Le procédé consiste pour les fonds à parier sur la baisse du cours d’un titre en empruntant des actions de ce titre pour les revendre à un prix élevé. Pour pouvoir rembourser l’emprunt, les fonds rachètent ensuite les actions sur le marché à un prix plus bas.
C’est selon cette logique que certains fonds ont souhaité faire du short selling sur l’action GameStop. Pour contrer ce phénomène, les masses de milliers d’investisseurs se sont alors rués à l’achat du titre, afin de faire gonfler son cours. Cet acte, loin d’être anodin, témoigne de la capacité de réaction de plus petits acteurs, lorsqu’ils coordonnent leurs actions. Si une action était côté à la mi-janvier environ 20 dollars, l‘action a décollé jusqu’à flirter avec la barre des 350 dollars. Les jours suivants ont été à la correction sévère et un cours qui est retombé sous la barre des 50 dollars. Entrainant au passage, le gel des transactions sur des brokers comme Robinhood. Pour cause d’une volatilité du titre beaucoup trop importante.
Selon les données du Financial Times, cet épisode aura fait perdre près de 4 milliards de dollars au fond américain Melvin Capital. Une affaire dans laquelle Elon Musk s’est aussi immiscé, en publiant des tweets relatifs à GameStop. Renforçant encore au passage la tendance à l’achat du titre.
Le cas Tesla : Folie des marchés ou valorisation justifiée ?
Pourtant, les experts sont de plus en plus nombreux à pointer du doigt cette incohérence boursière que représente Tesla. Avec une valorisation boursière totalement disproportionnée au vue des capacités productives de la marque de Palo Alto.
A titre d’exemple, en novembre dernier, le groupe était valorisé 25 fois plus que PSA et 44 fois plus que l’empire Renault. En comparant avec les deux leaders mondiaux que sont Volkswagen et Toyota, les données brutes peuvent interroger tout investisseur.
Entreprise | Valorisation boursière au 5 mars 2021 | Nombre de véhicules vendus en 2020 |
Tesla | 464 milliards d’euros | 499 550 |
Volkswagen | 104 milliards d’euros | 9 305 400 |
Toyota | 202 milliards d’euros | 9 530 000 |
La capitalisation boursière de Tesla est donc près de 5 fois plus importante que celle de Volkswagen qui vend quasiment 20 fois plus de véhicules. Des données qui peuvent laisser songeur. En Janvier dernier, la capitalisation boursière de Tesla dépassait le total des capitalisations de Toyota, Volkswagen, Mercedes Daimler, General Motors, Ferrari, BMW, Honda, Hyundai, Fiat Chrysler, Ford ou encore PSA. Toutes ces entreprises représentaient alors près de 700 milliards de dollars. Une année auparavant, la seule capitalisation de Toyota était supérieure à celle de Tesla.
Le cas Airbnb : une action surévaluée ?
L’introduction boursière de l’action Airbnb avait fait l’objet d’une première cotation du titre à hauteur de 68 dollars par action. Pour sa première journée, le titre fait plus que doubler en clôturant juste en deçà de la barre des 145 dollars.
Mais c’est surtout la comparaison entre Booking et Airbnb qui incite certains observateurs à considérer que le titre Airbnb est potentiellement sur-évalué. Reprenons plusieurs éléments des deux sociétés à travers un tableau :
Groupe | Capitalisation boursière au 05 mars 2021 | Chiffre d’affaire 2020 | Chiffre d’affaire estimé pour 2021 | Résultat 2020 | Résultat estimé pour 2021 |
Airbnb | 99 milliards de dollars | 3,34 milliards de dollars | 4,29 milliards de dollars | – 3,27 milliards de dollars | – 652 millions de dollars |
Booking | 90 milliards de dollars | 6,75 milliards de dollars | 10,24 milliards de dollars | 142 millions de dollars | 1,99 milliard de dollars |
Si l’analyse pour Tesla tient aussi compte des perspectives d’évolution dans le futur, cet argument semble plus difficile à utiliser concernant Airbnb. Comparativement à Booking, la croissance estimée du groupe semble à priori plus faible pour l’année 2021 (+28 % contre + 51 % pour Booking).
2020 : Une année marquée par l’avènement des traders inexpérimentés
Le confinement à l’échelle mondiale a probablement joué un rôle crucial dans le développement de ce phénomène. L’année 2020 a été marquée par une hausse considérable du nombre de traders en ligne. Une hausse dont ont profité des courtiers en ligne comme Robinhood ou encore la plateforme eToro.
Mais ce nouveau public d’investisseurs a aussi eu un impact direct sur les marchés. Rendant ceux-ci bien moins rationnels et beaucoup plus axés sur le mimétisme. Ce phénomène entraine une volatilité extrême sur des actifs comme les actions. Sur le marché des cryptomonnaies, ces investisseurs peuvent aussi renforcer la volatilité des ces actifs déjà explosifs. Ce nouveau public a d’ailleurs été particulièrement friands d’introductions boursières (IPO). De nombreux experts notent que les introductions boursières sont particulièrement plébiscitées par les investisseurs en ce début d’année.
Les différents confinements ont aussi déplacé certains parieurs sportifs des terrains vers les plateformes de trading. En effet, avec le confinement et l’arrêt des compétitions sportives, de nombreux profils se sont alors tournés vers l’investissement boursier. En transposant le paradigme du pari sportif et les risques qui y sont associés dans le domaine boursier.
Un autre phénomène explique aussi la survalorisation de certaines valeurs : le côté « cool » à détenir des actifs comme des cryptomonnaies ou des actions de concepts novateurs. Au détriment parfois d’une analyse sectorielle et d’une analyse des chiffres clés de l’entreprise. Cet élément pourrait expliquer à lui seul qu’une partie des investisseurs préfèrent l’action Airbnb à l’actif Booking, pourtant plus prometteur d’un point de vue des chiffres.
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